IÑfluencia POURQUOI MISER SUR LE SHOPPER MARKETING, OU MARKETING EXPÉRIENTIEL ?
JÉRÉMY DAHAN Toutes les marques se trouvent aujourd’hui face à des consommateurs qui ont envie d’être pris en compte, entendus, de dialoguer avec la marque et d’essayer les produits. Il y a dix ans, le shopper pouvait être intimidé lorsqu’il devait aller en magasin essayer un produit. Aujourd’hui, quand il entre dans le point de vente, il sait déjà ce qu’il veut et il a tout étudié sur Internet. La seule chose qui lui manque, c’est d’entrer en contact directement avec le produit. Le digital procure une expérience jusqu’à un certain point… Plus il se développe, plus le besoin d’expérience physique augmente. Le digital et le réel fonctionnent très bien l’un avec l’autre si on réfléchit bien à la manière de les organiser. Le shopper marketing est une conséquence de toutes ces évolutions. Il est très développé aux États-Unis, mais se déploie de plus en plus en Europe. C’est un levier essentiel au sein du mix marketing in-store et out-store qui permet de tirer un fil cohérent autour de la marque et de raconter la même histoire sur tous les supports qui sont activés.
IÑ COMMENT SE MET-IL EN ŒUVRE ?
JD Puisque le shopper est en quête de sens, les marques et les agences doivent s’attacher à remettre du sens dans leurs actions, se challenger les unes les autres, être créatives… Mettre le consommateur au centre du système ne va pas se traduire de la même manière selon le code génétique propre de chaque marque. La relation entre les agences spécialisées et les marques est en train d’évoluer vers de véritables programmes annuels ou pluriannuels, à l’instar de ce qu’il se fait en publicité ou en achat d’espace. C’est précisément en suivant ce schéma que nous démultiplions l’efficacité d’une collaboration. Quand Evian a lancé La Goutte – que la marque voulait positionner comme un produit unique –, l’angle shopper était le point central du planning stratégique et la rue a été utilisée comme lieu de vente. Beaucoup de marques de grande consommation pensent par exemple qu’elles n’ont pas – ou plus – besoin de faire goûter ou tester leurs produits. Or, les progressions des ventes à l’issue d’une opération de marketing expérientiel se révèlent 10 à 30 fois plus importantes par rapport aux populations non activées.
IÑ TOUS LES SECTEURS D’ACTIVITÉ SONT-ILS AU MÊME NIVEAU DE MATURITÉ DANS CETTE RÉFLEXION ?
JD Dans tous les secteurs, l’expérience permet de travailler sur le shopper et le branding. Les marques de luxe et la distribution spécialisée ont été les premières à prendre ce sujet à bras-le-corps quand elles ont intégré la notion de shopper experience dans leur stratégie. La Fnac a trouvé des formats de magasin avec de nouveaux rayons et des produits à essayer… Même les marques qui n’ont pas leur propre réseau de distribution doivent se poser ces questions. Les enseignes ont d’ailleurs tout intérêt à ce qu’elles jouent le jeu de la créativité et de la théâtralisation pour faire vivre leurs points de vente, travailler le design de leurs magasins. Quand les enseignes voient qu’une marque se bat pour faire venir des clients dans le point de vente, les négociations deviennent souvent moins tendues. La marque qui réussit à faire entrer le shopper dans son univers s’extrait aussi d’un discours trop souvent focalisé sur la guerre des prix.
IÑ QUELLE AMPLEUR DOIVENT AVOIR LES OPÉRATIONS POUR GÉNÉRER UN IMPACT ?
JD Raconter une bonne histoire n’est pas une question de budget. Chacun fait du shopper marketing à son niveau. Pour avoir un impact significatif, les opérations d’activation doivent tout de même toucher au moins un million de personnes. Certains dispositifs de découverte du produit sur le point de vente sont très ambitieux. Heineken a ouvert des pop-up stores sur ses différentes marques dans une centaine d’enseignes. Andros sillonne la France depuis douze mois avec son Food Truck dédié aux fruits, convaincu de l’intérêt de parler en direct au consommateur.
IÑ COMMENT MESURER L’IMPACT DE CES OPÉRATIONS ?
JD Nous post-testons toutes les opérations sur le résultat transactionnel obtenu et l’impact sur l’image. Nous menons un grand chantier autour de la mesure, qui est un enjeu primordial pour les marques. L’objectif 2016 est d’établir le référentiel-marché qui mesure l’impact global des activations des marques.