Les Français, le changement et le Père Noël
Ce qui singularise un peuple, l’identifie et le différencie est un ensemble de signes, de points fixes, reconnaissable entre tous et qui fait que l’on ne confond pas un Français et un Belge. Ces invariants identitaires ne sont en rien une essence, mais simplement un mode de paraître, d’exister, de faire, de parler, de penser… Ces invariants bougent avec le temps. Ils changent. Être français (ou marocain ou russe) est une création perpétuelle, une réinvention permanente, une construction. On accepte de changer. On bouge. Ce mouvement est ainsi source de joie et d’optimisme. Les têtes familières sont priées de rejoindre les coulisses. La scène se remplit de nouveaux visages inconnus, de nouveaux bruits et de nouveaux rires.
Les Français aiment le mouvement. Ils sont pluriels et aiment changer. Mais ils aiment aussi s’accrocher à certains principes. Ils ont par exemple l’argent en horreur – contrairement aux Américains, qui en font un Dieu. Tout le monde sait que l’argent est suspect dans l’Hexagone. Cela ne cache pas un amour inavoué pour celui-ci, mais révèle plutôt une inclination constante des Français au doute et ses corollaires, la rébellion, la fronde, l’insoumission, et donc l’affirmation de cette liberté. Râler, rouspéter, douter, c’est aussi affirmer leur liberté, refuser les servitudes, mais aussi refuser les certitudes et accepter de changer. Alors, oui, les Français changent par amour pour ce qui les caractérise. Mais ils aiment aussi continuer à croire au Père Noël et l’attendent ainsi sans bouger.
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Nabil Boutaleb,
sémioticien, fondateur et animateur de l’agence Altaïr Communication, Maroc
Les Français, bien sûr qu’on les aime !
Heureusement que nous, les Belges, ne sommes pas rancuniers, car les Français nous ont toujours un peu considérés comme des attardés sympas Ils se moquent bien de nous au travers des « blagues belges », et résument notamment notre culture culinaire à la simple frite… Si ça les amuse !
Comment à notre tour définir le Français ? Je dirais qu’il est très attaché à la grandeur de son pays, son histoire, ses ancêtres, sa culture, mais qu’aujourd’hui il se fait mal à l’idée que la France ne brille plus de mille feux sur la scène internationale, politiquement, culturellement et économiquement. Les Français parlent beaucoup. J’adore regarder leurs débats télévisés, surtout en période électorale, c’est dingue ! Le Français est fier, nombriliste et peine toujours avec les langues – surtout l’anglais… –, mais il est attachant, il aime la gouaille, la bonne chair, le bon vin ! Et même si souvent il s’écoute parler, il sait se montrer altruiste, généreux et bienveillant. C’est sûr, nos voisins français, on les aime vraiment bien.
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André Dusausoy,
CEO de Lielens
à Bruxelles
La France, pays des libertés
Au-delà des clichés, mon avis sur les Français est tiré de séjours passés dans l’Hexagone et de rapports courtois avec les fils et filles de ce grand pays. J’aime leurs qualités : les Français sont un peuple qui travaille. C’est un facteur identitaire : riches, pauvres, classe moyenne, chômeurs, syndicalistes… Et les retraités ? J’en connais de nombreux qui, la soixantaine révolue, ne sombrent pas dans l’oisiveté. En plus de leur métier, les Français s’adonnent à des activités culturelles, sportives, domestiques et militantes. Le champ politique est constitué de vigoureux acteurs qui écument les plateaux de télévision, où l’actualité se fait et se défait.
Je déplore que la France, sur le plan technologique, ne suscite pas assez d’admiration. La force de son économie, certes un peu en retard dans la créativité, est également tirée du redéploiement d’héritages familiaux et d’échanges commerciaux particulièrement avantageux avec ses anciennes colonies.
Enfin, si la classe populaire de certains pays tiers attribue à tort ou à raison leur sous-développement et leur mal-gouvernance à la France – et donc aux Français –, il ne faut pas oublier qu’en France les libertés sont les valeurs les mieux gardées.
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Bertrand Tiotsop,
CEO et fondateur, Publicity and Design, Cameroun
*Le livre de la déraison souriante, Robert Sabatier.
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Isabelle Musnik
Directrice des contenus et de la rédaction
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