Traduction : chères marques, comprenez-vous, pour en être bien compris, les moins de 20 ans ? Les contenus valorisés par la Gen Z s’articulent autour de quelques valeurs clés : goût pour l’affranchissement créatif, pragmatisme malin, lâcher-prise divertissant, marqueurs de sincérité. Toutes les industries de l’imaginaire sont concernées : pop culture, contenu de marque, concept de magasin… L’agence StoryMind a étudié les tendances narratives qui touchent cette génération et les résume en neuf points clés. Vos contenus de marque se testent ici : plus vous cochez d’insights, plus vous avez de chances de créer du désir !
1. Personal hacking
Pour cette génération, l’audace n’est plus perçue comme un risque. C’est une nécessité pour se sentir singulier. Dans ce contexte, les marques jouent le jeu de la transgression. Par exemple, Adidas montre de jeunes footeux qui pénètrent par effraction dans le stade du Barça pour afficher leur talent. Dans un spot pour Asos, les jeunes affirment : Il n’y a plus de réponses, il n’y a que des questions. Givenchy lance son parfum L’Interdit en faisant descendre le luxe dans une station de métro, Porte des Lilas.
Mais c’est surtout du côté des filles que le personal hacking est le plus dynamique. La vague Feminist Warriors impose de nouveaux codes : anti-Photoshop, défaut physique assumé, body positive et attitude offensive sont ce que prônent dans le domaine du parfum et du soin Kenzo World, Waso, Dove…
2. Creative doers
La Gen Z le revendique haut et fort : nous sommes des artistes, nous avons un talent à montrer ! Ils se présentent comme DJ, chanteur, photographe, styliste, web designer, vidéaste, inventeur… Et cela change tout pour la communication !
Une marque est jugée créative non pas grâce à ses produits créatifs ou à son directeur artistique, mais parce qu’elle reconnaît ses consommateurs créatifs. La Gen Z cherche à être considérée comme source de talent. Apple, Adidas ou Samsung ont préempté cette valorisation arty de façon très explicite : Think different incite Apple, Here to create et Original is never finished encourage Adidas, Nous créons l’impensable pour que vous réalisiez l’impossible promet Samsung.
La curation de jeunes talents est un autre levier. C’est le parti pris d’Yves Saint Laurent (le lancement de Y), de Microsoft (One artist, one story), de Fanta et de Kinder Bueno (par un concours de talents sur les réseaux sociaux). C’est aussi tout l’enjeu du marketing participatif et de la customisation de l’offre. La Gen Z veut participer à la création des marques et des produits qui leur sont destinés. Glossier, Gucci ou Michel & Augustin sont rapidement devenus des référents en matière de co-création inclusive.
3. Emotion first
Les codes émotionnels des marques jeunes se sont diversifiés. Il y a quelques années, il y avait surtout le défi « waouh ! », dans le sillage des expériences extrêmes proposées par Redbull et GoPro. Aujourd’hui, d’autres registres ont le vent en poupe. L’énergie de la danse : Hermès (lancement de Twilly), Reebok (spot avec la chorégraphe Fauve Hautot), Levis (partenariat avec Vice Media). L’euphorie de la fête et de la joie : Chanel (film de Coco Mademoiselle), Amnesty International et la rage de vaincre.
Mais ce sont surtout les sens intimes qui prennent une place grandissante : le phénomène ASMR (Autonomous Sensory Meridian Response, « réponse automatique des méridiens sensoriels ») de la culture Web fait de plus en plus d’adeptes, dont notamment les tutoriels vidéo de relaxation avec du slime… Une enquête OpinionWay pour l’Institut national du sommeil et de la vigilance (INSV) menée en 2018 a montré que les 15-25 ans passaient beaucoup de temps allongés dans leur lit pour se divertir, s’informer, discuter, acheter… L’indoor semble donc prendre une certaine place, et les codes de l’émotion « cool » en bénéficient.
4. Brandtainment
Les formats publicitaires empruntent de plus en plus leurs codes à la pop culture. Les marques qui en ont les moyens n’hésitent pas à produire des spots qui ressemblent à de petits films de cinéma : Greenpeace (Evil League ; L’ultime menace), Lacoste (Timeless), Amazon (Alexa Loses Her Voice), Apple (Apocalypse).
D’autres adoptent un axe créatif qui fusionne l’imaginaire et la réalité. Le jeune consommateur peut prendre ses désirs pour des réalités : Hollywood (Do It Like You Chew), iPhone XS (Everything You Love Just Got Bigger), Asos (My Style Is Never Done). Enfin, le traitement publicitaire sous forme de dessin animé connaît un certain regain : Guerlain (Film de Noël pour La petite robe noire), Virgin Media (Adventures with Usain Bolt), Dove (Bien dans sa peau).
5. Lol culture
L’ironie et le pastiche ne sont pas des codes nouveaux, mais ils restent pérennes pour les marques. Les caméras cachées (Le Pire Stagiaire avec Greg Guillotin pour Orange), les égéries détournées, avec Antoine Griezmann jouant les Cupidon pour les déodorants Puma.
Au-delà de ces valeurs sûres, deux territoires narratifs renouvellent le genre. Certaines marques n’ont plus peur de vanter leurs produits avec une certaine autodérision. Par exemple Babybel (web-série Super fromages), Oasis (newsjacking avec la sortie de Deadpool 2) ou encore Netflix, qui fait appel à Gad Elmaleh ou Nabilla pour pasticher des scènes de séries.
D’autres encore jouent avec les codes rétro-vintage. Ils sont d’autant mieux détournés que les 15-25 ans ne les ont pas connus : les restaurants KFC (employant le personnage de son fondateur, le Colonel Sanders), le livreur de plats cuisinés Just Eat (Retour vers le futur), le réseau bancaire CIC (web-série Sitcom Vallée).
6. Z Mirror
À l’époque du selfie et de la conversation, la fonction miroir est incontournable pour gagner l’attachement des jeunes. Ce qu’ils disent d’une marque est devenu plus important que ce qu’elle dit elle-même. Stimuler le témoignage des consommateurs devient un enjeu fort. Par exemple, Miss Dior propose une love chain. Burger King récompense son plus grand fan Facebook par un cadeau exceptionnel (Joyeux Noël Sullyvan).
La fonction miroir de la Gen Z, ce sont aussi les petits riens charmants du quotidien qui sont là pour les rassurer. Les produits cosmétiques Axe prennent la parole sur la confiance en soi pour draguer (T’assures, tu Gold, avec Bigflo & Oli). Et Diesel met ses jeans en scène dans des rendez-vous galants… ratés (Made to Run Away).
7. No fake proof
La crainte du fake pousse les jeunes à rechercher des marqueurs de vérité. Ce contexte entraîne les marques à montrer l’envers du décor, avec des incarnations réelles en situation. Par exemple l’animateur Camille Combal faisant découvrir Coca Zéro en caméra cachée dans un taxi, ou Adidas dévoilant la vie quotidienne du mannequin Karlie Kloss en dehors des studios photo.
8. Gaming Xperience
L’expérience vécue est tout aussi importante que le produit acheté. La gamification est un nouveau standard de pop culture que les marques se sont approprié. Par exemple, la griffe Supreme organise régulièrement des chasses au trésor urbaines pour dénicher le lieu où seront vendues ses prochaines pièces.
La mise en situation In Real Life du produit est un autre registre d’expérience. Samsung donne ainsi aux parents le Galaxy A8 de leurs enfants pour démontrer l’efficacité de la fonction « Private ». Heineken organise des face-à-face de personnes que tout oppose, qui finissent par sympathiser autour d’une bière (Open Your World).
9. Alter-ego empathy
Enfin, certaines problématiques sociétales touchent particulièrement la Gen Z : l’acception des différences, l’harmonie intergénérationnelle, la condition animale, le green… La peur d’être exclus les pousse à cultiver l’entraide et la solidarité. Pour les marques, cette option doit être activée avec justesse, au risque de passer pour un fake. Amazon fait parler une jeune utilisatrice à son assistant personnel Alexa pour dire à ses parents qu’elle aime les filles. Diesel met en scène la « Ha(u)te Couture » en montrant des jeunes gens harcelés, mais qui restent fiers de ce qu’ils sont. Nike prend la parole pour inciter à croire en ses rêves, pour les 30 ans de son Just do it.
Test ou crash-test ?
Vous cochez entre 7 et 9 insights : bravo ! vous êtes un as de la Gen Z. Mais attention, ne lambinez pas sur vos acquis, car tout bouge très vite !
Vous cochez entre 4 et 6 insights : vous avez de bonnes bases, mais ça ne suffit pas ! Avec les 15-25 ans, c’est tout ou rien. Vous pouvez améliorer vos contenus avec un bon outil de veille.
Vous cochez 3 insights ou moins : vous êtes sûrs que vous voulez vous adresser aux 15-25 ans ? En tout cas, vous êtes loin du compte. Mais ne désespérez pas, une bonne étude marketing peut vous aider à repartir sur de bonnes bases.
Jean-Emmanuel Cortade de la Saussay
est fondateur de Story Mind, l’agence d’études marketing spécialisée sur les contenus de média, de marque et de pop culture. Son métier ? Identifier et tester les bons insights pour l’éditorial, la communication et le planning stratégique. Sa devise ? Bien raconter son époque, c’est d’abord la comprendre. Sa culture ? L’anthropologie, car c’est dans le non-dit des comportements que se niche le sens des émotions et l’efficacité des messages.