À quelques mois des JO de Paris 2024, Valérie Pécresse réclame un « choc de décentralisation »
Depuis l'attribution officielle des prochains Jeux Olympiques d'été à la ville de Paris, la présidente LR de la région Ile-de-France, Valérie Pécresse, n'a eu de cesse d'alerter sur le manque de ressources financières pour garantir le bon fonctionnement des transports pendant les JO 2024. Un cheval de bataille qui lui permettrait de mieux capter les compétences de l'État en matière de transport au profit de sa région et de profiter de l’accélérateur d’innovation sans équivalence que représente un tel évènement pour les acteurs de la mobilité.
À moins d’un an du début des Jeux Olympiques de Paris 2024, la préparation des pouvoirs publics pour garantir la mobilité des franciliens et des nombreux touristes qui afflueront pour l’évènement continuent de poser question. David Belliard, adjoint EELV à la maire de Paris en charge des transports et de l’espace public estimait vendredi dernier que les prochains JO d’été n’avaient pas vocation à « entraver la vie quotidienne des Parisiens ». Pour d’autres, la grand-messe du sport mondial aura même servi « de coup de projecteur de grande ampleur sur ce qu’il reste à faire » en terme de mobilité urbaine, concède l’adjoint à la Mairie de Paris en charge du sport, Pierre Rabadan. Et d’ajouter : « même si dans une ville patrimoniale comme Paris, ça n’est pas simple [de faire évoluer les choses, NDLR] ».
Il faut reconnaitre que les chiffres avancés par les autorités compétentes ont suffisamment de poids pour nourrir une certaine défiance collective. Au moment des Jeux, l’accessibilité du réseau métro sur le territoire parisien, qui comprend les stations, les gares et les lignes elles-mêmes, devrait par exemple grimper de 9 à 14 % selon la RATP.
L’IDFM – Ile-De-France Mobilités – annonce déjà qu’elle devra transporter 7 millions de voyageurs pendant les deux semaines des Jeux Olympiques – organisés du 26 juillet au 11 août 2024 – et 3 millions pendant les paralympiques – qui se tiennent du 28 août au 8 septembre –, avec une moyenne de 500 000 personnes par jour.
La reconquête de l’espace urbain
À ces 500 000 spectateurs, il faut ajouter plus de 250 000 « officiels » que sont les athlètes, le personnel technique ou encore les journalistes et les membres des Comités olympiques. IDFM s’attend donc naturellement à des pics de flux dans les transports en commun. Aux abords des sites, comme à Saint-Denis avec 60 000 personnes par heure, ou au château de Versailles avec 10 000 personnes par heure. Pour ne pas laisser tout ce beau monde en rade sur les quais de nos gares, l’IDFM prévoit d’augmenter son offre ferrée de 15 %.
Enfin, il a été confirmé qu’il n’y aurait pas de travaux sur l’ensemble du réseau de la SNCF et de la RATP du 8 juillet au 8 août 2024. Une grande tradition estivale que nos visiteurs auront la chance d’éviter. Dix millions d’euros seront également investis dans la vidéo-protection des gares desservant les sites. L’établissement public souhaite que l’État adopte également des mesures législatives : autorisation des caméras piétons par les agents de sécurité privée, utilisation de l’intelligence artificielle…
Une région sur le pied de guerre…
Un défi de taille qui ne semble en aucun cas affoler Valérie Pécresse. Dès l’annonce de l’attribution des Jeux Olympiques en 2017, celle qui occupe aussi le poste de présidente de l’IDFM – de quoi donner du poids à ses complaintes – s’était déclarée « heureuse que la France montre un visage moderne, une image de progrès, d’ouverture sur le monde » et consciente que « la Région était un partenaire indispensable » pour garantir le succès de cet évènement hors norme… si tant est que nous prenions le temps « d’améliorer ses transports en commun ». Pas plus tard qu’en février dernier, elle interpellait directement le ministre des Transports Clément Beaune sur le déficit de ressources financières pour garantir le bon fonctionnement des transports pendant les Jeux Olympiques et réclamait des engagements de l’État.
« Nous avons la charge d’élaborer le ‘plan de transport’ qui permettra le bon déroulement des transports pendant les Jeux olympiques et paralympiques ». Pour qu’il tienne réellement la route, « nous avons besoin de ressources pour financer à la fois l’exploitation des lignes nouvelles de métro et de RER, et les transports des Jeux olympiques et paralympiques ». L’autorité demandait donc à l’État des ressources à hauteur de 600 millions d’euros, soit 200 millions pour l’offre de transport supplémentaire liée aux JO et 400 millions pour l’exploitation des nouvelles lignes – extension du RER E, de la ligne 14 et pré-exploitation des lignes du Grand Paris Express –. « Vous ne pouvez pas d’un côté nous dire qu’il est urgent de prendre votre relève, arguant que les Jeux olympiques et paralympiques démarrent dans 18 mois, et de l’autre surseoir encore et toujours au règlement des questions financières », reconnaissait alors Valérie Pécresse.-
… qui ne cache pas son ambition
Ce mercredi 12 septembre, elle lançait définitivement son offensive en publiant un rapport intitulé « Saisine de l’État pour un choc de décentralisation en Île-de-France » qui sera débattu devant les 209 élus du Conseil régional d’Île-de-France lors d’une séance plénière organisée le 20 septembre prochain. L’ancienne Ministre du Budget, des Comptes publics et de la Réforme de l’État espère pouvoir mettre la main sur les compétences de l’État en matière de transport – qui dépendent actuellement de RATP Infrastructures, filiale de la régie publique de transport – pour mieux doter sa région. Elle souhaite également étendre les pouvoirs de l’IDFM à la route avec l’objectif de créer des voies réservées pour covoitureurs et la transformation de bandes d’arrêt d’urgence pour des lignes de cars.
De sacrés chantiers que Valérie Pécresse estime pouvoir financer en ayant la main à la fois sur la fiscalité des entreprises et sur la tarification sociale – notamment sur les offres de transport accordées aux plus modestes –. Le tout en bénéficiant d’une plus grande autonomie fiscale concernant le « versement mobilité » – qui est à l’heure actuelle la principale recette de l’IDFM –.
Un gouvernement et des groupes d’opposition à convaincre
Et tant pis si toutes ces propositions agacent la Macronie et l’opposition. Ces derniers mois, Clément Beaune n’hésitait pas pointer du doigt à de multiples reprises la gestion financière orchestrée par Valérie Pécresse, à commencer par la hausse du prix du pass Navigo. Autre point noir qui pourrait compliquer la bonne gestion de l’offre de transport lors de l’évènement : ses relations houleuses avec Jean Castex qu’elle auditionnait récemment.
Les élus socialistes et écologistes déplorent quant à eux une « méthode inadaptée », un « calendrier précipité » et surtout un manque de concertation évident avec les acteurs locaux institutionnels. Les élus macronistes restent globalement plus tempérés et se déclarent ouverts à « un examen au cas par cas des propositions de décentralisation ». Pour autant, Valérie Pécresse peut compter sur le soutien des élus UDI ainsi que sur son président de groupe corapporteur du texte, Jean-Francois Vigier.
L’importance de prendre le train en marche
Quand on sait l’accélérateur d’innovation sans équivalence que représente un tel évènement pour les acteurs de la mobilité, on comprend mieux son acharnement à faire connaitre sa cause. Pour Stéphane Aubry, responsable de l’accès aux sites et des transports publics de Paris2024, « toutes les innovations seront les bienvenues et je pense que les Jeux seront une formidable occasion d’expérimenter grandeur nature ce qui fonctionne ou pas, tout en s’appuyant sur les solutions existantes ». Côté ADP, les Jeux d’été serviront de tremplin pour bâtir l’aéroport du futur.
« Des innovations telles que la pre-bording ou checking, le scanner 3D pour les bagages à Orly ou bien encore le déploiement des sas PARAFE aux frontières y seront testées», précisait récemment Edward Arkwright, directeur général exécutif d’ADP. L’innovation passera également par la décarbonation des aéroports, raison pour laquelle le groupe expérimente plusieurs alternatives, telles que le taxi volant Volocopter. Si Valérie Pécresse ne vous l’a pas encore fait comprendre, il y aura bel et bien un avant et un après les prochains JO pour les habitants de la région Ile de France.
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