Dans un jugement rendu public jeudi 17 avril 2025, la juge fédérale américaine Leonie Brinkema a estimé que Google avait monopolisé le marché de la publicité sur internet, estimant que le géant américain des technologies avait « sciemment entrepris une série d’actions anticoncurrentielles » et avait causé des « dommages importants » à ses clients. Le groupe a également «assuré son monopole en imposant des politiques anticoncurrentielles à ses clients et en éliminant des caractéristiques favorables de certains produits». Par ailleurs, selon la juge, les acquisitions de sociétés spécialisées dans les technologies publicitaires telles que DoubleClick n’étaient pas illégales, mais la façon dont Google les a ensuite utilisées constitue une infraction au droit de la concurrence.
Sur les outils publicitaires numériques, l’administration de Joe Biden avait assigné Google en janvier 2023 devant un tribunal fédéral de Virginie (Est des États-Unis), réclamant que le groupe soit contraint de céder des actifs.
Google va faire appel
Google a annoncé son intention de faire appel, affirmant n’avoir perdu qu’une partie du procès. Dans une déclaration transmise à l’AFP, Lee-Anne Mulholland, vice-présidente du groupe, a souligné que « le tribunal a estimé que nos outils publicitaires et nos acquisitions, telles que DoubleClick, ne nuisent pas à la concurrence ». Elle a également indiqué « Nous avons remporté la moitié de cette affaire et nous allons faire appel concernant l’autre moitié ».
Ce recours pourrait faire durer la procédure pendant plusieurs années, et même atteindre la Cour suprême. « L’ampleur des retombées dépendra des recours juridiques utilisés et le calendrier de mise en œuvre s’étalera probablement sur des années si Google perd ses appels anticipés », a commenté pour l’AFP Evelyn Mitchell-Wolf, analyste principale chez Emarketer.
En attendant, la juge Brinkema a donné une semaine aux parties pour proposer un calendrier visant à déterminer les « remèdes » à mettre en œuvre. Elle prononcera ensuite la peine. Mais l’issue du dossier pourrait au final être déterminée par la nouvelle administration. Le président Donald Trump avait en effet laissé entendre en octobre qu’il n’était pas favorable au démantèlement de Google, qui pénaliserait les États-Unis sur la scène internationale.
« Google a un triple monopole »
Le gouvernement américain avait accusé notamment Google de contrôler le marché des bannières publicitaires sur les sites web, y compris ceux de nombreux médias, et d’en profiter pour pratiquer des prix artificiellement élevés et un partage des revenus inéquitable.
Selon l’accusation, le groupe s’appuyait sur trois logiciels de gestion de la publicité considérés comme incontournables par la majorité des sites internet. « Google a un triple monopole », avait fait valoir le représentant du ministère de la Justice, Aaron Teitelbaum, en audience. La défense avait affirmé que l’affaire était basée sur une version dépassée d’internet, ignorant le contexte actuel, où les publicités sont aussi placées dans les résultats de recherche, les applications mobiles et les réseaux sociaux.
Après des années d’enquêtes et de plaintes contre les entreprises technologiques et leurs monopoles, Google est la première entreprise à faire face à d’éventuelles conséquences.
Dans le dossier sur la recherche en ligne, les autorités de la concurrence avaient porté plainte en 2020, et le jury d’un tribunal fédéral de Washington a déclaré Google coupable l’année dernière d’abus de position dominante. La peine n’a pas encore été décidée, mais le parquet réclame la séparation avec le navigateur Chrome et l’interdiction de contrats avec les fabricants de smartphones pour installer son moteur de recherche par défaut sur leurs appareils.
D’autres géants du numérique sont également visés. Le procès contre Meta, maison mère de Facebook et Instagram, a débuté lundi à Washington. Le groupe est accusé d’avoir acquis Instagram et WhatsApp il y a plus de dix ans pour neutraliser des concurrents potentiels.
En Bourse, l’annonce a eu un effet immédiat : l’action d’Alphabet, maison mère de Google, a perdu 1,38 % à la clôture du 17 avril à New York.