Change, en partenariat avec BVA, a dévoilé au début du mois les fruits de son étude intitulé « benevolence index ». Une manière pour l’agence parisienne d’épingler les enseignes récalcitrantes et hypocrites tout en encourageant les marques méritantes. « La vertu trouve toujours sa récompense ».
Pour la 3ème année de suite, Change dévoile, en partenariat avec BVA, les résultats de l’étude « Benevolence Index ». Celle ci évaluait la perception d’utilité des marques et de la responsabilité des entreprises, indiquant in fine comment améliorer la perception de la benevolence et ses enjeux pour les marques en quête de levier de préférence. L’Index repose sur deux questions principales : l’utilité de la marque et la responsabilité des entreprises. Plus une marque est benevolente, plus le consommateur va la préférer. « L’Index démontre qu’il existe une corrélation entre benevolence et préférence. Gagner des points de benevolence, c’est gagner des points de préférence auprès du consommateur », analyse Thibaut Ferrali, vice-président en charge de la stratégie et de la RSE de l’agence Change. Encore faut il être synchro sur le sens qu’on y porte.
Dixit le site internet de l’agence : « la benevolence se définit par la capacité des marques à être en même temps, utiles, responsables et respectueuses de la vie des gens. En cela, elle est aussi une formidable solution de transformation de l’expérience client. La Benevolence a un pouvoir de réconciliation unique entre les gens et les marques qui sont de plus en plus challengées ». Mais attention aux simples effets d’annonce : on est loin de la cosmetic marketing ou de l’ethical washing, ce positionnement traduit une transformation réelle, profonde de l’entreprise. Comme souvent, il existe deux catégories de marques benevolentes. Celles qui le font sincèrement, et qui réussiront, et celles qui l’adoptent de façon opportuniste. Ces dernières prennent le risque d’être rapidement désavouées du fait de leur non-sincérité et donc d’être très rapidement décodées. La où la RSE promettait l’affection des clients vis à vis des marques qui la pratiquent, la bénévolence promet un amour plus profond… et surement plus rentable.
La benevolence vue par …
« La benevolence, c’est la capacité des marques à être empathiques dans le quotidien des consommateurs, au-delà des grandes déclarations, ce sont des actes en plus des mots », Patrick Mercier, président fondateur de Change.
« La benevolence est un mot médiéval français qui réémerge. C’est être vigilant à l’autre et au monde. Elle a une finalité extérieure à soi-même », Patrick Tudoret, écrivain.
« C’est générer une forme de bien-être dans l’entreprise », Pascal Demurger, président directeur général du groupe MAIF.
« La benevolence, c’est aussi prendre en compte la diversité de la société et avancer sans oublier personne », Dominique Schelcher, directeur de Système U.
« La benevolence repose sur quatre piliers : exigence, sens, action et sincérité », Michel Mathieu, directeur général de la LCL.
« C’est la capacité à se sentir bien au sein de l’entreprise : est-ce que je crois à mon entreprise, est-ce que je m’y sens bien ? », Romain Ferrari, CEO CSR.
« La benevolence, c’est aussi l’utilité. Une entreprise doit être utile », Alain Weill, président directeur général de SFR.
« Tout tient dans la cohérence. Quand on a de la cohérence, pas de problème de transparence, pas de problème de benevolence », Frédéric Mazzella, président de Blablacar.
À chaque indicateur sa méthode
Le « Benevolence Index » fournit un score unique à chaque marque qu’il décrypte. Il a permis l’identification de 4 grandes segments correspondant à quatre niveaux de benevolence.
Les marques benevolentes, qui témoignent d’un score au-delà de 60. Elles sont perçues comme déjà fortement engagées sur les dimensions d’utilité et de responsabilité. Elles disposent d’une crédibilité et d’un désir d’engagement fort à valoriser pour aller plus loin dans leur démarche. Exemples : Bonduelle, la Maif, Intermarché, Ikea, Blédina, Décathlon, Boiron, Yves Rocher…
Les marques favorables, au score entre 50 et 60. Elles ont une démarche très lisible sur les deux dimensions d’utilité et de responsabilité mais soit celle-ci est mal perçue, soit elle est critiquée par le consommateur, ce qui rend leur engagement plus long à faire émerger. Exemples : Danone, Andros, Fleury Michon, Toyota, Crédit Agricole, Nana, Fnac, Dove…
Les marques hésitantes, au score entre 40 et 50. Elles présentent des points faibles soit sur l’une des dimensions d’utilité ou de responsabilité, soit sur un public en particulier. Exemples : Kellog’s, Vico, Axa, Boursorama, Oasis, Franprix, Gillette, Mc Donald’s, Sephora, Dop, Sosh, SNCF…
Les marques réfractaires, au score en dessous de 40. Elles ont construit leur modèle sur d’autres items comme l’humour, le low-cost, le challenge, le leadership … Exemples : M&M’s, Monabanq, Coca-Cola, Burger King, SFR, Uber, EasyJet…
David Garbous, directeur de la stratégie marketing de Fleury Michon résume « Il va y avoir des choix très importants à faire : il faudra raconter toute l’histoire et pas seulement que ce qui nous arrange. Fleury Michon a travaillé sur sa raison d’être « aider les hommes à mieux se nourrir chaque jour » : afficher l’origine des viandes, faire du jambon zéro nitrite, produire des barquettes en bois pour les produits cuisinés ». Jean-Luc Chetrit, président de l’Union des marques conclut : « La benevolence, ce n’est pas juste un sujet de communication, c’est un réel moyen de construire une marque durable ».
À chaque époque sa vertu
Un engagement total … beaucoup plus facile à mettre en place dans des organisations à taille humaine, là ou les marques plus installées sont bâties sur des process inamovibles, trop encrées dans leur ADN. Un goût non dissimulé pour les marques en devenir, donc, que Patrick Mercier développe depuis longtemps. En 2003, il fondait avec Jean-Pierre Mialon une agence nommée judicieusement Challenger House. Il présentait leur démarche en ces mots : « Dans la plupart des agences, travailler pour une marque challenger n’est pas vécu comme quelque chose d’enthousiasmant. A l’inverse, nous pensons qu’imaginer un marketing et une communication pour les challengers offre une latitude plus large, qu’il est plus facile de mettre en place une stratégie audacieuse. Ils se caractérisent plus par leur posture mentale que par le montant de leurs investissements marketing. Elles se doivent d’adopter notre « challenger spirit », qui se compose de sept valeurs à proportions variables : la rébellion, l’audace, l’opportunisme, la ténacité, l’ambition, l’anticipation et la rapidité ». Une citation qui remonte à presque 20 ans -comme quoi les anglicismes ont la peau dure- et qui témoigne d’un repositionnement stratégique de Patrick Mercier et consors. Au discours « de l’audace, toujours de l’audace » d’autrefois, vient s’ajouter une certaine prise de recul, une dimension critique. Epoque oblige. De l’audace, oui, mais plus à n’importe quel prix.