7 décembre 2016

Temps de lecture : 2 min

Le transculturel, une ressource à valeur ajoutée pour les marques

Cultiver l’ambiguïté des codes esthétiques et créer des passerelles entre les cultures pour faire émerger une troisième esthétique, c’est la singularité du designer Serge Mouangue, fondateur de Yo Sens et Wafrica et ex-directeur de la stratégie de marque du groupe Renault.

Cultiver l’ambiguïté des codes esthétiques et créer des passerelles entre les cultures pour faire émerger une troisième esthétique, c’est la singularité du designer Serge Mouangue, fondateur de Yo Sens et Wafrica et ex-directeur de la stratégie de marque du groupe Renault.

Plus qu’un enfant de la mondialisation, il en est une figure iconique et signifiante : né à Yaounde au Cameroun, le designer Serge Mouangue a grandi en France, travaillé en Australie avant de s’installer au Japon il y a cinq ans. En homme de son siècle, le designer a fait du transculturel sa marque de fabrique et une ressource stratégique pour les marques. Dans le monde fini et interconnecté qui est le nôtre, l’exploration, la découverte, la création ne naissent plus de l’altérité, mais du mélange des cultures, de la circulation et réappropriation des codes culturels. Le travail de Serge Mouangue, qui fait dialoguer l’Afrique Noire avec le Japon, témoigne de cette « troisième esthétique » qu’il présentera lors d’une keynote au Cristal festival le 15 décembre prochain.

IN : pouvez-vous nous expliquer le concept de « troisième esthétique », qui est au cœur de votre travail de designer ?

Serge Mouangue : la « troisième esthétique » n’est pas un « concept » mais plutôt une façon de faire les choses. La manière dont je l’aborde est de trouver un point de tension entre deux cultures à l’esthétique très distincte pour illustrer une narration nouvelle, dans l’art, le produit, le service, l’architecture ou la performance vivante. Cela encapsule une expression, un état, une troisième piste ambiguë mais évidente qui crée un nouveau territoire de valeur.

Cette valeur est naturellement élevée car elle née de l’authenticité des deux autres pour en amplifier la crédibilité. Je me suis appuyé sur cette démarche pour travailler autour du « kimono japonais » ou bien encore pour réaliser les sculptures « The Blood Brother ». Wafrica aura bientôt dix ans d’existence avec zéro euro de dépense en communication. Les sculptures « the Blood Brothers » exposés à New York au Museum d’Art et de Design y ont été estimées en 2011. J’ai interrompu la vente à 420 000 dollars.

IN : plus que multiculturelle, votre démarche est transculturelle : comment s’applique-t-elle à une marque comme Renault pour laquelle vous avez travaillé pendant 15 ans ?

SM : j’ai en effet travaillé ce concept pendant longtemps chez Renault, d’abord en tant que directeur de la stratégie de marque, puis en charge de l’innovation pour Nissan au Japon, avant de fonder ma société de conseil en stratégie de marque et design Yo Sens. La compréhension profonde des mécanismes transculturels est stratégique lorsqu’on veut se développer sur des marchés étrangers émergents.

Comment transformer et traduire les valeurs culturelles d’un pays sous la forme d’un produit ? Si je prends l’exemple du marché indien, on ne se positionne pas en disant que l’on fait un véhicule pour l’Inde, ce qui serait peu valorisant du point de vue de l’acheteur – qui a envie d’acheter la voiture la moins chère ? –, mais en fabriquant un véhicule moderne qui intègre des valeurs et des facteurs culturels indiens. En Inde, par exemple, la tradition veut que chaque voiture soit baptisée et protégée en apposant un petit dieu sur la planche du tableau de bord. Nous avons donc pensé en amont un espace qui puisse accueillir cet élément culturel.

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