16 janvier 2025

Temps de lecture : 4 min

Thomas Barret (Havas Paris) : « Le tone of voice est encore plus puissant dans le BtoB que dans le BtoC »

Le tone of voice, c’est la manière dont une marque s’exprime auprès de ses cibles pour diffuser ses messages, ses valeurs et engager la conversation. Longtemps ignorée par les entreprises, elle représente pourtant un axe important de la communication des entreprises. Thomas Barret, directeur associé à Havas Paris, vient de co-écrire une étude à ce sujet. Instructif...

ETUDE

INfluencia : Pourquoi avez-vous décidé de faire cette enquête sur le « tone-of-voice » dans la com ?

Thomas Barret : Cette étude est la conséquence de notre frustration de communiquant qui aime les mots et le travail autour du langage. La publicité a toujours su préempter le tone of voice et rester dans l’émotion alors que les autres acteurs de la communication ont été contraints d’imaginer des discours uniformes et plutôt ennuyants. Le tone of voice a toujours été un sujet négligé dans les entreprises. Quand il est traité, il donne lieu à la création d’un texte qui est une compilation de termes à employer. Cette charte est ensuite rangée dans un placard où elle prend la poussière car ce document n’est pas un outil d’inspiration mais un outil de régulation. C’est pour cela que nous avons décidé de faire cette étude.

IN : Quelle méthodologie avez-vous suivi ?

T. B. : L’étude a été réalisée en partenariat avec l’institut Selvitys et menée en ligne sur deux échantillons distincts. Pour le volet B2B, 300 décideurs (CEO, directeurs ou managers d’entreprises de plus de 50 salariés), ayant une responsabilité décisionnelle dans le choix de prestataires ont été interrogés. Pour le B2C, nous avons questionné 1000 personnes âgées de 18 à 64 ans représentatives de la population française. Les répondants ont été exposés de manière aléatoire à des pages d’accueil de sites internet et des publications de réseaux sociaux (LinkedIn, Instagram) de marques fictives, employant chacun des tone of voice différents. Dans chaque secteur, il a été testé deux tone of voice différents : un neutre et un autre porteur d’une personnalité plus affirmée. Les secteurs ont été choisis afin de refléter une diversité de situations. Les marques testées sont fictives afin de limiter le biais lié à une image de marque déjà installée. A la suite de chaque exposition, une série de questions a été posée à chaque échantillon afin d’évaluer la perception de la personnalité de la marque, l’envie d’en savoir plus sur elle ou encore la capacité de la publication à générer de la préférence de marque et de l’engagement. Ces éléments ont été évalués sur une échelle de 1 à 7 et seules les notes maximales (6 et 7) ont été retenues pour valider les indicateurs. 

IN : Quels sont les principaux enseignements de votre enquête ?

T. B. : Nous avons été surpris de constater que le tone of voice était encore plus puissant dans le BtoB que dans le BtoC.

IN : Comment expliquez-vous cela ?

T. B. : Le BtoC s’est emparé du tone of voice il y a quelque temps déjà, créant, peut-être, une forme d’habitude qui n’existe pas encore dans le BtoB. Beaucoup de gens oublient également de réaliser que les chefs d’entreprise sont des êtres humains comme les autres et que les décisions qu’ils prennent peuvent avoir des impacts sur leur carrière et sur leur image. Il existe donc une grosse dimension émotionnelle dans le BtoB et cela explique peut-être l’importance du tone of voice.

IN : Cette importance touche-t-elle toutes les entreprises, et ce quel que soit leur domaine d’activité.

T. B. : Et c’est là un autre enseignement important de cette étude. Quel que soit l’indicateur retenu, l’impact d’un tone of voice plus singulier est absolument majeur dans le BtoB. L’engagement augmente de 43%. La préférence, de 39%. La désirabilité, de 52% ! Et les résultats nous montrent, sans aucun doute possible, que la personnalité de marque est le driver clé de cette performance. Et en plus, c’est sans risques. Car l’expression d’une plus forte personnalité a un impact systématiquement positif. Et ce quel que soit le secteur ou le segment de décideurs testé. Cet impact est encore plus marqué auprès de la prochaine génération de leaders (25-44 ans). L’analyse des mots clés associés par les décideurs aux différents tones of voice montre qu’une expression plus singulière et plus décalée ne nuit pas à la perception de fiabilité, d’expertise et de professionnalisme. Au contraire, elle l’enrichit. En revanche, les items comme classique et sérieux en prennent un coup ! 

IN : Ce constat est le même dans le BtoC ?

T. B. : Oui. Certaines marques BtoC comme Vattenfall ont compris très tôt le levier de communication que représente une personnalité forte et singulière. Aujourd’hui, nous sommes enfin en mesure d’évaluer cet impact. Quel que soit l’indicateur retenu, les chiffres sont éloquents : +43% d’engagement, +52% en matière de désirabilité, +39% en matière de préférence. Notre étude révèle également que le tone of voice est un levier de recrutement particulièrement efficace. En effet, son impact est fort auprès des jeunes générations (+45% sur les 18-34), c’est-à-dire les consommateurs de demain. Une cible souvent stratégique pour les marques. 

IN : En plus de l’engagement, de la désirabilité et de la préférence, vous avez aussi tenté de mesurer le score de performance du caractère de marque (SPCM) et l’indice de performance du caractère de marque (IPCM). Quels sont les résultats obtenus ?

T. B. : Concernant le SPCM qui mesure l’impact du tone of voice sur la performance de manière globale en s’appuyant sur la moyenne de différents indicateurs, nous avons constaté que le tone of voice améliore de 45% la performance globale de communication. Et quand la personnalité augmente d’1 point, la performance du Caractère de Marque (IPCM), qui indique la corrélation entre la personnalité de marque et la performance de la communication, progresse de 0,75 point. 

IN : Les entreprises commencent-elles à réaliser l’importance du tone of voice pour leur communication ?

T. B. : Oui et c’est très enthousiasmant. Beaucoup de clients ont pris conscience de l’importance de ce sujet. Certains ont besoin d’un élément déclencheur pour mettre ce dossier au-dessus de la pile de leurs priorités et nous espérons que notre étude aura cet impact. Depuis sa publication il y a quelques jours, nous avons bouclé une dizaine de rendez-vous avec des entreprises avec lesquelles nous n’avions pas l’habitude de travailler. C’est très encourageant.

Allez plus loin avec Influencia

the good newsletter

LES FORMATIONS INFLUENCIA

les abonnements Influencia