En tant que Directeur de Création, quel est ton parti pris vis-à-vis des enjeux sociaux, écologiques et sociétaux ?
C’est déjà en tant qu’être humain que je me sens touché par ces sujets.
Je suis de près la montée de l’enjeu social en France sur des sujets comme la précarité énergétique et alimentaire, la fracture numérique… Je constate avec enthousiasme l’investissement de la génération 15/25 ans sur les questions d’inclusivité, qu’elle soit religieuse, éthnique ou sexuelle. Les choses avancent vraiment dans le bon sens ! Je suis en revanche plus inquiet par la stabilité démocratique de l’Europe : je crains que la crise énergétique actuelle ne nous divise encore plus. Enfin, pour ce qui est de l’écologie, je n’invente rien en disant qu’on court à la catastrophe mais je crois aussi en notre capacité de sursaut collectif.
Dans ce contexte, notre mission d’agence de communication est de rendre sexy de nouveaux comportements plus vertueux, et vite. Les Directeurs de Création ont, à mes yeux, une double responsabilité : refléter créativement le monde dans lequel on vit et donner envie aux annonceurs d’avancer dans le bon sens. Celui de l’éthique et un peu moins celui du profit à tout prix.
Nous aimons stimuler les trajectoires People-Planet-Profit. On se doit aussi de créer les nouveaux imaginaires de demain pour faire bouger les mentalités. On se doit de faire rêver à d’autres choses : le vivre ensemble, la reconnection au vivant, l’habitat vertical créateur de lien (pour Sergic), la préférence des circuits courts (pour O’tera), plus de végétal dans les assiettes (pour Bonduelle), la fierté de prendre les transports en commun (pour Ilévia)… Il y a du taf ! Beaucoup de choses à changer dans les consciences collectives et, en tant que “communicants”, nous avons notre rôle à jouer.
D’après toi, comment l’art, le graphisme, la créativité peuvent être vecteurs de l’engagement RSE des entreprises ?
Il y a toujours eu un lien étroit entre le monde économique et celui des arts. Les marques adoptent depuis toujours les codes artistiques et culturels de leur époque. Parce que créativité et arts sont de très bons vecteurs de génération de profits pour les annonceurs. Et, jusqu’à il y a peu, la créativité servait principalement à rendre désirable, à faire beau. On voit désormais qu’elle peut servir aussi le bien commun. Attention, il ne faut pas être dupe : une entreprise, c’est avant tout une histoire d’hommes et de volonté. Tout le monde ne s’appelle pas Yvon Chouinard (fondateur de Patagonia). Mais globalement et dans le contexte actuel, les annonceurs commencent à se responsabiliser et chaque petit pas compte.
Chez Nikita, nous refusons 15% des projets entrants car trop “business as usual”. Nous privilégions les projets d’entreprises lucides et responsables que nous stimulons et guidons vers la logique d’entreprise contributive. Nous avons fait partie de la société de consommation, nous faisons aujourd’hui partie de la société de transformation.
Exemple concret : nous accompagnons CEDEO, fournisseur de matériel pour les plombiers et chauffagistes, dans le lancement de 19°C, la première école française dédiée aux experts du génie climatique. Une école engagée dans les enjeux d’efficacité énergétique !
Ce qui change profondément avec une agence comme Nikita, c’est que l’engagement responsable et durable fait partie intégrante de son ADN et sa Raison d’Être
Être dans une agence qui avance dans une démarche responsable et durable, comme Nikita, rend-il le métier de Directeur Créatif différent de tes autres expériences ?
Je n’ai jamais pensé que le métier de DC sauverait le monde à coup de grandes productions et de messages top down. Je me suis toujours senti responsable de ne pas faire avaler bêtement des couleuvres à nos cibles.
Depuis presque 15 ans, je cherche à engager la conversation avec les communautés en concevant des campagnes à la croisée du digital, de l’événementiel et des réseaux sociaux. Ce qui change profondément avec une agence comme Nikita, c’est que l’engagement responsable et durable fait partie intégrante de son ADN et sa Raison d’Être. Nous sommes une entreprise engagée dans une certification BCorp et nous nous devons d’aligner le discours et les actes. On s’applique, chez Nikita, à peser éthiquement l’ensemble de nos choix créatifs. Ça peut paraître contraignant au premier abord mais, ça offre aussi un cadre à la création, un terrain de jeu. Et qui dit jeu, dit plaisir.
Penses-tu que l’art et la culture peuvent être un levier de performance pour les marques dans une stratégie RSE ?
Bien évidemment. Et j’ai envie de dire “plus que jamais”. L’art et la culture ont pour but de rassembler, d’ouvrir les esprits, de se projeter dans de nouveaux imaginaires, de nouveaux possibles. Être dans une démarche RSE, c’est être responsable de notre avenir collectif. Je ne crois pas à un avenir sans art ni culture. Sans cela, on ne rêve plus, les liens sociaux, éthiques et écologiques se meurent. La crise sanitaire a très bien souligné notre besoin vital de culture, notre besoin de rêver à d’autres alternatives de vie et, par extension, de consommation. Il n’y a pas de possibilité de changement sans créativité, sans nouvelles idées.
Est-ce les nouveaux modèles techniques tels que l’éco-conception challengent la création artistique ?
Je pense que le cadre posé par l’éco-conception nous fait revenir aux fondamentaux de notre métier.
Un ancien DC me disait toujours : si tu ne sais pas expliquer ton idée en une phrase courte alors elle ne mérite pas que l’on s’y intéresse. Il faut aussi avoir en tête la définition du métier de designer : formuler des réponses simples et intelligibles à des questions et problématiques souvent complexes. Pour y arriver, il ne faut garder que l’essentiel du propos, être économe dans les moyens, mais pas dans la conception, pas dans la richesse de l’idée.
Ces nouvelles contraintes, je les vois comme un retour aux basiques, à ce qui est vraiment utile, un nouveau cadre de jeu. C’est une bonne nouvelle pour les amateurs d’idées pures, de Big and Bold, pour ceux qui, en face, cherchent l’information rapidement. Il ne faut pas oublier que le temps d’attention moyen en ligne est de 8 secondes. Alors mieux vaut savoir faire passer son message rapidement. Le challenge il est là et, au fond, il l’a toujours été.
Peux-tu partager un coup de cœur hors Nikita ?
Un bel exemple créatif :
Greenpeace x GTA V “LosSantos +3°C”
Comment sensibiliser la communauté GTA aux effets du réchauffement climatique ? En les faisant vivre dans le jeu.
A découvrir ici
Avec 15 ans d’expérience dans le monde de la création et de la communication, Thibault a intégré Nikita début 2022. Il accompagne une équipe de 16 créatif.ves.