Trépidant, instantané, rapide, accéléré, réclamant de gérer en permanence une quantité croissance d’information, le monde de l’ultraconnexion peut être fascinant mais également fatigant. Déjà émergent dans notre vie connectée existent des applications pour vous déconnecter. Décryptage par la PQR 66 dans son dernier rapport « Françaises, Français », baptisé (R)évolutions.
Votre amoureux ne cesse de consulter les résultats de la 24ème journée de ligue 1 le soir où vous l’avez invité à dîner pour fêter la Saint Valentin ? Téléchargez et envoyez lui I Off You, une application qui déconnectera son portable à l’heure et pour la durée que vous voudrez. A Harvard, un jeune étudiant a créé et installé dans la bibliothèque de l’Université un « Wifi Cold Spot » un caisson d’isolement complètement inaccessible aux ondes de toutes sortes. Addicts aux emails et aux réseaux sociaux peuvent s’y ressourcer. A l’intérieur, des petites lumières suggérant une nuit étoilée s’allument, un cadre propice à la détente, à la mise entre parenthèse de sa vie digitale et au relâchement de la pression numérique.
En France, au moment où les accès WIFI sont en plein essor dans tous les lieux publics, des chercheurs de l’Institut Polytechnique de Grenoble viennent d’inventer le papier peint déconnecté, dont la composition en particules d’argent permet de bloquer les ondes électromagnétiques. Initialement, l’invention visait à empêcher les connexions pirates des voisins à d’autres box, mais des études consommateurs ont démenti ce besoin et montraient qu’elle répondait surtout à une demande de déconnexion et de protection à l’égard des ondes wifi et de téléphone portable.
Connecté, déconnecté, connecté…
La déconnection n’est pas une alternative radicale à la connection mais bien plus un temps, une manière de faire avec le monde connecté. C’est la conclusion principale de la grande et passionnante enquête ethnographique réalisée par quatre chercheurs en sciences de l’éducation et de la Communication pour la Fédération Française des Télécoms : « il n’y a pas de monde numérique unique : c’est le monde de chacun qui est tramé d’usages numériques qui lui correspondent. Cette intrication ne se comprend bien que dans une logique paradoxale : si de nombreux moments de vie font éprouver une continuité entre soi et les technologies numériques, « être connecté » revient pourtant à faire l’expérience de la discontinuité. Loin du fantasme de la déconnexion radicale, pour rendre leur vie connectée vivable, les utilisateurs procèdent à d’incessantes petites déconnexions et font se succéder les moments avec et les moments sans.»
Au-delà de la science-fiction, de l’émotion dans la technologie
Ainsi, technologies et innovations foisonnantes font tomber une à une les barrières entre réalité et (science)fiction. Personne n’a encore pris la véritable mesure des objets connectés que s’annonce déjà l’arrivée de robots encore plus intelligents et « humains ». L’artiste Patrick Tresset a ainsi imaginé Paul, un robot capable de réaliser le portrait d’un modèle à partir de l’identification de son visage par ordinateur, avec les mêmes imperfections que le coup de crayon humain. La technologie devient ainsi « émotionnelle » et « sensitive ».
Soutenue par la région Aquitaine, une équipe d’universitaires bordelais vient quant à elle d’inventer et de créer Culturewok, le premier moteur de recherche culturel émotionnel et sensitif. L’internaute fait varier toute une série de curseurs selon ses envies et sa sensibilité du moment. Le moteur lui indique alors les objets culturels (livres, films, musiques…) qui correspondent le mieux à son état émotionnel. Les médiathèques locales, à Saint Jean de Luz ou Mérignac par exemple, l’ont déjà adopté. Déshumanisée la technologie ? Dans l’ère de l’ultra-connection, et de l’ultra-innovation, l’ancestrale opposition entre l’austérité glacée de la technique et la sensibilité émotive de l’Homme pourrait bien être battue en brèche.
PQR & TNS SOFRES