27 novembre 2024

Temps de lecture : 4 min

Sidaction et The Good Company détournent les codes du porno pour promouvoir une sexualité plus « saine » et responsable

À l’occasion de la Journée mondiale de lutte contre le sida du 1er décembre, Sidaction alerte sur l’urgence de mettre en œuvre l’éducation à la sexualité à l’école pour mieux armer les jeunes générations. L’occasion d’une campagne pensée par The Good Company qui joue finement sur les codes visuels du porno… pour mieux les déconstruire.

Qui peut prétendre en 2024 que la majorité des œuvres pornographiques diffusées sur internet soient particulièrement saines ? Un rapide coup d’œil sur les pages d’accueil des sites les plus populaires suffit pour se rendre compte des problèmes éthiques qui gangrènent depuis toujours l’industrie, notamment à cause de l’image dégradée de la femme qu’elle transmet. Dans l’idée d’échapper – enfin – au male gaze – un terme qui qualifie, entre autres, le regard masculin qui sexualise la femme – et de permettre aux producteurs et réalisateurs d’assainir l’industrie, Alan McKee, professeur à l’Université de Sydney et expert en pornographie, proposait en 2023 un panel de recherche interdisciplinaire sur le sujet autour de six critères à remplir pour qu’une œuvre soit jugée « éthique ».

Selon le chercheur, la recette d’un porno réussi nécessite : une variété de pratiques sexuelles ; une diversité des corps, genres et couleurs de peau ; une production éthique ; de montrer la négociation du consentement à l’écran ; de montrer le plaisir de tous les participants et pour finir, une représentation de rapports sexuels protégés. Malgré ces efforts, le sujet des films pour adultes est toujours loin de faire l’unanimité dans le monde universitaire.

S’il est, bien sûr, possible de développer un porno éthique, certains de ses confrères, tels que Debbie Ollis, une chercheuse en santé et sexualité à l’Université Deakin, rappellent néanmoins qu’il est très peu probable que l’industrie tout entière emprunte cette route. La force de l’habitude, et de la valeur économique des vieilles recettes, obligent. Il n’empêche que cette dernière soutient l’idée d’un cadre éducatif autour de cette thématique qui aiderait les plus jeunes « à donner sens à ce qu’ils voient dans la pornographie », avec un accent mis sur le respect de soi-même et des autres. Un an plus tard, le message a été reçu 5 sur 5 par Sidaction et The Good Company.

Prendre le mal à la racine

La période de l’adolescence apporte son lot de questions sur la sexualité et amène les jeunes à chercher des réponses là où ils peuvent plus facilement en trouver. 42% des garçons déclarent regarder des vidéos pornographiques pour en apprendre plus sur le sexe et pour 60 % des jeunes, le premier contact avec la pornographie se fait avant l’âge de 15 ans, selon un sondage OpinionWay pour Apprentis d’Auteuil publié l’année dernière. Florence Thune, directrice générale de Sidaction, rappelle à ce propos que : « La pornographie à laquelle les jeunes ont accès montre un modèle de sexualité axé sur la performance, une sexualité sans relationnel autre que sexuel et souvent dénué de toute expression relative au consentement. Éduquer à la sexualité, c’est repérer les stéréotypes pour pouvoir s’en distancier, lutter contre les violences sexistes et sexuelles et parler des rapports de genre et de la construction de relations égalitaires et respectueuses. Et bien sûr, protégées ! ».

Un travail qu’il est urgent de mettre en œuvre, comme le montre les statistiques. Selon une étude de l’Inserm sur le contexte des Sexualités en France, 50% des femmes et 40% des hommes de 18 à 29 ans déclarent ne pas avoir utilisé un préservatif lors du premier rapport sexuel avec un nouveau partenaire dans les douze derniers mois, un chiffre en hausse et préoccupant qui témoigne d’un manque d’information sur les pratiques à risque et les modes de contamination du VIH et des IST. Sidaction rappelle l’importance de renforcer la prévention chez les jeunes et de leur donner les outils nécessaires pour une sexualité responsable et protégée.

À qui la parole ?

Pour remplir cocher toutes ces cases… et bien plus encore, Sidaction a donc dévoilé sidaxxxion.fr, un faux site et des faux films pornographiques, pour déconstruire les clichés véhiculés par l’industrie. Pensé comme un outil de prévention où les jeunes et les parents peuvent trouver des réponses pour mieux s’informer, ce site pédagogique aborde plusieurs thématiques : le consentement, la non-violence, la performance, la tolérance, l’orientation sexuelle et la prévention, dans un langage adapté aux jeunes. Une opération qui fait sens et qui permet de penser la pornographie de demain, consultable juste ici.

Cette prise de parole s’inscrit directement dans la volonté de longue date de Sidaction pour la mise en œuvre réelle de l’éducation à la sexualité à l’école. Face à la non-application de la loi qui devrait contraindre les établissements à s’y coller, Sidaction a donc décidé de prendre la parole pour rappeler l’urgence d’une éducation à la vie affective, relationnelle et sexuelle. En 2023, seules 15 % des personnes âgées de 15 à 24 ans déclaraient avoir bénéficié de plus de six séances d’éducation sexuelle dans leur scolarité alors que 75% des jeunes auraient voulu être mieux informés et accompagnés dans le début de leur vie affective et sexuelle, selon le sondage Ifop « Les jeunes de 15-24 ans et leur rapport au VIH.sida » pour Sidaction 2023.

Pour répondre à cet enjeu majeur de santé publique, Sidaction milite pour que l’école joue un rôle de digue protectrice en offrant aux jeunes un socle de connaissances communes, adaptées à l’âge, tout au long de leur scolarité. Étant donné que « la pornographie est interdite aux moins de 18 ans » c’est au « législateur d’agir pour faire en sorte qu’elle ne soit pas accessible », précise Florence Thune. Avant d’ajouter : « Dans le même temps, le constat est qu’une proportion importante de jeunes y sont effectivement exposés. L’école, et les programmes d’éducation à la vie affective, relationnelle et sexuelle contribuent directement à lutter contre les clichés véhiculés par ce type de contenus et permettent aux jeunes de décrypter et comprendre ce à quoi ils et elles sont exposée.es ».

Le moment de prendre la parole

Pour interpeller les parents, Sidaction a choisi de les confronter à la réalité en leur montrant les contenus auxquels les enfants sont exposés quand on ne leur donne pas les bonnes clés pour s’éduquer. Ce sont donc six visuels qui ont été déclinés en détournant les codes et le langage des sites pornographiques. Diffusée en affichage outdoor, en presse, en VOL et sur les réseaux sociaux, la campagne SIDAXXXION, conçue par l’agence The Good Company et médiatisée par Values.media, rappelle que l’éducation est la première des protections et qu’il est urgent de soutenir une éducation affective, relationnelle et sexuelle à l’école.

« Il y a un déni ou un tabou sur la consommation de contenus pornographiques par les ados en France. Oser nommer les choses, poser le débat sans jugement et sans morale était nécessaire pour faire réaliser l’importance d’en parler et pour montrer qu’éduquer… c’est protéger », conclut Nicolas Gadesaude, Directeur de la Création de The Good Company.

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