Cet article est paru dans la Revue INfluencia papier et digitale N°7 : changer, on a tous les clés
Le changement, c’est le passage d’un état à un autre. Qu’il s’agisse de mutation, de transformation ou de variation, il a continuellement illustré la vie des marques, notamment lors des révolutions industrielles (produits) ou commerciales (services, distributions).
LE RÔLE DE LA MARQUE VARIE SELON LE BUSINESS MODEL
Or la marque se définit comme un actif vivant au sein de l’organisation. A travers l’ensemble de ses points de contacts, elle est à la fois la promesse et la garantie d’une expérience. En tant qu’actif, elle conduit le choix, génère un premium et engendre la fidélité. Ainsi son rôle (c’est à dire sa capacité à conduire le choix) varie en moyenne de 10% à 70% selon le business model. Face à un monde en transformation, les marques fortes sont celles qui ont su équilibrer la prise de risque et la capacité à changer. Ceci, afin de pérenniser et faire croître l’organisation et l’actif marque de concert.
Le changement représente un risque (celui de disparaître) mais plus souvent une opportunité (celle de rebondir).
Selon McKinsey&Company, le cycle de vie moyen d’une entreprise est de 15 ans et seulement une entreprise sur vingt réussit à dépasser une durée d’existence de plus de 50 ans. Aujourd’hui, au sein des entreprises mondiales, la marque est le catalyseur essentiel, à l’interne comme à l’externe, par lequel les changements se développent et se concrétisent sur la base de la stratégie définie par l’entreprise. Au cœur des fonctions de différenciation, de création de valeur et de fidélisation, la marque est l’un des actifs qui lui permet d’orchestrer le changement pour redéfinir continuellement sa position dans un environnement en évolution rapide, pour rester en avance sur ses concurrents, pour engager ses ressources humaines tout en respectant ses racines, ses fondamentaux et son héritage.
Le changement pour le changement n’a aucun sens
ACCÉLÉRATEUR DE PROGRÈS
L’ampleur des changements que nous vivons actuellement est source de confusions, de conflits et porteurs de leurs propres contradictions. La marque est dès lors un accélérateur de progrès pour les entreprises et les organisations. Instrument de changement, elle est l’intégrateur et le facilitateur pivot pour l’organisation notamment vis à vis de :
~ la mondialisation et l’ancrage local
~ le consommateur roi et la prolifération des choix,
~ la vitesse technologique et la puissance des médias sociaux,
~ la retour de l’humanisme et l’urgence écologique,
~ la remise en cause des institutions classiques et la montée de la responsabilité d’entreprise.
QU’EST CE QUE LE CHANGEMENT POUR UNE MARQUE?
En 1983, en lui demandant « Comptez-vous continuer à vendre de l’eau sucrée le reste de votre vie ou voulez-vous changer le monde avec moi ? », Steve Jobs débauche John Sculley, alors Directeur Général de Pepsi-Cola. Quelques mois plus tard, Jobs et Sculley demandant à s’appuyer sur le roman 1984 d’Orwell confient le lancement du Macintosh à TBWA Chiat/Day donnant lieu à une campagne ayant marqué l’histoire. Par sa créativité bien entendu mais aussi par son plan media (révélation pendant le SuperBowl), tout en ayant un impact sur le prix de vente du Macintosh et le business model alors en place. En effet, Jobs voulait vendre le Macintosh en-dessous de 2000 dollars et Sculley afin de financer un changement d’approche convaincut Jobs de le fixer à 2495 dollars. Le différentiel permettant d’adresser un premium supérieur tout en finançant une visibilité et un gain de notoriété supérieur.
Le changement représente un risque mais plus souvent une opportunité
APPLE A INVENTÉ LE SOCIAL MEDIA AVANT L’HEURE
C’est bien la croyance et la confiance dans leur nouvelle offre qui ont poussé les dirigeants d’Apple à définir ce changement avec créativité et puissance puis à l’exprimer de façon authentique, pertinente et différenciante. Le changement est venu de l’engagement interne mais aussi de la capacité de la marque à être réactive. Les résistances internes, notamment des actionnaires d’Apple, furent si fortes que l’achat media faillit être suspendu. Au final, Apple inventait le social Media avant l’heure avec 43 millions de personnes ayant vu le spot diffusé une seule fois lors du troisième quart-temps du SuperBowl, créant une influence et un bouche-à-oreille incommensurables au regard de la part de marché d’Apple. La marque n’a ensuite cessé d’utiliser le changement comme un axe de conduite pour augmenter son influence dans la vie des gens… et changer leur monde.
L’IMPACT DU CHANGEMENT ET L’IMPORTANCE DE LA MARQUE
En tant que repère pour toutes ses audiences, la marque doit permettre à tous les publics de s’orienter dans l’espace, dans le temps et surtout d’évaluer la proposition de celle-ci. La marque est l’essence même du rapport de confiance et doit donc d’une part se justifier (c’est-à-dire dans l’espace concurrentiel) et d’autre part anticiper (notion de pérennité et de fidélité) afin de contribuer à son choix (valeur du contenu proposé) par les collaborateurs comme par les clients, actuels et futurs.
Comme la résistance au changement n’est parfois que le refus de la croissance, le changement représente généralement un champ d’opportunités plutôt qu’un risque ou une menace pour l’entreprise.
Google n’a qu’une mission : « organiser l’information et la rendre universellement accessible et utile ». Pour son dirigeant, Eric Schmidt, face aux ruptures technologiques, toutes plus intéressantes les unes que les autres, l’essentiel est de comprendre quel changement aura la meilleure chance d’avoir un impact sur le plus de gens possible. Car ce sera celui-là qui impactera le plus le changement sur les comportements, les business models et l’économie.
LEVIER DE CRÉATION DE VALEUR
Aussi, le changement pour le changement n’a aucun sens (de nom, de logo…) s’il n’est pas soutenu par une vision pertinente et différenciante. Le changement n’est pérenne que s’il s’inscrit dans la raison d’être de l’entreprise, dans sa façon propre d’entendre et de voir le monde, dans la vision qu’elle a de contribuer à vouloir changer celui-ci, avec ses collaborateurs et ses clients. Les marques fortes ont le pouvoir de changer le monde, chacune à leur mesure mais toujours avec acuité, résilience et constance. Elles se construisent avant tout de l’intérieur. Elles attachent une attention particulière à respecter et enrichir les facteurs de Clarté et d’engagement car ils sont ceux qui permettront d’utiliser le changement comme levier de création de valeur.
Quels que soient les secteurs d’activités, plus les entreprises grandissent, plus elles développent des rigidités individuelles et organisationnelles, qui les empêchent de s’adapter aux changements de marché, de comportements client ou aux révolutions technologiques, écologiques voire sociales.
LA GESTION À LONG TERME DE L’ACTIF MARQUE
Au delà du challenge que représente le changement – c’est-à-dire la capacité de l’organisation à se transformer, notamment via sa densité hiérarchique et sa culture – l’enjeu principal réside dans la gestion à long terme de l’actif marque. La marque porte la vision qui conduit la performance du business, les comportements et l’expérience interne et externe. De ce fait, elle doit être régulièrement mesurée afin d’être gérée précisément en opérant les changements que l’environnement impose à l’organisation. Les marques qui ont mis en place un système fort pour partager la stratégie sur l’ensemble de l’organisation et ont un leadership fort et stable avec une vision claire et réaliste sur le business, doivent se concentrer en premier sur les facteurs de pertinence, de différenciation, de compréhension en gardant un contrôlant les facteurs de clarté ou d’engagement. À l’inverse, celles qui ont une compréhension limitée de ce que la marque peut et doit signifier et défendre, doivent prioriser les facteurs de clarté, d’engagement avant de s’attaquer aux facteurs externes tels l’authenticité, la cohérence, la présence ou la différenciation.
Pour Sir Winston Churchill, « un pessimiste voit la difficulté dans chaque opportunité, un optimiste voit l’opportunité dans chaque difficulté ». Voir le monde positivement, c’est placer le changement en tant qu’opportunité et c’est adresser cette opportunité (par l’innovation, la conquête de nouveaux marchés, le stretching de l’offre, etc), quelles que soient les difficultés. Les marques fortes sont celles qui reposent sur une raison d’être puissante et possèdent une réelle volonté d’influencer leurs publics avec beaucoup d’altruisme, afin de rendre pérenne la vision qu’elles ont du monde pour la développer sur un champ qui n’est jamais fini.
Bertrand Chovet
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