Article paru dans la revue INfluencia N5 papier et digitale : les médias : innove ou crève
Avec l’avènement des réseaux sociaux et le chant des sirènes des marques, on est en droit de se demander si les blogs et leurs créateurs sont toujours aussi « libres de droit » qu’au début du siècle. Et il en va de même sur leur capacité à produire du contenu régulier, pertinent et indépendant qui n’est rien d’autre que la source de leur légitimité.
De la blogosphère à l’influence sphère…
Et si l’ère des blogs n’avait duré que 6 ans ? Et si en 2005 les éclosions de Facebook, suivi en 2006 de Twitter, avaient annoncé l’extinction de la majorité des blogueurs ? C’est du moins ce que pensent beaucoup d’experts, qui ont vu apparaître avec les réseaux sociaux des blogueurs – influenceurs d’un nouveau genre drainant pour les meilleurs cinquante à soixante mille personnes. Un mélange non avoué de blogueurs et de metteurs en scène poussant un peu trop la théâtralisation de leur vie… Des « chefs de clans » qui, sans contenus, mais avec un don certain pour capter la lumière et une bonne maitrise des réseaux sociaux, ont su rassembler des millions d’internautes lambda voyant en eux des égéries à tendances aspirationnelles… « Nous assistons à un bouleversement sur le net, la blogosphère influente fait peu à peu place à une nouvelle catégorie d’internautes « influenceurs », dont le degré de prescription est tel qu’il devient incontournable », confie Sandrine Plasseraud, la directrice générale France de l’agence conversationnelle We are Social. Une forme d’influence-sphère ne serait-elle pas en train de voir le jour ?
Puissante et incontournable, certes, mais sur la base de quoi ?
Le problème majeur du blogueur actuellement est qu’il ne blogue plus… Avant, la fenêtre d’expression ne passait que par le blog, ce qui imposait un rythme régulier d’écriture. Aujourd’hui et encore plus demain, les réseaux sociaux, Twitter en tête, ont monopolisé son attention au détriment d’une approche indépendante de l’information. « Nous avons conscience de construire des dispositifs sur le digital qui ne prennent pas en compte les blogueurs ou minimisent leur rayonnement. Se contenter de poster une photo ou mettre un post de 3 lignes avec un simple relais sur les réseaux sociaux pose aujourd’hui une vraie question : où en est l’efficacité en termes de visibilité et d’engagement de notre cible ? » s’interroge mademoiselle A, directrice marketing d’une grande marque de boisson préférant rester discrète pour cause de « sujet délicat »… Car il est aussi intéressant de constater que les blogueurs et autres leaders de communauté inspirent une sorte de crainte aux yeux des marketeurs. « Certains sont conscients de leur pouvoir et en jouent énormément en demandant des rémunérations ou des cadeaux en échange… Sous prétexte que leur blog représente une forme d’espace de liberté et que chaque publication fait foi, on se retrouve à devoir négocier pour un post ou un article censé être publié de manière impartiale et indépendante… », précise Monsieur H, autre responsable marketing d’une marque de vêtements, et qui lui aussi ne désire pas « encore » se mettre les blogueurs à dos…
Le rôle des marques
Et si la blogosphère se cherche actuellement, ce n’est pas par hasard… Les marques sont aussi responsables de l’appauvrissement des blogs. À toujours vouloir légitimer leurs actions et leurs produits au travers de ce type d’interface, elles ont indirectement perverti les blogueurs et même les leaders de communautés en les chérissant un peu trop en soirées et cadeaux divers… Certaines marques sont conscientes de cette relation et comprennent aussi l’intérêt d’un échange sans équivoques, basé sur le dialogue : « À l’instar des autres médias, les blogs ont besoin d’indépendance et de justesse dans l’utilisation de leur liberté d’expression. Les premiers pas en communication de Winamax ont été sur le terrain des communautés de joueurs et des blogueurs. Il ne s’agissait pas de faire des RP sur le web, mais d’ouvrir le dialogue avec nos propres clients. Encore aujourd’hui, c’est irremplaçable, et ça n’a pas de prix. Mais on peut aussi y observer des dérives en raison de l’omniprésence de la publicité des marques, qui les transforment souvent en leur propre terrain d’expression, voir en site d’affiliation », explique Canel Frichet, Directrice Générale de Winamax. Si aujourd’hui la légitimité de certains blogueurs est remise en cause dans les milieux de la mode, de la communication et du marketing, il est évident que le consommateur va lui aussi se demander dans d’autres secteurs s’il n’y a pas quelque chose de pourri au royaume des blogs. Et si tout simplement, l’avenir de la blogosphère était… les journalistes ?
Gaël Clouzard / @G_ael
» Bloggers Wear Levi’s » by nstylemag.com. Tout est dit…
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