27 juin 2022

Temps de lecture : 3 min

Retailers qui mutent cherchent vendeurs du 3ème type désespérément…

Les soldes d’été ont commencé mais les consommateurs risquent d’être mal servis dans les magasins physiques. Les salariés manquent en effet dans les boutiques. Le Covid est passé par là mais la profession doit aussi se réinventer pour répondre aux nouvelles attentes des particuliers.

L’affluence promet d’être importante mais les queues risquent également d’être très longues. Si ce triste présage risque de concerner des millions de touristes qui vont prendre l’avion cet été dans des aéroports en manque flagrant de personnel, il devrait aussi toucher les consommateurs à la recherche de bonnes affaires. Les soldes d’été, qui ont débuté le 22 juin et qui se termineront le 19 juillet, promettent d’être très populaires cette année. 83% des Français ont en effet prévu de se rendre dans les magasins durant cette période, selon une enquête de Channable, une société spécialisée dans la gestion de flux et l’automatisation SEA (placement de produits et Shopping sur internet). 51% des sondés prévoient même de profiter encore plus que d’habitude des rabais proposés par les marques afin de lutter contre l’inflation. Si 82% des acheteurs vont aller sur des sites e-commerce multi-labels et 75% sur les plateformes de vente en ligne des marques, près de la moitié d’entre eux (46%) pensent se rendre dans un grand magasin ou dans un commerce de proximité pour faire de bonnes affaires. Leurs journées pourraient toutefois vite se transformer en un véritable parcours du combattant. La faute à?  la faute au? Manque de salariés compétents au sein de leurs enseignes…

Les vendeurs ne sont pas revenus

« Il y a une crise de recrutement dans le retail, affirme Rémi Le Druillenec, le co-fondateur de l’agence de design d’Expérience Héroïne, qui vient de co-écrire avec son associé Quentin Obadia un livre intitulé « Le Magasin est-il mort ? » aux éditions 1min30 Publishing. De nombreux salariés dans les boutiques ont quitté le secteur durant la pandémie et beaucoup ne sont pas revenus. Souvent peu payés et trop longtemps mal considérés par leurs employeurs, ils ne souhaitent plus travailler dans ce secteur. Et nos clients nous disent que les rares postulants qu’ils reçoivent souffrent d’un véritable déficit de compétence. » Le métier de vendeur a, il est vrai, énormément évolué récemment.

Le magasin est devenu un point de contact entre les marques et leurs clients.

« La démocratisation du commerce en ligne qui a débuté il y a environ cinq ans a provoqué une très forte mutation du modèle de la distribution traditionnelle, constate ce spécialiste des problématiques retail qui accompagne depuis une décennie la création et le déploiement de concepts et de parcours clients pour de nombreuses marques comme Unibail Rodamco, Air France, Nespresso, Shiseido et L’Oréal. Pendant très longtemps, la fonction principale du vendeur dans les magasins était de… vendre.

Le point de vente physique n’est plus qu’une étape du parcours-client aujourd’hui et non plus son point d’arrivée final.

Tous ses objectifs et ses primes étaient liés aux produits et aux services qu’il allait vendre aux clients. Mais aujourd’hui, il n’est pas rare de voir une personne se rendre dans un point de vente pour se renseigner et acheter l’article qu’il souhaite plus tard sur internet. Le magasin est devenu un point de contact entre les marques et leurs clients. C’est le seul format à permettre un contact d’humain à humain. Les vendeurs doivent donc, avant toute chose, être des ambassadeurs et des représentants des marques et non plus uniquement des personnes cherchant à générer du chiffre d’affaires. » Le point de vente physique n’est plus qu’une étape du parcours-client aujourd’hui et non plus son point d’arrivée final. Un géant américain l’a compris avant tous les autres.

Apple montre la voie à suivre

« Dans les Apple Stores, les équipes n’ont pas des objectifs de résultat car leurs revenus sont basés sur les ventes globales de la marque, ajoute Rémi Le Druillenec dont l’agence fondée en 2020 compte déjà parmi ses clients Chevignon, Clarins, Horace et Le Slip Français. Peu importe si l’acte d’achat a été finalisé dans une boutique en propre, sur le web ou dans le corner d’une autre enseigne. Du coup, les conseillers dans les stores sont rassurés et concentrent tous leurs efforts sur la satisfaction de leurs clients. » Les autres enseignes devraient s’inspirer de ce modèle. Changer de culture demande toutefois du temps et certains retailers n’ont pas les moyens de prendre leur mal en patience pour modifier les « mauvaises » habitudes prises, à leur insu, par leurs vendeurs.

Les beaux jours ne sont pas encore pour demain

Le commerce physique, qui traverse depuis plusieurs années une mauvaise passe accentuée par la pandémie, n’a donc pas fini de manger son pain noir. « Beaucoup de boutiques ont déjà fermé, regrette le co-fondateur d’Héroïne. Les enseignes les plus touchées étaient souvent en difficulté avant l’arrivée du Covid qui a accéléré des tendances existantes mais il est certain que de nombreux magasins vont encore disparaître dans les mois à venir. Les plus touchés seront les points de vente de taille moyenne qui génèrent des coûts élevés sans attirer des clients sur une vaste zone. Les plus grands resteront des flagships importants et les plus petits apporteront un service aux consommateurs s’ils se situent sur leurs parcours quotidiens. C’est pour cette raison qu’on voit des toutes petites boutiques s’ouvrir dans les gares afin que les clients puissent chercher le produit de leur choix sans modifier leur chemin habituel. Je crois beaucoup à la rationalisation des réseaux de magasins. » En attendant cette « grande révolution » du retail, vous risquez de devoir prendre votre mal en patience lors des soldes d’été…

En résumé

« Le Magasin est-il mort ? » aux éditions 1min30 Publishing, par Rémi Le Druillenec, co-fondateur de l’agence de design d’Expérience Héroïne, et son associé Quentin Obadia.

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