Quitter X, ou agir pour la levée de l’anonymat sur les réseaux sociaux ?
Faut-il quitter X ? Depuis le rachat de Twitter par Elon Musk, on a vu progressivement monter le flux des ex-twittos qui annonçaient la fermeture de leur compte ou, au moins, sa mise en sommeil.
Le mouvement s’est accéléré après la victoire de Donald Trump à l’élection présidentielle américaine, quatre quotidiens de référence – le Britannique The Guardian, l’espagnol La Vanguardia et le suédois Dagens Nyheter, et le Français Ouest-France – s’y sont déjà joints, et le débat gagne maintenant les médias traditionnels. France Inter, par exemple, y consacrait son Téléphone sonne ce 20 novembre.
Pour qui a eu l’habitude d’utiliser Twitter, puis X, comme une source de veille professionnelle, il est vrai que l’exercice est de plus en plus décevant et déprimant, l’information à proprement parler devenant de plus en plus rare, perdue entre affirmations complotistes et flots de messages haineux.
Et pour qui était attaché aux réseaux sociaux en tant qu’espaces de débat, faire valoir un point de vue posé et modéré est devenu tâche presque impossible.
On imagine mal Elon Musk mettre de lui-même de l’ordre. De même qu’on imagine mal le DSA, aussi rigoureusement appliqué soit-il, venir à bout des torrents de désinformation qui polluent l’espace numérique. Alors que la combinaison des bots et de l’IA générative amplifie chaque jour un peu plus la production et la circulation de fake news, et que la règle reste pour les plateformes l’action a posteriori, et en fonction des signalements reçus, la tâche n’est pas sans évoquer un jardinier luttant contre l’envahissement des mauvaises herbes avec des ciseaux à ongle.
Au gré des messages individuels, certains indiquent rester sur X. Pour ne pas lâcher le terrain aux propagateurs de fake news, et pour ne pas abandonner les communautés de followers qu’ils ont bâtis depuis presque deux décennies ; d’autres annoncent rejoindre Bluesky, Thread ou plus rarement Mastodon… au risque d’y ressentir la frustration d’environnements peu fréquentés et, si rien n’est fait, d’y subir à leur tour le déplacement des trolls.
Il n’est pas sûr, au final, que l’action individuelle suffise pour répondre à la dérive des réseaux sociaux… alors même que la solution est loin d’apparaître hors d’atteinte, dès lors que les responsables politiques se décideront à l’actionner.
La première piste consiste à valoriser la lumière plutôt que de s’échiner à combattre l’obscurité : garantir la visibilité dans les timelines ou les résultats de recherches de sources d’informations fiables, plutôt que d’essayer d’en faire disparaître les contenus de désinformation. En France, bénéficier d’un numéro de CPPAP, pour les médias écrits, ou d’une convention avec l’Arcom, s’agissant des médias audiovisuels, pourrait valoir inscription d’office sur cette liste de sources agréées, et un dispositif complémentaire pourrait être prévu pour les « influenceurs d’information » (Hugo Décrypte, Gaspard G…). Parce qu’une telle réforme ne pourrait être efficacement conduite qu’au niveau européen, elle pourrait trouver son ancrage juridique dans un complément à l’article 18 du Règlement européen sur la liberté des médias, qui ébauche un statut particulier pour les « fournisseurs de média ».
La seconde – la levée de l’anonymat sur les réseaux sociaux – a été déjà souvent évoquée, mais la nécessité de recueillir l’accord des autres Etats membres de l’Union n’a pas permis sa mise en œuvre. Linkedin constitue pourtant un cas d’usage à grandeur réelle du bénéfice à en attendre : parce que l’activité du réseau reste orientée pour une large part sur la mise en relation d’entreprises et de demandeurs d’emploi, chacun y publie les détails de son CV et y apparait sous sa véritable identité… et les trolls y sont quantités négligeables. L’étude d’impact est déjà réalisée !
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