Le pouvoir d’une marque se mesure plus que jamais à la place qu’elle occupe dans la vie des gens.
Ce constat n’a pas échappé à l’Eglise Catholique qui s’est récemment ouverte aux réseaux sociaux sous l’initiative du « cyber-théologien » jésuite Antonio Spadaro. Une initiative couronnée d’un succès d’audience, puisque le compte Twitter du souverain pontif enregistre 2 millions de followers deux mois seulement après sa création, et une centaine de « saint posts ». Autant de tweets dont le propos est le plus souvent de mettre en perspective les principes religieux avec des évènements calendaires, plus rarement géo-politiques (Nigéria, Syrie), livrant parfois même quelques détails personnels de la vie de l’évêque de Rome, comme par exemple la manière dont il avait l’habitude de décorer la crèche étant enfant. Bref, une animation irréprochable tant par le rythme que par les différents angles abordés, même si force est de constater que le style jugé par beaucoup « pontifiant » dénote dans le fil des Twittos.
Point de « Holly » tweet sur la résignation survenue lundi mais de nombreuses questions : le compte restera-t-il ouvert, ou sera-t-il plus vraisemblablement appelé à disparaître avec le « pseudo » Benoît XVI attaché à la fonction papale de Joseph Ratzinger ? Le message du 10 février : « Ayons confiance en la puissance de la miséricorde de Dieu ! Nous sommes tous pécheurs mais sa grâce nous transforme et nous renouvelle », auquel beaucoup ne manqueront pas de prêter un caractère prémonitoire, sera-t-il le dernier ?
Et surtout, le prochain pape poursuivra-t-il l’oeuvre « sociale » de se son prédécesseur ? Et si oui le fera-t-il de la même manière ?
Il convient évidemment avant tout, de se demander si oui ou non Twitter à sa place dans dans l’éco-système de la « marque Pape » et de « son ombrelle : la religion catholique ». Pourquoi pas ? N’ont-elles pas été précurseurs en la matière en créant autant d’églises comme lieu d’émission, que de messes comme messages, et de cloches comme alertes signalant leur arrivée. Le tweet est un nouveau moyen d’évangélisation auquel ne pouvait rester étrangère l’une des organisations les plus prosélytes de l’histoire. Ainsi, comme le précise Stefano Femminis rédacteur en chef de la revue jésuite Popoli : « Il est important pour l’église d’être là et de dialoguer avec ceux qui sont les plus éloignés et les plus critiques ». A ce titre le compte Twitter du « successeur de Pierre » a recueilli un grand nombre de commentaires, dont beaucoup de négatifs : 8% (contre 10% de positifs), comme l’a communiqué d’ailleurs en toute transparence le Saint Siège. Des commentaires qui n’ont d’ailleurs appelé aucune réaction du Saint Père, comme le lui ont judicieusement soufflé ses conseillers.
Reste à savoir ensuite si la pratique «vaticane» de Twitter doit persister dans sa forme initiale ?
La question renvoie à la nécessité ou non d’adapter le message au media qu’il emprunte, et jusqu’à quel point on doit le faire. D’aucuns affirment que le tweet appelle un langage qui lui est propre, d’autres non. La vérité est évidemment entre les deux. A l’heure des contenus choisis (vs. subits), s’il est nécessaire d’intéresser son audience, la « consistance » d’une marque ne peut-être sacrifiée sur l’autel du buzz qu’elle aimerait créer. Il s’agit pourtant là d’un péché trop souvent commis, mais qu’a su éviter le serviteur des serviteurs de dieu.
Plus que jamais la religion catholique et son évêque universel sont « embrassés » par ceux qui leur sont fidèles pour leur capacité à incarner et à suivre un ensemble de règles morales immuables. Echapper aux « jursiprudences » de l’évolution des mœurs et de la société (seulement quand elles sont contraires à ses principes) est une raison supplémentaire de croire en l’Eglise catholique et de lui donner un positionnement à part.
N’en déplaise à ses détracteurs, à l’instar d’une marque, vouloir évoluer pour chercher à plaire à ceux qui ne vous aiment pas est pure hérésie. Mieux vaut renforcer l’engagement de ceux qui croient en vous, autant de « super-fans » dont la foi saura faire des émules.
L’utilisation de Twitter telle qu’elle a été initiée par le Vatican n’est plus ni moins qu’une manière pour l’église de mettre en œuvre l’une de se missions fondamentales : apporter chaque jour la parole de dieu et éclairer la vie de chacun. Aussi anachroniques que puissent paraître ces « holly tweets », ne pas sacrifier ses principes sur l’autel des réseaux sociaux est le meilleur gage de longévité.
Le prochain Pape aura donc tout intérêt à continuer de faire de Twitter son outil de coaching évangélique privilégié.
Et quelle marque ne voudrait pas durer plus de 2 milliers d’années ?
Jocelyn Jarnier
Directeur Général Agence 6am