« Print is the new chic » ! Grazia de retour en kiosque
Après cinq ans exclusivement sur le digital, Grazia est de retour en print à l’occasion des 15 ans de la marque en France. Stéphane Haitaian, directeur exécutif Reworld Media, explique les enjeux de cette relance et la dynamique que son groupe entend créer autour de cette marque, dont il a acquis début 2023 les activités print et digitales dans le monde.
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INfluencia : Grazia revient en kiosque jeudi 6 mars 2025 pour les 15 ans de la marque en France. Dans quel esprit avez-vous orchestré ce retour avec deux numéros par an et après cinq ans de présence uniquement digitale et sociale ?
Stéphane Haitaian : lors de son lancement Grazia avait cassé les codes. Au-delà d’être un magazine de mode et de beauté de grande qualité, l’hebdomadaire avait fait la différence avec un mix éditorial unique qui parlait aussi de pop culture, de style, de sujets de société, de faits divers… avec une patte typiquement Grazia. En quinze ans, le monde s’est ultra-numérisé et la fonction des médias a beaucoup évolué. En 2025, il s’agit de renouer avec l’esprit de 2009, de garder l’ADN de la marque avec un ton décalé, parfois irrévérencieux, et du second degré, tout en jouant avec les nouveaux codes de communication et des nouveaux médias. Le retour sur le print est notamment le fruit de nos observations aux États-Unis, où nous avons récupéré la licence Grazia et où nous éditons la marque en direct – tout comme le magazine masculin Icon – via notre filiale Reworld Media US. Sur ce marché, nos interlocuteurs nous disaient « Print is back ». Céline Perruche, qui faisait partie de l’équipe en 2009 et qui est désormais directrice éditoriale at large de Grazia, le dit un peu différemment : « Print is the new chic ».
Le retour sur le print est notamment le fruit de nos observations aux États-Unis, où nous avons récupéré la licence Grazia et où nous éditons la marque en direct
IN. : de quelle manière cela s’exprime-t-il ?
S.H. : le print est devenu un média d’exception qui peut être travaillé sur des périodicités plus longues et avec des propositions qui seraient impossibles à réaliser en hebdomadaire ou sur d’autres médias. Nous avons voulu jouer avec l’objet – ce qui implique un projet industriel avec une importante préparation – à travers des effets de transparence, des textures, des interactions avec le lecteur… À côté du slow reading, nous gardons toujours le « mix Grazia » ainsi que l’énergie dans les visuels et l’iconographie. Il s’agissait de proposer en 2025 une expérience assez surprenante, avec de la légèreté et du décalage car, historiquement, Grazia s’amuse.
IN. : avec seulement deux parutions par an, n’est-ce pas un peu compliqué pour le magazine de rester dans l’esprit des lecteurs ?
S.H. : le nombre de parutions s’inscrit dans un écosystème global. Le print sera le flagship de la marque avec un numéro printemps-été et un numéro automne-hiver que l’on pourra collectionner, qui vont scander la saison et donneront la tendance en termes de mode, de lifestyle, de culture. À côté du site internet et des réseaux sociaux qui ont un rythme quotidien, une expression plus audiovisuelle et déstructurée, nous avons aussi lancé le 17 février 2025 une newsletter hebdomadaire Thank God It’s Monday (TGIM) qui fonctionne comme un mini-magazine auquel on s’abonne, dans lequel des auteurs et des contributeurs alertent sur l’actualité de la semaine avec l’œil de Grazia. C’est un modèle que nous expérimentons sur d’autres marchés et qui nous paraît être un dispositif média très intéressant pour optimiser toutes nos forces.
Le print sera le flagship de la marque avec un numéro printemps-été et un numéro automne-hiver qui vont scander la saison et donneront la tendance en termes de mode, de lifestyle, de culture
IN. : le retour au papier est-il aussi lié au constat que, sur le secteur de la mode et du luxe, les annonceurs attendent des marques médias un support physique ?
S.H. : certaines de nos marques fonctionnent très bien sans print associé mais, sans le print, Grazia avait une jambe en moins. Pour cette marque et cet univers, il est en effet important d’avoir une épreuve physique de ce que l’on fait, de la manière dont on positionne la marque, le ton des papiers… C’est quelque chose que l’on transmet à l’audience et au marché.
IN. : le premier numéro contient 46 pages de publicité pour un magazine de 196 pages. Quels sont les objectifs publicitaires ?
S.H. : dès son lancement, le magazine avait su parler aux marques du luxe et avait rencontré le succès sur le marché publicitaire puisqu’au bout de deux ans, Grazia était devenu le titre le plus investi en France après Elle. Le modèle de Grazia est publicitaire et l’était d’autant plus quand la marque était passée complètement sur la sphère digitale. Nous continuons dans cette direction en créant un point d’accroche et d’ancrage supplémentaire avec le magazine. Cela nous intéresse de redonner au print une fonction très spécifique et très valorisante. Ce que nous faisons avec nos lecteurs, nous pouvons aussi le proposer à nos partenaires pour faire émerger leurs publicités et leurs annonces d’une manière différente de ce que l’on peut faire dans le cadre des réseaux sociaux. Nous aimerions travailler différemment avec les annonceurs, en proposer peut-être moins mais mieux, exploiter le print pour ce qu’il est avec des textures différentes, des propositions originales dans un esprit totalement créatif.
Avec les lectrices qui ont connu Grazia il y a 15 ans et leurs filles qui seront aussi sensibilisées à la marque, on peut s’attendre à une forme de relation transgénérationnelle avec la marque
IN. : avec une expression digitale et sociale pendant cinq ans, le lectorat a été mécaniquement rajeuni. Quel public visez-vous aujourd’hui ?
S.H. : en étant passée sur les réseaux sociaux, la marque est désormais connue d’audiences plus jeunes. Avec la relance du print, nous allons découvrir ce qui va se passer. Dans les échanges avec nos partenaires, on voit une nostalgie très forte de Grazia dans sa version de 2009. Ils ont ce souvenir et sont demandeurs du retour du média. Cela vaut aussi pour les lectrices qui ont connu la marque il y a 15 ans et qui auront forcément une forme de nostalgie. Leurs filles seront aussi sensibilisées à la marque. On peut s’attendre à une forme de relation transgénérationnelle avec Grazia.
IN. : Reworld Media a acquis en janvier 2023les activités print et digitales des marques Grazia et Icon dans le monde auprès du Groupe Mondadori. Quelles sont les synergies au sein de la marque Grazia à l’international ?
S.H. : nous opérons la marque en direct en Italie, en France et aux Etats-Unis. Sur les autres marchés, les magazines sont exploités à travers des licences. Les synergies s’opèrent avec nos licenciés à travers une plateforme de contenus partagés, aujourd’hui essentiellement print mais qui vont aussi se développer sur la partie vidéo. Nous sommes en train de créer un réseau du même type sur Icon. Les deux marques sont séparées mais il faut noter que Reworld Media est aujourd’hui le seul groupe français et européen à détenir deux marques européennes haut de gamme, l’une masculine et l’autre féminine, avec une portée et une ambition internationale. On peut d’ailleurs saluer les annonceurs et partenaires qui nous accompagnent pour faire valoir ces marques européennes sur d’autres continents, en Asie, aux Etats-Unis… À part Elle (CMI France, ndlr), les autres marques de ce segment sont essentiellement américaines. Promouvoir le savoir-faire européen est une belle mission.
Reworld Media est aujourd’hui le seul groupe français et européen à détenir deux marques européennes haut de gamme – Grazia et Icon – avec une portée et une ambition internationale
IN. : quelles sont les perspectives de développement autour de Grazia ?
S.H. : demain, il s’agira de diversifier la marque et, sur Grazia comme sur Icon, il y a un vrai potentiel de diversification. Nous investissons sur la créativité pour développer un esprit différent, que nous pouvons aussi proposer dans le cadre d’événements. Cela fait partie des développements logiques pour nos deux marques.
En savoir plus
Le nouveau numéro de Grazia, proposé sur un rythme semestriel, est vendu 6,90 € et mis en place à 80 000 exemplaires. Il explore le thème « Vous avez un nouveau message ».
La marque a été lancée en 1938 en Italie, où le magazine est actuellement diffusé à 82 282 exemplaires par semaine.
Elle est présente avec 25 éditions dans le monde, qui ont des périodicités variables : hebdomadaire en Italie et en Chine, quinzomadaire au Royaume-Uni et en Allemagne, mensuelles et trimestrielles dans d’autres territoires.
En France, Grazia a été lancé en 2009 par Mondadori France sur un rythme hebdomadaire et sous la houlette d’Yseult Williams, qui était sa directrice de la rédaction (2008-2012). Stéphane Haitaian avait piloté le lancement et en avait été l’éditeur pendant trois ans.
Racheté par Reworld Media en 2019. Le Covid avait poussé le groupe à cesser la parution papier et à développer la marque uniquement sur le digital.
Le site grazia.fr compte près de 3 millions de visiteurs uniques chaque mois (ACPM One Next Global 2024 S2) et plus d’un million de followers sur TikTok, Instagram et Facebook (Réseaux sociaux décembre 2024).