Pourquoi les adaptations de jeux vidéo ont-elles autant la côte à Hollywood ?
Alors que les studios peinent à remplir les salles de cinéma, les films et les séries tirés de jeux vidéo iconiques n’en finissent plus d’attirer les foules et les faveurs des critiques. Un engouement qui fait suite à des décennies d’adaptations médiocres, voir insultantes pour les fans, et qui s’explique par une meilleure compréhension des scénaristes et des producteurs des œuvres qu’ils adaptent. Comme souvent, c’est l’intention qui compte…
Après les comic books de super-héros estampillés DC et Marvel, les jeux vidéo peuvent-ils devenir la nouvelle poule aux œufs d’or d’Hollywood ? Les plus de quarante ans se souviennent sûrement d’une époque où la simple évocation d’une adaptation d’un jeu vidéo sur petit ou grand écran faisait craindre le pire aux cinéphiles et aux gamers. « Super Mario Bros. » en 1993, « Street Fighters » en 1994 – désolé JCVD –, « Mortal Kombat » un an plus tard – désolé Christophe Lambert –, sans même parler de sa suite et de son remake en 2021, « Doom » en 2005 – malgré The Rock et ses sourcils – ou plus récemment « Warcraft » en 2016… l’historique n’est pas mauvais… il est nullissime.
Trop souvent, ces adaptations ont réussi l’exploit d’insulter les fanbase de leur franchise originelle en étant piloté par des producteurs qui n’y connaissaient pas grand chose… ou pire encore, qui les méprisaient. La même critique que l’on pourrait faire à la majorité des adaptations de super héros jusqu’au milieu des années 2000… n’est pas Sam Raimi qui veut.
Les producteurs changent… le public aussi
Mais ces dernières années, le contexte a vraiment changé. Pour commencer, les producteurs qui sont aujourd’hui à la charge de ces projets ne sont plus aussi largués que leurs ainés sur le contenu qu’ils adaptent. Le renouvellement des générations fait que, bien souvent, ils ont eux-mêmes grandi avec les jeux vidéo et qu’ils seront donc doublement attentifs à ne pas leur manquer de respect.
« Ce n’est pas très différent de ce qui s’est passé avec les comics il y a une vingtaine d’années », expliquait Doug Creutz, un analyste spécialisé sur le gaming, au média anglo-saxon The Wrap l’année dernière : « Lorsque les réalisateurs et les scénaristes ont commencé à prendre les super héros au sérieux, en réalisant notamment leur potentiel pour raconter des histoires universelles, le grand public, au-delà des fanboys, a également commencé à le prendre au sérieux ».
Un autre argument qui explique cet engouement est l’explosion du nombre de gamers à l’échelle mondiale que l’on attribue souvent à la pandémie de covid-19, en ayant (r)éveillé les passions de beaucoup de joueurs qui luttaient contre l’ennui, mais également aux capacités technologiques actuelles des smartphones qui rivalisent avec certaines consoles de salon. Des œuvres telles que « Warcraft » – en attendant une adaptation digne de ce nom – et « Minecraft » sont jouées chaque mois par des centaines de millions de personnes. De quoi garantir un large public potentiel à tous producteurs qui souhaiteraient en faire des films dérivés.
Enfin, car il ne faut pas oublier qu’une adaptation a besoin de l’aval des deux parties pour se faire, cet essor s’explique également par la volonté grandissante des studios qui ont développé les jeux, tels que Nitendo et Sony Corporation, de concéder les droits de leurs licences pour accroître leurs bénéfices. D’autant plus qu’un jeu vidéo AAA – une étiquette qui recoupe les jeux vidéo dotés des budgets de développement et de promotion les plus élevés – coûte beaucoup plus cher à produire qu’autrefois…
Du cinéma au canapé, même combat
Résultats, les studios qui font aujourd’hui, le pari – plus si risqué – d’une adaptation vidéoludique rencontrent bien souvent un succès commercial et critique. En 2023, « Super Mario Bros., le film », la récente adaptation du joyeux moustachu – bien plus fidèle que l’opus sortie en 1993 – s’est imposé comme le deuxième film le plus rentable au box-office mondial.
En gagnant leurs lettres de noblesse dans les salles obscures, ces projets ont également fait comprendre aux producteurs TV et aux plateformes de streaming que les jeux vidéo pouvaient être des territoires créatifs idéals pour une série. La série télévisée « The Last of Us », dont vous avez sûrement entendu parler tant elle était sur toutes les bouches à sa sortie – et c’est mérité vu sa qualité –, a même remporté une flopée d’Emmy Awards cette année. Rien de plus normal quand on considère qu’elle avait à sa tête des gens compétents et légitimes pour opérer des changements narratifs au service de l’expérience proposée… sans pour autant trahir le propos de l’œuvre originelle.
Neil Druckmann, créateur – génial – de la franchise « The Last of Us » et producteur exécutif de l’adaptation de HBO, avait ainsi expliqué au moment de la sortie que le plan n’était absolument pas de « reproduire le jeu. Je pense que si nous avions essayé, l’adaptation aurait été médiocre et surtout inférieure au jeu vidéo ». Avant de conclure « Chaque fois que vous essayez de copier quelque chose, au mieux vous l’égalerez mais le plus souvent, vous échouerez ».
The game is on
Le raz-de-marée ne devrait pas s’arrêter là. Selon le média IGN, plus de 70 adaptations de jeux vidéo sont en cours de développement pour le cinéma ou la télévision, dont certaines œuvres iconiques telles que « Zelda », « Minecraft » – qui devraient sortir l’année prochaine – et « League of Legends ». Pas plus tard que la semaine dernière, Amazon Prime dévoilait les 6 épisodes de la série adaptée de « Yakuza », un jeu vidéo iconique japonais sorti en 2005. De quoi nous amener à une précision : cette nouvelle vague d’adaptations a été en premier lieu impulsée par les plateformes de streaming telles que Netflix et Amazon Prime.
Ce sont bien les succès de séries telles que « Castlevania » en 2017 ou « The Witcher » qui ont fini par développer l’appétit des studios hollywoodiens. En effet, la majorité des franchises de comic books étaient déjà prises, notamment par Disney qui possède Marvel, il leur fallait donc trouver autre chose pour se démarquer… Un schéma qui pourrait bien se répéter avec l’essor actuel des adaptations… de mangas – pour l’instant, les résultats sont loin d’être glorieux –. Au cinéma comme sur les plateformes, rien ne se perd tant que tout se transforme.
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