Sur les magasins d’applications, Lemon8 se présente comme “un lieu où les jeunes créatifs peuvent partager une grande diversité de contenus : mode, maquillage, nourriture, voyages, articles pour la maison, animaux de compagnie et tout ce que vous pouvez imaginer !” L’angle est très consumériste, mais la ressemblance avec TikTok est frappante…
Bytedance, expert de l’IA et des algorithmes de recommandation
Car derrière cette nouvelle application, se cache en effet le chinois Bytedance, la maison-mère de TikTok, connue pour sa maîtrise de l’intelligence artificielle et son expertise dans les algorithmes de recommandation de contenus. Ce point fort se retrouve dans la description de Lemon8, qui promet à ses utilisateurs “un contenu personnalisé, spécialement conçu pour [eux].”
En quelques semaines, Lemon8 a été lancé relativement discrètement Outre-Atlantique, en bénéficiant de l’appui d’influenceurs rémunérés, ce qui lui a permis de se hisser dans le Top10 des applications les plus téléchargées sur iPhone, ce qui la met aujourd’hui sous le feu des projecteurs.
Si le lancement occidental de Lemon8 ne fait que commencer – elle n’est pas encore disponible en Europe, par exemple – cette application existe en fait en Asie depuis plusieurs années. Le site Pandaily explique qu’il s’agit d’une application destinée à prendre les devants sur l’application chinoise de social commerce Xiaohongshu (ou “Little Red Book”), qui se présente comme un sérieux concurrent pour TikTok sur son marché domestique, en reliant recommandation et achat de produits.
Plus de 17 millions de téléchargements dans le monde
Depuis 2020, Lemon8 a été progressivement lancée sur différents marchés asiatiques, en commençant par le Japon, où elle a séduit des millions d’utilisateurs. Résultat : l’application a déjà été téléchargé plus de 17 millions de fois dans le monde, selon les données d’Apptopia citées par Axios.
Comme TikTok, l’application propose aussi une section “for you”, un flux totalement personnalisé en fonction des contenus consultés précédemment, ainsi que des hashtags pour faciliter la recherche et des outils de création, avec des stickers, des filtres, des templates… Mais là où Lemon8 se distingue de son prédécesseur, c’est dans l’intégration des photos : plus qu’une nouvelle itération de TikTok, il s’agit d’un concurrent direct d’Instagram et de Pinterest, dans la forme du moins.
Un futur leader du social commerce ?
Pour l’experte du web Marie Dollé, qui édite la newsletter In Bed With Tech, il faut voir dans cette application bien plus qu’un copycat des applications occidentales. “Le principe de Lemon8 est de permettre aux gens de découvrir et de partager les choses qu’ils aiment. Alors qu’Instagram est l’endroit où l’on partage sa vie, TikTok est l’endroit où on se divertit, et Pinterest est l’endroit où on puise son inspiration. Lemon8 est davantage un croisement de Reddit et Little Red Book que d’Instagram et Pinterest”, explique-t-elle.
Et d’ajouter : “TikTok aura toujours du mal à s’imposer comme une application de social commerce en raison de son format vidéo : la mise en avant de contenu textuel et imagé est bien plus pratique pour les utilisateurs lorsqu’ils mènent des recherches. Avec Lemon8, Bytedance a une opportunité de trouver place encore plus proche de l’acte d’achat”.
Préparer la suite…
Une certitude : à l’image de Meta qui dispose d’un portefeuille d’applications (Facebook, Whatsapp, Instagram) permettant de toucher différentes générations et communautés, Bytedance a fait le choix de ne pas mettre tous ses œufs dans le même panier, en cherchant à réduire sa dépendance à TikTok et en explorant des pistes de monétisation plus large que la publicité. C’est aussi un moyen de préparer la suite, en essayant de toucher la génération suivante…
Cette stratégie pourrait se révéler judicieuse, alors que TikTok est sous le feu des projecteurs des régulateurs dans de nombreux pays. Aux Etats-Unis, un premier état, celui du Montana, vient de bannir purement et simplement l’application, citant des risques d’espionnage et de sécurité nationale. Au même moment, les critiques pointant du doigt l’impact de l’application sur la santé mentale des plus jeunes se font de plus en plus fortes…