Entreprises comme politiques cherchent à mettre en avant des femmes et des jeunes, supposés garants de leur modernité ou de leur ouverture. Mais la vraie priorité n’est pas là : le vrai enjeu consiste à réussir un réel mélange d’origines, de personnalités, de convictions. C’est ce qui rend une entreprise, et son image, crédibles et solides. Et ce n’est une question ni d’âge, ni de genre.
L’image n’en finit plus de tourner sur les réseaux sociaux : les quatre jeunes ministres finlandaises, souriantes, élégantes, toutes âgées de moins de 34 ans, suscitent des torrents de commentaires dithyrambiques. Et semblables. Thèmes principaux : « on a encore du boulot en France », et « la Finlande nous montre la voie ». Mais, sans vouloir retirer le moindre mérite à ces jeunes ministres, leur nomination date de décembre 2019. Il est donc un peu tôt pour savoir si leur arrivée va réellement changer le destin de la Finlande. Et encore plus pour affirmer que cet exemple doive guider tous les autres pays, et les sortir de l’obscurantisme anti-femmes et anti-jeunes dans lequel ils croupiraient.
Leur date de naissance.
L’épisode rappelle les commentaires lors de l’élection d’Emmanuel Macron : plus jeune président de la République Française, il représentait alors, à lui seul, le symbole d’une politique radicalement différente, débarrassée de ses « vieux réflexes ». Le tout devait, automatiquement, offrir aux citoyens un futur radieux, puisqu’inspiré par un président, mais aussi un gouvernement, munis d’un argument magique : leur date de naissance.Depuis, la réalité des sondages (et des intentions de vote aux municipales) sont là : Emmanuel Macron a perdu 32 points d’opinions favorables en 30 mois, se situant dans la même moyenne que ses prédécesseurs. Et plus personne ne parle de son âge. En revanche, les critiques fusent sur le manque de diversité culturelle, sociologique, idéologique, de son gouvernement.
C’est pour les mêmes raisons que certains secteurs de l’économie suscitent aujourd’hui la méfiance, voire le « bashing » de l’opinion : si la finance, les start-ups ou encore les médias sont accusés de tous les maux, c’est avant tout parce qu’ils sont perçus comme emplis de stéréotypes : des individus arrogants, durs, déconnectés du « terrain », ignorants des conditions de vie de leurs concitoyens. La preuve : la féminisation du journalisme, statistiquement bien réelle, n’a en rien empêché cette profession de voir son image dégringoler dans l’opinion.
S’entourer de femmes ou de jeunes issus des mêmes écoles ne suffit pas…
Pourtant, les directions de la communication des entreprises expriment toutes la même obsession : faire porter leurs messages par des femmes ou des jeunes, et idéalement les deux. Montrer qu’elles investissent dans des projets féminins. Qu’elles « incubent » des idées développées par des jeunes. Bref, qu’elles intègrent la modernité et la diversité.
Une vraie place à des diversités d’origine sociale…
C’est se tromper d’objectif. L’important n’est pas le costume, ou la robe, mais le fond du discours du dirigeant : sa vision, son courage, ses priorités. La façon dont il ou elle prend en considération les évolutions du monde qui l’entoure, et traduit ses convictions en actions. La façon également dont il ou elle est capable de diversifier ses sources d’inspiration. Ce qui ne consiste pas à embaucher des jeunes ou des femmes sortis des mêmes écoles , mais à faire une vraie place à des diversités d’origine sociale, éducative, culturelle, géographique. Et à les écouter, à intégrer leurs points de vue dans son discours comme dans ses décisions. Ce sera plus difficile, mais plus efficace pour faire évoluer son image et celle de son entreprise. Tout simplement parce que cette évolution sera basée sur des faits et des décisions concrètes. Plus concrètes que la photo de quatre jeunes femmes qui n’ont pas encore commencé leur travail de ministre – qu’on leur souhaite plein de succès, bien sûr ! Mais en tant qu’individus, pas pour ce qu’elles représentent.