Deux jeunes ingénieurs ont mis au point une plateforme qui permettra à chaque individu de connaître les données que les sites possèdent sur lui. Son nom ? Misakey. Une initiative made in France !
Les chiffres ont de quoi de donner des frissons dans le dos. Six mois après la mise en place du Règlement Général sur la Protection des Données (RGPD), deux jeunes ingénieurs, et Antoine Vadot, ont souhaité vérifier si les droits d’accès aux données personnelles étaient bien respectés en France.
Après avoir contacté plus de 400 000 sites, leur constat est accablant : seulement 1% des plateformes ont répondu à leur requête dans les trente jours. 83% des personnes interrogées n’ont pas été en mesure de leur répondre et 16% disposaient toujours, six mois après la mise en place du RGPD, d’une adresse email invalide. Parmi les 10 000 sites qui possédaient une adresse de messagerie spécifiquement dédiée aux questions liées à la vie privée, le taux de retour aux demandes des deux ingénieurs était plus élevé (17%) mais encore bien limité par rapport aux exigences imposées par le législateur. Au vu de ces chiffres, les jeunes diplômés de Polytechnique et CentraleSupelec ont choisi de créer une plateforme en ligne, baptisée Misakey, qui devrait permettre à chaque individu de connaître les données que les sites possèdent sur lui.
Un tampon entre les sites et les particuliers
« Il existe aujourd’hui plus de cinq millions de sites en France », résume Arthur Blanchon « Les deux freins qui expliquent pourquoi si peu de sites répondent aux demandes des particuliers sont qu’ils ont du mal à vérifier les requêtes qui leur sont faites et qu’ils doivent s’assurer de la confidentialité des transferts des données vers les personnes qui en ont fait la demande. Notre solution technique permet de résoudre ces deux problèmes car nous faisons le tampon entre les internautes et les sites. Les personnes nous fournissent leur adresse email et le numéro de leur portable et nous nous occupons, grâce aux technologies que nous avons développées, de contacter tous les sites qui sont susceptibles d’avoir des données sur eux. Les plateformes nous envoient ensuite les datas que nous transférons aux particuliers. Notre système de clés asymétriques nous permet de faire circuler ces données du site vers le consommateur mais nous ne pouvons pas les lire, afin de garantir la confidentialité des informations communiquées à la personne qui souhaite les découvrir ».
La demande est là
Misakey semble répondre à une attente de la part des consommateurs. Une étude, menée avec l’institut Opinion Way effectuée auprès d’un échantillon de 1060 personnes en novembre 2018, montre que 83% des Français pensent que la collecte de données est une menace pour au moins une liberté (opinion, expression, circulation, réunion, association), et 89% d’entre eux sont d’avis qu’il n’est pas possible de savoir ce que les entreprises font de leurs données. Une plateforme comme Misakey devrait donc les intéresser au plus haut point.
Après avoir effectué de nombreux tests auprès d’amis et de proches, Arthur Blanchon et Antoine Vadot ont demandé au début du mois à 1000 volontaires de s’inscrire sur leur site afin de pouvoir essayer à partir de la fin du mois de janvier une version bêta de leur programme. A la fin du premier semestre 2019, la plateforme devrait être ouverte à tous et être connectée à 100 000 sites contre 1000 aujourd’hui. Gratuit pour les particuliers et les TPE, son business model devrait se financer en proposant une version freemium aux grosses plateformes qui concentrent de nombreux utilisateurs. Ambitieux ? Certes. Réaliste ? L’avenir le dira. Mais qui ne tente rien n’a rien… En attendant, son utilité n’est pas à démontrer.