La RGPD et le scandale Cambridge Analytics en ont été les fers de lance : les entreprises et les marques doivent aujourd’hui répondre à un enjeu de sécurité et de réassurance pour leurs utilisateurs.
Si ces dix dernières années ont marqué l’avènement des marques servicielles, qui déploient des offres et tactiques toujours plus précises pour apporter une réelle utilité aux consommateurs, elles impliquent également un enjeu de confiance aux yeux des publics. Parce que les usages évoluent, parce que l’instantanéité prime et parce que la vérification est facilitée par la prolifération des sources et des accès à l’information, les marques doivent être irréprochables et rassurer leurs consommateurs, tout en continuant à leur apporter de la valeur.
RGP… quoi ?
Pour les quelques-uns qui n’ont pas ouvert les 168 mails d’entreprises communiquant leurs politiques de confidentialité, une nouvelle législation européenne en matière de protection des données (le fameux RGPD) a vu le jour le 25 mai 2018. Sous cet acronyme se cachent de nombreuses mesures qui chamboulent la manière dont nos données personnelles sont traitées par les professionnels.
Par exemple, plus de cases pré-cochées (« opt-in ») dans les formulaires d’inscription et une politique de désinscription facilitée (« opt-out »). En somme, plus de transparence, et une responsabilisation des professionnels de la data qui doivent pouvoir garantir, à tout moment, que le traitement des données est conforme, sécurisé et traçable. Alors, si cela peut sembler anecdotique en tant que particulier, parce que les services comme Amazon, Uber ou encore Deliveroo s’ancrent de plus en plus dans nos quotidiens, c’est un vrai tournant dans la manière dont les marketeurs vont devoir travailler. À tel point qu’un nouveau métier s’est même créé : le Data Protection Officer. Sa mission ? Piloter la gestion et le traitement des données au sein des multiples entreprises et marques à qui nous nous dévoilons un peu plus chaque jour. Il ne s’agit plus ici d’une question de réassurance mais d’une promesse de sécurité, qui porte un enjeu beaucoup plus structurant. Les marques vont devoir prouver leurs engagements tout en continuant à rivaliser de services innovants. Et le succès grandissant des assistants vocaux présage d’une relation de plus en plus intime entre les marques & les shoppers, et donc de garanties chaque fois plus solides.
Le service de confiance
Si nous sommes plus alertes face aux enjeux liés à nos datas, on n’en demeure pas moins demandeurs de simplicité dans l’acte d’achat. Petit à petit de nombreux services ont vu le jour pour répondre à cette attente. Et qui ne s’habitue pas à ne pas avoir à réécrire son adresse de livraison pour un achat en ligne, ou à se faire livrer ses courses pour ne pas faire la queue et gagner du temps ? Les marques l’ont bien compris, en développant des offres rivalisant de fluidité et d’instantanéité. On peut aujourd’hui faire un achat en un clic, passer par les caisses automatiques, et maintenant se faire livrer chez soi, même quand on n’est pas là ! Parce que, si l’on laisse des inconnus vivre chez soi avec Airbnb, on est potentiellement prêts à laisser des retailers venir remplir nos frigos.
Amazon Key, lancé en bêta l’an dernier, permet à ses livreurs de déposer un colis à l’intérieur d’un logis même en l’absence du propriétaire. Les tests ne sont pas encore concluants, mais le pure player continue l’effort. Et surtout, il inspire. Franprix expérimente le même service à Paris depuis avril. En s’associant à la conciergerie Clac des Doigts et à l’entreprise Oh my Keys !, les consommateurs vivent une expérience omnicanale sans couture. Mais la question de la confiance demeure. Pour y répondre Franprix offre de co-financer l’installation de serrures connectées chez les shoppers souhaitant s’initier à ce mode de livraison. Cet investissement, le retailer compte bien le rentabiliser par le lien de fidélisation inhérent à l’offre.
Le renouvellement du CRM
Dans cet enjeu de traitement de la data, le CRM prend une place prépondérante. Il devient de plus en plus complexe et onéreux pour une marque d’acquérir des données externes, ainsi il devient crucial de développer les bases de ses propres clients et donc de les inciter à revenir. Alors, on assiste à un renouvellement des politiques de fidélisation qui injectent de nouveaux bénéfices alignés aux attentes de leurs consommateurs. Domino’s Pizza valorise le multicanal en intégrant un système de points quelque soit le device utilisé pour passer commande (du smartphone à l’assistant vocal). Mais la marque intègre aussi un mini jeu accessible lors de l’attente de la livraison permettant de gagner des bonus, des coupons de réduction… Cette approche gamifiée crée une valeur relationnelle et un lien de proximité avec ses consommateurs. Une autre approche pour Uber, qui valorise ses utilisateurs les plus fréquents en créant le programme de Super Rider.
Les meilleurs clients de l’entreprise VTC auront accès aux meilleurs chauffeurs, à des avantages exclusifs, des partenariats avantageux (trois mois d’abonnement Deezer offerts par exemple) et à une newsletter mensuelle. Ce programme sélectif ne donne lieu à aucun avantage lié à l’activité même de la marque, mais permet à Uber de se démarquer face à des concurrents chaque fois plus agressifs en termes de prix. Enfin, les distributeurs alimentaires tels que Monoprix, U ou encore Intermarché ont tous communiqué sur leurs nouveaux programmes de fidélité au cours de l’année précédente. Ils rivalisent d’arguments et d’avantages alignés à leurs politiques RSE : l’un offrant 10% sur les produits bio, l’autre offrant 20% aux jeunes parents sur les produits enfants… Les offres s’écartent pour éviter les comportements multi-cartes, rendre captifs les consommateurs et ainsi enrichir les bases de données qualitatives afin de développer leur marketing relationnel.
Devenir une trust brand
Les marques endossent différents rôles auprès des consommateurs : on connaissait la love brand, qui a réussi à développer une relation affective profonde avec ses consommateurs. Michel & Augustin, Apple, Nike, Innocent ou encore Dove ont réussi ce pari grâce à diverses stratégies. Certains jouent sur l’humour et la complicité, d’autres sur des valeurs fortes d’égalité et d’universalité, puis on voit aussi ceux qui se posent comme un marqueur social, une manière d’exprimer un pan de sa personnalité…
On a aussi connu les do brand, des marques qui s’engagent et le revendiquent, qui transcendent leur fonction marchande pour prendre position. C’est l’exemple de Budweiser qui transforme ses cannettes de bières en packs d’eau à envoyer aux victimes de catastrophes climatiques, c’est le cas d’Airbnb qui manifeste pour l’égalité, c’est aussi le cas de Nestlé qui développe un programme mondial U4HK pour le mieux-manger… Aujourd’hui, il faut envisager la trust brand, qui émerge de cette nouvelle relation entre société, législation et données personnelles. Les marques doivent communiquer leur honnêteté, leur transparence. Et cela se fera sous différentes formes également : on imagine des discours pédagogiques, des approches de certification… Mais la pierre angulaire, l’élément le plus important restera le fond : la preuve apportée aux consommateurs.
What if :
Et si, une enseigne de distribution proposait à ses clients encartés une expérience sans data pour leur montrer tout ce qu’apporte la connaissance client dans la dimension affinitaire des offres et des services ?
Et si, une marque ou une enseigne mettait à la disposition de ses clients un expert en protection des données pour l’aider à comprendre ce qu’il doit faire ou ne pas faire sur les réseaux sociaux et sur le web pour protéger ses données personnelles ?
Et si, une marque ou enseigne n’ayant pas de programme CRM, lançait une gamme de produits « Data Free », qui promet de ne jamais engranger de données personnelles, le communique on-pack et qui ainsi se démarque de sa concurrence ?