INfluencia : Votre coup de cœur ?
Magali Florens : c’est mon récent voyage de 12 jours à Zanzibar. J’ai adoré cette île – en fait c’est un archipel mais j’étais sur l’île principale – au milieu de l’océan Indien, ses couleurs et ses tonalités qui vont du turquoise au bleu foncé, son sable blanc, ses différentes végétations ultra luxuriantes, cette petite ville de Stone Town qui a été sous influence arabe, indienne, africaine, sa Medina, ses vieux bâtiments déglingue charmants et des gens adorables. Il y fait tout le temps beau et franchement s’il y avait une définition du paradis sur terre ce serait là-bas. On a envie de faire des photos toutes les trois minutes. J’adore voyager, c’est une de mes passions et cette ile est absolument magnifique et encore très préservée, il n’y a pas trop de touristes, même si on en a un peu parlé car c’est là qu’est né Freddie Mercury. C’est vraiment un gros coup de cœur dans mon top 10 de voyage.
Quelle mauvaise image on envoie à l’international!
IN: Votre coup de colère ?
M.F. : ce sont les JO à Paris. Je ne suis pas du tout accro aux sports et en particulier les sports spectacle, mais je suis ultra chauvine en ce qui concerne les JO à Paris, enchantée que ça se passe chez nous. C’est un moment unique, il y a des gens qui jamais dans leur vie n’auront une nouvelle fois l’occasion d’assister aux JO chez eux. Mais on est passé carrément de Charybde en Scylla. J’ai été tirée au sort pour obtenir des billets, ça m’a coûté une fortune pour pouvoir assister à du foot, de l’escrime et de la lutte. Et le coup de massue c’est quand j’ai vu le prix de la cérémonie d’ouverture, parce que j’ai de nouveau été tirée au sort pour la deuxième étape d’achat avec des billets mis en vente à 2700 euros. Donc je me demande comment vont faire les gens pour assister à ce qui devait être un grand événement populaire pour l’ensemble des Français. Sans parler de ce qu’on lit sur la paralysie de Paris, sur l’augmentation des prix de transport, sur le fait que de toute façon à un moment donné les transports seront fermés et que l’on ne pourra pas circuler. Ce dont je me faisais une joie devient un cauchemar et je suis en train de me poser la question de revendre mes billets et de partir. Donc je suis très en colère notamment contre Madame Hidalgo et les organisateurs. J’espère que les choses vont s’arranger au fur et à mesure que on s’approchera de l’événement et que les grands travaux seront terminés d’ici là. Mais c’est quand même dans 5 mois… Quelle mauvaise image on envoie à l’international !
J’ai réalisé qu’il y avait des choses graves dans le monde qui étaient à la porte de la maison
IN. : La personne ou l’événement qui vous le plus marqué dans votre vie.
M.F. : je vais parler de deux événements, en l’occurrence pas très drôles mais qui n’arrivent pas à tous les petits Français. Mon père travaillait dans le pétrole et il emmenait sa famille à chaque fois dans ses expatriations et j’étais en Irak au moment de la guerre du Kippour, j’avais 8 ou 9 ans. Nous n’étions pas sous les bombardements mais il y avait le couvre-feu à Bagdad, les phares des voitures étaient peints en bleu… Pour une petite française comme moi qui avait grandi en France jusqu’à l’âge de 7 ans, la guerre c’était ce que me racontaient mes grands-pères qui étaient lorrains. Et je pense qu’à ce moment-là, j’ai pris conscience que la vie n’était pas un long fleuve tranquille. J’ai réalisé qu’il y avait des choses graves dans le monde qui étaient à la porte de la maison et que pour autant elles n’empêchaient pas de vivre au quotidien. J’ai revécu la même chose en Angola. j’étais beaucoup plus vieille, j’avais 16 ans. C’était à la fois la guerre civile et la guerre contre l’Afrique du Sud. Même situation : couvre-feu, on ne pouvait pas sortir de la capitale Luanda au-delà de 30 km, il y avait régulièrement des tirs de kalachnikov dans le quartier, des attentats contre les raffineries, etc. Là encore nous étions dans un pays en guerre, mais nous savions que si nous étions prudents et respections les interdictions, tout se passerait bien.
Ce qui est formidable, c’est la capacité d’adaptation de l’être humain à des situations qui peuvent être considérées comme extrêmes, et invivables pour certains et supportables pour d’autres. Mais en tout cas sans vouloir jouer à Causette, ce sont deux épisodes de ma vie, qui je pense, m’ont un peu structurée, ont forgé mon caractère, ma façon de vivre et de m’adapter.
Si c’était à refaire, je pense que j’aurais travaillé en Asie
IN.: Si c’était à refaire ?
M.F. : Je referais ma vie à l’étranger. J’ai grandi en partie hors de France avec mes parents. J’ai fait une école avec un cursus international, j’ai passé ma dernière année au Japon et aux Etats-Unis avec l’ISG.
Pendant très longtemps, j’ai eu mon passeport dans mon sac, en me disant que si un jour j’avais envie à l’improviste de prendre un taxi et de partir à l’aéroport et m’envoler, je pourrais le faire. Je ne l’ai jamais fait mais j’adore voyager dès que j’ai un peu de temps. En l’occurrence, c’est ce que j’ai fait pendant mon année off (ndlr : Magali Florens a quitté la présidence de l’agence média Mindshare en janvier 2023 avant de rejoindre l’UDECAM en décembre).
Et pourtant, je n’ai jamais pris mes valises pour aller m’installer ailleurs. Peut-être était-ce la rançon d’une enfance un peu un peu mouvementée sans racines au fur et à mesure des déménagements. A partir du moment où j’étais arrivé à Paris, je n’ai plus bougé. Aujourd’hui je me dis que c’est dommage et si c’était à refaire, je pense que j’aurais travaillé en Asie qui est un continent que j’adore, à Singapour, Bangkok ou Hong Kong. En plus, par rapport à mon métier, j’aurais appris beaucoup, j’aurais eu un temps d’avance.
Le fait d’être choisie par mes pairs, qui ont été mes plus grands concurrents, est ma plus belle réussite
IN.: Votre plus grande réussite
M.F. : C’est ce job. Le fait d’être choisie par mes pairs, qui ont été mes plus grands concurrents pendant des années, est ma plus belle réussite. Cela récompense une carrière et une expérience. J’en suis très heureuse, très reconnaissante et très fière.
J’étais le vilain petit canard dans la famille
IN. : Votre plus grand échec
M.F. : c’est quelque chose qui est plus qu’un deuil familial (rires). En fait, c’est de ne pas être allée à HEC. Ma mère en rêvait et j’ai juste fait l’ISG, alors que ma sœur aînée a fait Supelec et ma petite sœur est médecin. Donc j’étais le vilain petit canard dans la famille. C’est peut-être pour cela que je suis devenue patronne d’agence, pour prouver que moi aussi j’étais capable…
IN. : Qu’appréciez-vous le plus chez vos amis ?
M.F. : leur sincérité et leur honnêteté vis-à-vis de moi, c’est-à-dire qu’ils vont à la fois régulièrement me remettre les pieds sur terre avec des mots qui peuvent être durs mais sincères et puis un autre jour me porter dans les étoiles. J’ai plein de copains. Je ne suis pas mariée et je n’ai pas d’enfant et mes amis c’est ma famille. Je n’ai pas de copains d’enfance parce que nous avons beaucoup bougé mais mon plus vieux copain que j’appelle « mon frère » est mon binôme libanais de colle de prépa. C’est mon Jiminy Cricket.
IN. : le plus joli compliment qu’on vous ait adressé.
M.F. : pour faire joli dans l’interview, je pourrais répondre : « si tu n’existais pas, il faudrait t’inventer » (rires). Mais le plus joli compliment récent, est celui d’un petit-petit neveu de 6 ans que j’adore qui s’appelle Gabriel. L’autre jour, avec son papa et sa maman, on parlait d’âge. Il demande à son père : « quel âge as-tu papa » ? « 36 ans ». Silence, « et 60 c’est vieux ? » Je le regarde et lui dis : « tu sais, Magali elle va bientôt avoir 60 ans. Tu trouves que je fais vieille ? ». Et là spontanément, grand cri : « Oh non ! ». Un compliment de petit enfant avec les yeux de l’amour…
IN. : quel objet emporteriez-vous sur une île déserte ?
M.F. : un masque et des palmes. Car je plonge en bouteille. J’adore ça. Je pense que c’est un des états dans lesquels je suis le plus à l’aise, le plus zen, en apesanteur, dans le moment présent. Il m’est d’ailleurs arrivé quelque chose de formidable à la fin d’une plongée à Zanzibar. Je me suis retrouvée au milieu d’une horde de bateaux qui venait jeter des touristes à l’eau et qui traquait les dauphins. Moi j’étais au milieu de l’eau, les dauphins ont dû avoir peur et trois d’entre eux ont sauté à côté de moi, j’ai juste eu le temps de remettre mon masque pour les voir partir, c’était extraordinaire.
Donc sur l’île déserte, que j’imagine bien sûr au milieu d’un océan bleu pacifique avec du sable blanc, des jolis coraux, une faune hyper vivante des tortues, des raies Manta, des dauphins, des petits requins à pointes noires. Et j’irais plonger tous les jours pour voir tout ça, je ramasserais quelques oursins au passage. Et avec une bonne bouteille de blanc (rires), je me ferais des oursinades.
Et puis, le jour où j’aurais envie de quitter l’île, le masque et les palmes me seraient bien évidemment très utiles.
* l’Hôtel Littéraire Le Swann, situé au cœur du quartier historiquement proustien de la plaine Monceau et de Saint- Augustin, présente une collection d’œuvres originales sur l’écrivain ainsi que des pièces de haute couture, des photographies, des tableaux, des sculptures. Notre interviewé(e) pose à côté d’une sculpture de Pascale Loisel représentant bien sûr l’auteur d’« À la recherche du temps perdu »
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L’actualité de Magali Florens
– l’actualité professionnelle : les prochaines rencontres de l’UDECAM le 12 mars sur «Talents, Expert, Valeur… We are a people business »
– l’actualité personnelle : la construction d’une maison dans les Cyclades à Milos. « J’ai acheté un terrain, j’ai mon permis de construire donc j’espère démarrer rapidement les fondations, même si le rythme n’est pas le même là-bas… »