27 octobre 2023

Temps de lecture : 3 min

Paul Lé : « Frichti a dix fois plus d’awareness que La Belle Vie »

Alors que les acteurs du “quick commerce” amassaient des centaines de millions d’euros, Paul Lé, le fondateur de La Belle Vie ne levait “que” 25 millions d’euros. Pourtant, aujourd’hui, le petit poucet est l’un des seuls survivants sur le marché de la livraison de courses à domicile. Il se paye même le luxe de s’offrir Frichti pour moins de 500 000 euros…

La Belle Vie a beau être un acteur discret de l’e-commerce alimentaire, il commence à peser dans le paysage : il compte désormais plus de 500 collaborateurs, pour un chiffre d’affaires annuel compris entre 70 et 80 millions d’euros. Sa zone de chalandise se limite à la région parisienne, avec un assortiment de 30 000 produits, livrés le jour même. Une stratégie diamétralement opposée à celle des Getir, Flink, Gorillas, Frichti, Cajoo ou Gopuff qui ouvraient en 2021/2022 des “dark stores” à marche forcée sur tout le territoire, pour livrer leurs clients en moins de 15 minutes.

« Seulement » 25 millions levés

Alors qu’avec la pandémie, les millions commençaient à pleuvoir sur le secteur du “quick commerce”, le fondateur de l’entreprise, Paul Lé, a préféré jouer la prudence, se contentant d’une levée de fonds de 25 millions d’euros en décembre 2021, pendant que la startup allemande Flink levait 750 millions de dollars, le turc Getir 768 millions et l’américain Gopuff 1,15 milliard… 

Aujourd’hui, le contexte macro-économique mondial a radicalement changé et les concurrents de La Belle Vie dans l’hexagone ont pour la plupart mis la clé sous la porte… À une exception près : Flink, dont la filiale française a été reprise à la barre du tribunal par son ancien directeur général en septembre 2023. La Belle Vie, elle-même a rapidement renoncé à la livraison en 15 minutes, testée par sa filiale dédiée au “quick commerce”, Bam Courses

Lors du Foodtech Festival, à Nantes, Paul Lé est revenu sur son aventure et sur les raisons de la pérennité de son entreprise. “On a tout fait en termes de marketing, de RH et de logistique pour être rentables. C’est notre obsession à la rentabilité qui fait qu’aujourd’hui, on est le seul acteur francilien qui livre le jour même à être encore en vie”, explique-t-il, plein de bon sens. 

Frichti, « une belle marque »

C’est d’ailleurs à la faveur de la liquidation des activités françaises du Turc Getir – qui s’était porté acquéreur de l’Allemand Gorillas fin 2022, lui-même acheteur du Français Frichti en janvier 2022 – que La Belle Vie a pu s’offrir ce qui restait de Frichti. Le prix ? 30 000 euros, plus 450.000 euros pour la reprise des stocks de l’entreprise. 

“La marque est belle, elle a dix fois plus d’’awarness‘ que La Belle Vie. On a commencé tous les deux en 2015, à peu près avec la même intuition. Mais l’exécution a été différente. Ils ont poussé beaucoup plus le jeu de la start-up, c’est-à-dire lever de l’argent, dépenser en marketing, créer une marque”, explique l’entrepreneur. À l’inverse, La Belle Vie a préféré miser sur une économie de moyen et concentrer son énergie sur la technologie et l’excellence opérationnelle. Un choix qui paye aujourd’hui.

Partenariats avec La Grande Epicerie et Système U

Avec cette acquisition, la startup va pouvoir se diversifier sur de nouveaux marchés, comme les cantines d’entreprise. Mais sans pour autant renoncer à son pragmatisme habituel : avant d’envisager un déploiement de son offre de livraison de courses hors de l’Ile-de-France, La Belle Vie préfère continuer à consolider ses bases, notamment logistiques et technologiques.

Le savoir-faire de la startup en la matière a d’ailleurs été récemment reconnu par La Grande Epicerie, filiale de LVMH, qui lui a confié la gestion opérationnelle de son service de livraison à domicile. En outre, depuis cinq ans, La Belle Vie a noué un partenariat avec Système U, pour pouvoir distribuer ses produits de marque distributeur.

Un gagnant : Uber Eats

“Avec le recul, on voit que les clients du quick commerce sont opportunistes, pas très fidèles. Ce sont des étudiants qui vont essayer de manger pour pas cher. Ce sont des clients que je ne veux pas encore. Les clients de La Belle Vie, c’est une famille, 3-4 personnes, avec de gros paniers moyens pour pouvoir rentabiliser tous nos frais de structure”, estime l’entrepreneur. 

Il juge toutefois que dans ce paysage, émerge un vainqueur : Uber Eats. “Le grand gagnant, c’est Uber Eats. Aujourd’hui Carrefour fait de la croissance en e-commerce grâce à Uber Eats. Mais est-ce qu’on a envie de devenir le dark store d’Uber Eats ?” Manifestement non : “on n’a pas fait tout ça pour en arriver là”, conclut-il.

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