26 mai 2009

Temps de lecture : 2 min

Paradoxales valeurs!

Chaque jeudi, retrouvez les meilleurs penseurs en marketing et communication et leurs analyses sur la société. Cette semaine Monique Wahlen, directrice générale de l'agence Draftfcb et chercheur en sciences de l’information et de la communication.

« Oui, les Français en ont encore », comme le prouve la livraison 2008 de l’étude sur les valeurs des francais, réalisée par ISL

– Premier constat : l’émergence d’une tendance généralisée au paradoxe qui se concrétise au travers de « couples dialectiques », c’est-à-dire   de la coexistence de valeurs habituellement opposées…

– « Individualisation croissante / aspiration grandissante au collectif ». Ce qui lève la fausse assimilation entre individualisation et individualisme. Un même individu peut revendiquer une individualisation de ses pratiques (en termes de liberté et d’autonomie) tout en manifestant un besoin de collectif.

–          Idem pour le couple  « fierté nationale / tolérance », qui prouve que le développement  de revendications territoriales n’entraîne pas forcément la xénophobie, mais cohabite de plus en plus avec une acceptation des différences.

–          Quant au duo « liberté privée / ordre public », il démine les simplifications outrancières concernant une pseudo montée du moralisme. Vouloir une liberté totale dans ses choix privés n’empêche pas d’exiger des règles de vie communes dans la sphère publique.

Ce phénomène de contradiction et de paradoxe constaté depuis longtemps dans le comportement des individus, se retrouve donc plus profondément dans leur système de valeurs qui lui aussi devient complexe, situationnel et relatif.
• Deuxième constat : la surprise due à la distorsion entre le bruit ambiant qui émane de nos sociétés en période de crise et la réalité du paysage mental des français. Autrement dit, l’impression d’une forte dissociation entre le discours dominant des politiques/médias/entreprises et la pensée individuelle.

– La demande d’égalité prime sur celle de liberté. Une telle attente de protection de l’individu par l’Etat a de quoi surprendre dans un contexte idéologique largement néolibéral.

– La valeur travail supplante la valeur argent. Contrairement aux multiples thèses sur la fin du travail et/ou de l’épanouissement au travail, il apparaît qu’il reste une valeur structurante alors que l’argent perd de son pouvoir existentiel.

– La consommation résiste à la crise. Même si le contexte est à la restriction, il semble que certaines consommations demeurent, soit par effet d’aubaine soit par besoin de défoulement.

De cette  adoption de valeurs paradoxales censées compenser mutuellement leurs effets excessifs, il ressort un enseignement incontestable : la défiance croissante vis-à-vis de l’économie de marché. Or nous faisons partie des acteurs associés à cette économie. La question se pose alors  frontalement : comment faire face à une critique aussi déstabilisante ?

Monique Wahlen, directrice générale Draftfcb et chercheur en sciences de l’information et de la communication.

 

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