29 mai 2024

Temps de lecture : 4 min

Outlook 2024 : et si la monoculture prenait sa revanche ?

Quatrième épisode des cinq tendances émergentes, qui pourraient transformer les usages et les comportements des consommateurs demain, analysées par IPG MediaLab, le laboratoire de recherche technologique et créative d’IPG Mediabrands. Dans ce nouvel Outlook, il est question des évolutions de contenus audiovisuels, de leur production, de leur personnalisation et de leur consommation et des conséquences sur les comportements. Avec un éclairage sur la tendance forte pour les expériences événementielles qui favorisent le sentiment d’appartenance.  

Les rythmes micro et macro de nos vies évoluent et forgent une nouvelle tendance, que nous avons pu observer depuis le début de la pandémie : l’importance de l’unification des événements culturels. Au-delà d’être un écho au désir d’union, c’est aussi une tendance qui s’est développée depuis des années. En effet, si la pandémie a pu cristalliser ce désir pour de nombreux consommateurs, il s’agit d’une réponse aux années de “niche-ification” de notre écosystème médiatique. Alors que le phénomène du « cord-cutting » (abandon de la télévision par câble) est devenu la norme, et que de plus en plus de contenus télévisuels sont consommés à la demande, le « prime time » a commencé à ressembler aux jours heureux de Twitter : même si tout le monde dans votre communauté était branché et regardait à peu près au même moment, il y avait des dizaines de communautés parallèles absorbées dans des programmes différents, ignorant complètement les rebondissements de votre groupe de discussion sur la télé-réalité ou le cliffhanger de votre série.

Quand TikTok se réinvente…

Les réseaux sociaux se transforment et se réinventent, à l’image de TikTok. Ils deviennent moins “sociaux” et plus “médias”, dont le modèle user generated content (UGC) a pour but principal de divertir, sans se soucier de nos relations sociales profondes. Nous considérerons souvent les réseaux sociaux et les chaînes traditionnelles comme la télévision de façon séparée, pourtant ils tendent de plus en plus à converger. Aucun créateur TikTok n’a encore produit quoique ce soit qui se rapproche des grandes séries HBO ou Netflix, mais grâce à l’amélioration continue des photophones et des outils d’édition vidéo, de plus en plus d’UGC remplissent les mêmes fonctions que la grande majorité des contenus télévisés : clips façon télé-réalité, des shorts plus drôles que certains sketches à l’ancienne, et des moments de vies qui buzzent plus que les faits divers locaux. Ce type de contenus commencent déjà à être dopés par l’IA générative.

Quelle équation entre IA et contenus qualitatifs ?

Internet s’est construit sur un modèle de « distribution marginale nulle » (zero marginal distribution). Partager autant d’actualités, de chansons, ou de vidéos que l’on souhaite, et gratuitement. Le business modèle de l’industrie des médias en a été bouleversé et nous a poussé à créer de la valeur autrement. Aujourd’hui, l’IA générative inaugure l’ère de la « création marginale nulle », où les ressources nécessaires à la production de contenus seront proches de zéro. Il faudra encore beaucoup de temps pour que l’IA soit capable de générer des contenus qui rivalisent avec les meilleures créations culturelles – chansons, films et romans- qui nous surprennent et révèlent des vérités communes sur les êtres vivants. Mais, encore une fois, la grande majorité des contenus consommés chaque jour sont loin d’être qualitatifs. Alors imaginer une plateforme boostée à l’IA capable de créer des contenus véritablement personnalisés en fonction de nos goûts et de nos humeurs est encore très utopique.

L’événementiel sur le podium

Ce futur proche ne fait que souligner une tendance que nous voyons déjà dans les médias : avec un inventaire d’espaces plus que jamais fourni, pour ne pas dire infini, le meilleur moyen de se démarquer et d’attirer l’attention reste l’événementiel. Ils sont si uniques et rares que les audiences feront tout pour y accéder. La diffusion télévisuelle et live des grands événements sportifs en est le meilleur exemple, avec un grand nombre d’abonnés payants encore aujourd’hui. Mais il n’y a pas que le sport : l’été dernier, le phénomène “Barbenheimer” a transformé le succès de deux films en un événement culturel. Des millions de personnes sont allées au cinéma, non pas pour revoir leur jouet d’enfance favori ou pour en apprendre plus sur le père de la bombe atomique, mais pour prendre part aux conversations, pour avoir une opinion sur ce dont tout le monde parle.

La clé du succès pour transformer une opportunité media en événement est le fameux FOMO (Fear of missing out, ou la peur de manquer). Pour les événements sportifs, les cérémonies ou la télé-réalité, cette sensation est remplie par le live : même un individu avec un intérêt modéré est plus susceptible de consommer un contenu pour le simple fait de ne pas manquer « l’immanquable », ce bout de contenu dont tout le monde va parler. Car ce sera le sujet de conversation à aborder et partager avec son réseau. Pour les médias non-live, comme un film ou un nouvel album, le sentiment de FOMO peut être créé par son omniprésence (même si ce n’est pas le cas). Barbie a atteint cet objectif avec une préparation minutieuse du week-end de sortie avec des mois de collaboration, donnant l’impression que chaque partenaire était totalement investi – bien avant que qui que ce soit d’extérieur au studio n’ait vu le film. Oppenheimer a su tirer profit de cette popularité pour donner l’impression de monopoliser l’intérêt. Le désir d’appartenance est également très fort, preuve en est avec les records d’affluence aux concerts de Taylor Swift ou Beyoncé.

La pause-café a longtemps été la source d’information et le déclencheur de l’envie de regarder un film ou une série, et restera tendance. Face à une IA qui va multiplier les contenus et inonder nos fils d’actu, le salut viendra de la création d’expériences événementielles par l’homme.

Et si la nature artisanale de ces expériences sera un élément clé, c’est le sentiment d’appartenance qui nous incitera à venir, et à revenir.

 

IPG Mediabrands

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