Partager, participer, améliorer. Les maître-mots de l’open source sortent du cadre pour s’appliquer à tout un tas de domaines. Créant des communautés de créateurs, de contributeurs et de consommateurs qui parfois ne font plus qu’un. Un modèle industriel déjà en marche qui révolutionne la société.
L’open source, initialement réservée au monde de l’informatique -et qui donne une indépendance technologique à moindre coût tout en permettant à n’importe qui (programmeur et grand public) de relire et réformer un logiciel dont le code est en libre service- s’est peu à peu appliqué à des domaines comme la médecine ou la pharmacie (prévention, épidémie, pays pauvres…). Aujourd’hui sa démocratisation est complète, car son modèle -basé sur l’effort de collaboration et de partage pour améliorer les changements d’un système- correspond parfaitement aux attentes de notre société en pleine mutation technologique, totalement décloisonnée et à l’affût des nouveautés et des économies d’échelle.
Et alors que ce concept semble utopique tout droit sorti de la tête de quelques idéalistes, l’homogénéité de ses applications et les exemples de plus en plus nombreux laissent penser qu’il a un réel avenir déjà adopté dans bien des domaines. Tout simplement parce que tout en affichant des apparences non conformistes, il fonctionne selon un seul et même principe, donc simple à adopter. Mais aussi parce qu’il modifie radicalement la façon de travailler. Ouvrant les esprits sur des valeurs comme créativité, liberté, personnalisation, valorisation humaine et monétaire, local, progrès, autonomie, libre arbitre, investissement maîtrisé, internationalisation… Et forcément cette révolution à la fois individuelle et industrielle plaît. Car avec lui on entre dans la galaxie de tous les possibles pour s’approprier un produit en tant que créateur/contributeur et/ou client/consommateur. On reprend la main et c’est plutôt jubilatoire.
L’open minded, le préalable à l’open source
Mais pour bien en profiter, il faut aussi se préparer à être « open minded ». En effet, son fonctionnement impose un état d’esprit auquel notre société ne nous a pas vraiment entraînés. Car notre norme est de tout baliser par la loi du secret, de la propriété industrielle et des brevets ou les copyrights comme Marcel A. Wienbenga de l’agence Sizzer Amsterdam l’a récemment déploré dans INfluencia. Ainsi, il faut accepter de ne plus protéger ses connaissances et de les partager. Et sans appréhension car au lieu de monter sur ses ergots et de se replier sur ses petites découvertes, en s’ouvrant à une communauté, on enrichit son pré carré, on fait rayonner son invention ailleurs et elle peut s’épanouir dans des formes auxquelles on n’a pas pensé. C’est la force d’une communauté dont on ne doit plus avoir peur. De plus, avec cette dernière -garante d’un processus en réseau ouvert et diversifié- on sort des standards parfois sclérosants de l’entreprise qui gère tout. Ici, les autres à tous les niveaux deviennent un atout reléguant le management en silo aux oubliettes tandis que la quête du consensus s’impose grâce au participatif. Enfin, c’est l’occasion de voir son produit happé par un autre groupe n’importe où dans le monde qui va l’adapter localement à ses besoins avec d’autres moyens ou matériaux. C’est une façon de sortir de l’uniformisation ou de la standardisation qui rend si soporifique nos intérieurs, nos villes, nos pays, nos pensées.
Concepteur, contributeur et consommateur reprennent la main pour ne faire plus qu’un
En ouvrant autant de champs, le modèle bouscule et a même de quoi affoler. Car on n’a pas forcément les compétences ou le temps de concevoir son propre contenu. Pourtant s’y impliquer et participer ne sont pas si compliqués quels que soient son statut, ses ressorts ou ses objectifs. D’autant qu’en général tout est pensé dans une communauté pour que ce soit fluide et facile avec un processus clairement énoncé et accepté. Résultat, en qualité de client/consommateur pour en faire partie et/ou l’enrichir, il suffit de se documenter sur une communauté en particulier, son organisation, ses buts… puis d’utiliser ou d’essayer ses projets, voire de financer un créateur via une plateforme de crowdfunding.
Et très vite cette étape pousse certains à retourner le compliment à la communauté qui les aura aidés en devenant à leur tour contributeurs sinon concepteurs ou créateurs. Car leur expérience leur a donné confiance et les a valorisé. Et comme ils se sentent respectés, ils ont envie de la faire vivre et de séduire d’autres participants en jouant les tuteurs (mode d’emploi, fournisseurs, outils, traduction…), en délivrant des conseils, en apportant des idées et des améliorations.
L’occasion ainsi peut-être d’imaginer à son tour soit son propre contenu soit à partir de l’existant une fonctionnalité, un outil, un document. Et ainsi devenir un moteur en s’entourant de sa propre équipe, de générer sa start-up ou un autre groupe d’utilisateurs plus local qui s’imposeront comme une « source ». On est vraiment dans un schéma très vertueux condition sine qua non pour la croissance et la crédibilité de la communauté.
Toutefois, pour que celle-ci survive et soit autonome, elle ne doit pas être une sangsue pour les créateurs. Pas question pour eux d’abandonner « leur bébé » ou de ne pas en tirer un revenu. Ainsi pour que ce système soit une réelle opportunité de relations humaines, d’avantages financiers et d’échanges de talents, ses animateurs doivent veiller à des éléments comme l’intégration du groupe dans la gouvernance pour favoriser les initiatives et une bonne communication (statuts appropriés, documentation réactualisée) afin de séduire par le respect. Un terrain fertile car déjà -crise et évolution des mentalités obligent !- les sociétés migrent vers une économie de partage qu’il s’agisse de co-voiturage, de cohabitation ou de colocation… Le train pour braver les modèles obsolètes est bien en marche !