Octobre Rose: les métastases commencent enfin à dévoiler leurs secrets
C’est un grand jour pour le champ de l’oncologie médicale. Après plusieurs décennies à garder farouchement tous leurs secrets, les métastases, et les mécanismes qui les encouragent, commencent enfin à être décortiqués par des chercheurs de l’université de Cambridge. Une excellente nouvelle qui tombe à pic alors que nous sommes actuellement en plein Octobre Rose, à savoir le mois de la sensibilisation au cancer du sein.
Plus que le mal du siècle, le cancer – sous toutes ses formes – est sans conteste celui de toute une civilisation. Il trône aisément au sommet de la hiérarchie des maux qui colonisent notre esprit pour s’imposer, en quelque sorte, comme le mal incurable par excellence. Depuis 1985, les Français ont l’habitude de voir déployer à la fin de l’année civile une importante campagne de sensibilisation au cancer du sein, aussi appelé Octobre Rose. Alors que nous avons de moins en moins de difficultés à regarder le mal, ou n’importe quel cancer, dans les yeux et même à oser demander de l’aide quand nous en sommes victime, beaucoup d’entre nous semblent avoir déjà tiré un trait sur l’opportunité de les voir éradiqués de leur vivant. Il faut dire que les chiffres ne prêtent pas à l’optimisme.
À l’origine de près de 10 millions de décès en 2020 selon l’OMS, soit presque un décès sur six – !!! –, le cancer est l’une des principales causes de mortalité dans le monde. Une situation qui ne va pas en s’améliorant puisque de nombreux chercheurs s’enjoignent à dire qu’au cours des dernières décennies, de plus en plus d’adultes de moins de 50 ans – jusqu’à présent la tranche d’âge la moins à risque – se mettent à développer un cancer de divers organes – essentiellement du sein, du colon, de l’œsophage, de la vésicule biliaire, des reins, du foie, de la moelle osseuse, du pancréas, de la prostate, de la thyroïde ou de l’estomac –. Si l’utilisation accrue des programmes de dépistage a quelque part contribué à cette explosion statistique, nul ne peut douter qu’une véritable augmentation de l’incidence des formes précoces de plusieurs types de cancer semble également avoir émergé.
L’heureux début de la fin
Alors certes les nouvelles semblent peu réjouissantes. Mais l’objectif de ce papier n’est certainement pas de vous démoraliser. Il y a Pascal Praud pour ça – une balle perdue, oui –. Et pour cause : des chercheurs basés à Cambridge viennent d’annoncer en grande pompe avoir décodé la plus mystérieuse et la plus meurtrière des caractéristiques de la maladie : celle des métastases. Ces dernières permettent aux cancers de se propager dans tout l’organisme en esquivant nos défenses immunitaires et les meilleurs traitements médicaux. Bien qu’elles soient l’une des principales causes de décès par cancer, nous ignorons encore beaucoup de choses sur les métastases. Mais aujourd’hui, des chercheurs du CRUK – Cancer Research UK –, hébergé dans l’université de Cambridge en Grande Bretagne, ont découvert un mécanisme à même d’expliquer leur origine et leur fonctionnement.
« Le développement de thérapies anti-métastatiques s’est avéré difficile parce que les cibles des tumeurs primaires qui provoquent les métastases sont généralement difficiles à trouver », a expliqué Eric Rahrmann, post-doctorant dans le laboratoire du responsable de l’étude, Richard Gilbertson, au moment de la publication de l’étude. Comme il l’a détaillé au magazine Freethink, les capacités d’adaptation des tumeurs et leur microenvironnement protecteur – une sorte de bouclier qui favorise leur croissance et entrave la capacité de l’organisme à les combattre – ont contribué à rendre les mécanismes des métastases insaisissables. Et c’est là que nos deux chercheurs – et leur équipe – rentrent en jeu. Leurs travaux ont permis d’identifier une protéine cellulaire appelée NALCN qui agit comme un « régulateur clé » des métastases.
Une découverte qui pourrait changer la donne
Pour vous éviter le jargon scientifique, l’élimination ou le blocage de l’activité de NALCN chez les souris atteintes d’un cancer « a considérablement augmenté le nombre de cellules tumorales circulantes et de métastases », écrivent les auteurs dans leur article. L’étude bouleverse également l’idée que l’on se fait généralement des métastases, à savoir qu’il ne s’agit que d’une astuce cancéreuse, car il s’avère que les cellules saines peuvent également passer d’un organe à l’autre. Lorsque le NALCN a été bloqué chez ses souris qui n’ont jamais développé de cancer, les chercheurs ont constaté que des cellules saines avaient également libérées et circulaient dans tout leur organisme. Ils ont, par exemple, pu observer des cellules pancréatiques saines migrer vers les reins et se transformer par la suite en cellules rénales saines. « Ces résultats sont parmi les plus importants obtenus par mon laboratoire depuis trois décennies », a déclaré fièrement Richard Gilbertson.
On peut le comprendre : « Non seulement nous avons identifié l’un des moteurs, jusque-là insaisissable, des métastases, mais nous avons également bouleversé la compréhension courante de ce phénomène, en montrant comment le cancer détourne les processus des cellules saines à son avantage ». Si elle est confirmée par d’autres recherches, cette découverte pourrait, à terme, servir à développer un traitement afin de ralentir, voir carrément stopper, les métastases. Sans oublier d’ouvrir la voie à l’exploitation de nos propres cellules pour réparer les organes endommagés. « Une étude plus approfondie de ce processus pourrait permettre de mieux comprendre comment exploiter nos réserves internes de cellules souches qui résident dans un grand nombre de nos organes, afin de les mobiliser dans tout l’organisme pour nous réparer », explique M. Rahrmann.
Une bonne nouvelle en entraine une autre.
Quand on vous disait que les choses bougeaient dans la bonne direction. Alors certes, la découverte de ces messieurs, quoi que primordial, a encore un peu de chemin à faire avant de pouvoir réellement bouleverser la donne. En attendant, nous pouvons nous réconforter avec les récents résultats obtenus par les vaccins à ARN messager en la matière. Mise en lumière pendant la pandémie de Covid-19, l’ARNm était déjà étudiée depuis plusieurs années pour lutter contre le cancer. Mais grâce au temps gagné par la pandémie, les laboratoires Moderna et Merck ont annoncé le 12 octobre dernier avoir noué un accord pour développer et commercialiser ensemble un vaccin à ARNm contre le cancer de la peau. Ils ne sont pas en reste puisque le laboratoire BioNTech a quant à lui évoqué la possibilité qu’un vaccin ARNm contre le cancer soit disponible « avant 2030 ».
Comme le précise la Ligue contre le cancer : « Certains ARN-médicaments en développement sont conçus pour cibler directement les processus fondamentaux du cancer: la prolifération, l’acquisition de la résistance au traitement, la formation de métastase, etc. D’autres visent plutôt l’environnement permissif qui soutient le développement du cancer et agissent, par exemple, en activant la réponse immunitaire anticancéreuse ». Pour autant, il est encore très difficile de s’avancer sur une date de sortie d’un traitement et l’ARNm, alors encore un peu de patience Espérons seulement qu’une nouvelle pandémie ne soit pas la condition sine qua none pour faire avancer la recherche.
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