The Good : Quelles sont les données qui ont particulièrement marqué ce deuxième observatoire ?
Julien Quidor dit Pasquet : Les deux premières éditions de l’Observatoire du Goodvertising en 2019 et 2020 avaient permis d’identifier une très forte appétence pour la « communication for good », c’est-à-dire une communication qui valorise la responsabilité sociale, économique et environnementale des entreprises.
Cette troisième édition montre que si l’engagement des entreprises n’a jamais été aussi attendu par les citoyens-consommateurs, il n’est pas toujours perçu comme étant au rendez-vous. En mai 2020 lors du premier confinement, une large majorité des Français – à savoir 67% – considérait que la communication des entreprises et des marques devait changer à l’issue de la crise sanitaire. Or, un an plus tard, seuls 41% des Français estiment que la communication des marques a vraiment changé, alors que 50% ne notent aucun changement. On peut donc affirmer que les attentes concernant le fameux « Monde d’Après » se font encore attendre.
The Good : Parmi les enseignements clés que vous en avez tirés, le(s)quel(s) doit-on retenir ?
J. Q-P. : Le premier enseignement est que la « communication for good » s’installe largement dans l’opinion. Même si cet item est en baisse par rapport aux 2 premiers observatoires, une très grande majorité des Français – soit 79% – estime qu’une « communication for good » des marques est une bonne chose. Dans un contexte de crise et une conjoncture économique où les citoyens-consommateurs ont naturellement à l’esprit des préoccupations à court-terme, la « communication for good » reste une attente forte.
Le deuxième enseignement porte sur les suspicions de « washing », que ce soit du « greenwashing », « wokewashing », « femwashing » ou « socialwashing ». Les Français restent majoritairement méfiants par rapport aux affirmations et allégations des marques – avec 55% d’entre eux qui déclarent que la « communication for good » ne correspond pas à la réalité des entreprises. Cependant, ce scepticisme est en baisse de 11 points par rapport à l’édition précédente en mai 2020 (66%). Même s’il reste encore une grande marge de progression dans ce domaine, le fait qu’il baisse laisse présager que les marques sont en train de faire leur mue et leur courbe d’apprentissage en basculant progressivement vers une « communication for good » plus sincère, plus crédible, capable d’aligner les paroles et les actes. Une sorte « d’agir communicationnel » où la « communication for good » est le bras armé de l’engagement réel des marques et des entreprises.
Le troisième enseignement concerne les engagements sur lesquels les marques doivent se positionner. Si les engagements environnementaux (ex. « la lutte contre la pollution, la lutte contre le dérèglement climatique ») restent indispensables, c’est autour du « produire local » et des « circuits courts » qu’on constate les plus fortes progressions dans cette nouvelle édition de l’observatoire. La promotion de la production locale, des circuits courts, du « Made in France » ainsi que la traçabilité des produits, font partie des thématiques principales que les marques devront privilégier à l’avenir.
The Good : Que cette étude apporte-t-elle sur le sujet de la com for good ?
J.Q-P. : La « communication for good » s’installe toujours plus fortement comme un impératif – et un défi à relever – pour l’avenir des marques.
Le fait qu’elle soit très largement plébiscitée indique que l’entreprise est de moins en moins perçue comme étant un simple acteur économique. Une très grande majorité de Français – de tout âge, de toute origine – considère désormais l’entreprise comme un acteur de l’intérêt général avec des devoirs et des responsabilités au niveau social, sociétal et environnemental.
Plus que jamais, les Français s’attendent à ce que les entreprises s’engagent, ce qui tend à démontrer que les démarches autour de la Loi Pacte, les entreprises à mission, la raison d’être des entreprises, ne sont ni « hors sol » ni irréalistes, mais sont au contraire des éléments de réponse nécessaires aux questionnements concrets des Français.
Dans ce contexte, on se rend compte que « la communication for good » n’est pas une option, mais plutôt une obligation.
The Good : De nouveaux ajustements, sujets ou questionnements sont-ils nés de cette enquête pour The Good Compagny ?
J.Q-P. : Le questionnement des marques aujourd’hui est de moins de moins de l’ordre de « dois-je m’engager ? » mais de plus en plus de l’ordre de « comment m’engager ? ».
D’ailleurs, on constate dans nos échanges quotidiens avec les annonceurs que – s’ils ont à cœur de bien faire les choses – ils cherchent encore le bon mode d’emploi.
L’une des difficultés majeures consiste à bien choisir les engagements sur lesquels la marque va communiquer. C’est-à-dire ceux qui sont les plus pertinents et porteurs pour sa marque. Notre Observatoire du Goodvertising mesure plus de 20 enjeux environnementaux, économiques et sociétaux sur lesquels les marques peuvent s’engager. Et cette liste est loin d’être exhaustive. Dès lors, il est impossible pour une marque de s’engager sur tous les fronts. Il faut savoir choisir ses combats !
C’est l’une des raisons qui nous a conduit à lancer The Good Proof, un outil pour aider les marques à sélectionner et prioriser leurs preuves d’engagement. Cette capacité à sérier les sujets et trouver des engagements saillants est d’autant plus importante dans un contexte où il n’y a jamais eu autant de « communication for good ».
On ne peut que se réjouir du fait que les marques prennent conscience de leurs responsabilités sociétales et environnementales et qu’elles communiquent dessus. Cependant, il est de plus en plus difficile pour elles de faire entendre leur voix et leurs différences dans ce brouhaha de « communication for good ». Dès lors, il faut – plus que jamais – trouver des angles stratégiques et des expressions créatives forts.
Enfin, cela vient valider nos intuitions et notre nouveau modèle d’agence créé il y a deux ans pour prouver que la créativité peut être compatible avec la responsabilité. Mais pour nous, l’important n’est pas d’avoir raison, mais d’avoir les bonnes raisons de faire.