Bien finie, la génération Y ! Les 15-25 ans arrivent. Ces « Nouveaux Bovary » en sont l’opposé avec l’illusion de Facebook, le réseau au milliard d’amis en bandoulière. Ils comptent bien s’en servir pour faire bouger les choses, vivre autrement, et peut être même inventer une nouvelle vie. Et ils commencent à le prouver au Maghreb, à Madrid, Wall Street et ailleurs.
Ils ont l’optimisme ironique d’une génération de la résilience, certains qu’avec tout ce que les générations précédentes (baby boomers, X et Y) leur ont légué « tout est effectivement foutu ». Mais ils pensent qu’ils arriveront à s’en sortir grâce à leur mode de fonctionnement en réseaux, en rhizomes, en petits groupes, en nouvelles solidarités qui créent de nouvelles formes de militance.
Une génération d’abord féminine
Pourquoi les avoir appelés « nouveaux Bovary » plutôt que génération V, W, ou Z ? Parce que cette génération est d’abord féminine ; comme Emma qui rêvait d’avoir une autre vie en tant que femme. 74% des blogs sont créés par des filles dont on connait le rôle moteur dans certains mouvements comme les printemps arabes.
Ces « nouveaux Bovary » font du Bovarysme sans le savoir : grâce à Facebook, ils ont « le pouvoir de se croire autres qu’ils ne sont » (définition du Bovarysme). Le Bovarysme est d’abord une curiosité, une énergie vitale.
Internet permet à ces « nouveaux Bovary », de tout savoir sur tout, sur les sujets les plus complexes. Ils trouvent des études américaines sur les molécules du Médiator et s’en servent pour alimenter un débat scientifique de « pro-am » (professionnels-amateurs). D’amateurs professionnels, plus pro que beaucoup d’experts. Il va falloir que les entreprises et leurs marques deviennent plus expertes pour pouvoir leur résister, voire simplement leur répondre.
Les « nouveaux Bovary » réclament le droit à l’essai, le droit à l’erreur et placent la sérendipité (la rencontre ou le hasard heureux) au rang de valeur. Adieu les processus incompréhensibles ! Avec humour. Lol !
Habitués à tout tester sur le net, ils veulent la même liberté de chercher et de se tromper quand ils arrivent comme salariés dans une entreprise. Cela va bouleverser pas mal de dogmes hiérarchiques !
La transparence, la proximité et la bonne foi redeviennent des constantes de cette génération qui croit à ce qu’elle voit. En vrai ou en numérique. Les hypocrites n’ont qu’à bien se tenir. Les faux nez vont -enfin- souffrir. Car les « Pro-am » ont une arme, le buzz non stop sur le réseau. Pacifiques sans être passifs, ils se réunissent sur un simple message, occupent une place longtemps quelquefois, et finissent par agir… A leur manière.
Qui a la bougeotte
Si ça ne marche pas ici ? Ils vont voir ailleurs.
Cette génération a la bougeotte ; elle veut aussi tester l’ailleurs. Déjà on voit des articles « générationnels » qui incitent à aller voir ailleurs et pas seulement pour des raisons fiscales. Quel défi pour nos nations -et nos entreprises- souvent recroquevillées sur elles-mêmes ?
250 millions de gens changent de pays chaque année et ce n’est que le début !
Car les « nouveaux Bovary » se disent comme Emma Bovary que « certains lieux sur la terre devaient produire du bonheur, comme une plante particulière au sol et qui pousse mal tout autre part ».
Naïveté ? Sans doute. Mais c’est en cela que cette génération peut nous surprendre et réussir là où tant de certitudes semblent échouer.
Georges Lewi
G. Lewi est également animateur du blog www.mythologicorp.com où la société et le marketing sont décryptés au travers des mythes,et auteur d’une dizaine d’ouvrages dont « Branding management » et « Mythologie des Marques»
*(Pearson éditeur)