15 mai 2022

Temps de lecture : 4 min

Nicolas Lévy (Steve) :  » le temps où l’on disait aux jeunes, « si tu veux t’éclater au boulot, va en agence… » est révolu. »

Dans la série, les agences doivent faire leur révolution copernicienne, sur les sujets de transformation digitale, sociétale, écologique, manageriale, humaine, sous peine de disparaître, c’est au tour de Steve de prendre le taureau par les cornes. Il faut dire qu’avec une croissance de 50%, cette année, le gain de 15 budgets en deux ans, il fallait réorganiser le management, les locaux, et faciliter les process de travail. Pour évoquer cette mutation, le dernier arrivé chez Steve, son vice-président en charge des stratégies, Nicolas Lévy, auparavant chez Marcel pendant 10 ans qui rejoignait les fondateurs Grégoire Soufflet et Guillaume Lartigue en janvier 2021.
INfluencia : tout a changé en deux ans. Locaux, gains de budgets, façons de travailler, la révolution chez Steve se manifeste de manière physique tout d’abord avec ces nouveaux locaux Rue de La Pierre Levée dans le 11ème….

Nicolas Lévy : oui, c’est la conséquence de ce que nous avons vécu. Je crois que cette période de deux années « confinées », nous a fait énormément réfléchir. Le rapport au travail a changé de fond en comble. Donc, on ne pouvait pas, en tant que managers, dans ces métiers hybrides, revenir et attirer les gens « comme avant », comme si de rien n’était. Les locaux sont le symbole le plus « visible » de ce qui est en jeu, pour nous tous, parce que c’est « la maison-entreprise », celle dont nous nous sommes éloignés par la force des choses, celle qui doit du coup reconquérir ses « habitants » qui entre temps, ont pris de nouvelles habitudes, se sont éloignés, ont dû donner du sens à ce qui leur arrivait. Certains ont vécu dans 14m2 pendant plusieurs mois. Donc oui, les locaux, expriment tout le soin que l’on prend des collaborateurs…  Les quinze budgets remportés en 2021 (Netto, ekWateur, Effy, Evaneos, Home Exchange, WWF, Bellman, Asmodee), et les plus récents en 2022, Flunch, et BforBak auparavant chez Havas Paris nécessitaient aussi un changement géographique et conceptuel. Car même si le télétravail est passé par là, l’espace est toujours aussi avec de nouvelles fonctions…

IN. : cette croissance a également demandé une réorganisation au sommet…

N.L. : nous étions trois, nous sommes désormais sept au codir, avec la nomination de Diane de Plas, Sandrine Delabre et Loris Bernardini au postes de DGA et en nommant Nancy Sospedra, co-fondatrice de l’agence, directrice de la création retail. Une nécessité pour travailler de manière équilibrée, avec les mêmes niveaux d’information,  et d’encadrer les soixante-dix collaborateurs au sein de l’agence.

IN. : vous évoquez « le sur mesure », tant pour vos collaborateurs…

N.L. : en fait, l’envie de télétravail est devenue un acquis, et personne n’a envie de revenir à plein temps dans les locaux. Donc cela n’a même pas été une question. Chez nous, c’est open, avec validation du manager. Si les collègues n’ont pas besoin d’être là, c’est bon. En revanche, si un des boss a besoin de vous un vendredi alors que vous êtes en télétravail, vos faites un effort. On compte sur le bon sens de chacun. C’est ça faire du sur mesure.

IN. : vous expliquez aussi, que les jeunes aujourd’hui sont un matériau inflammable…

N.L. : nous agences, sommes en danger si nous ne parvenons pas à attirer des talents créatifs aujourd’hui. L’époque où l’on nous disait, « si tu veux t’éclater au boulot? Va en agence… » est révolue. Aujourd’hui nous devons leur prouver que ce métier vaut le coup. Avoir des arguments tangibles qui leur parlent. Le temps n’a plus la même valeur. Le temps où ton métier était l’essentiel de ta vie, c’est fini, le travail a une autre place… Et puis n’oublions que nos concurrents sont désormais dans le divertissement, les start-up, le luxe, Disney, Apple.

L’époque où l’on nous disait, « si tu veux t’éclater au boulot? Va en agence… » est révolue.

Alors, le lieu de travail est tout aussi important mais pas en temps de présence. Concrètement, les jeunes ont vécu à 100% de télétravail pendant deux ans, or même si c’est d’une autre manière, ils ont trois besoins qui ne se discutent pas, l’espace, car beaucoup vivent dans de petits appartements, la socialisation, voir leurs potes pour la santé mentale et ils ont besoin d’être formés. Une partie de cette formation est informelle, elle est faite de l’inspiration insufflée de manière indirecte dans un espace donné. Vous entendez une discussion intéressante, un brief donné par un senior, un pot qui s’organise, un sujet qui part à l’autre bout de l’open space… C’est une ambiance qui apporte une partie de la formation. Et puis c’est l’endroit des grandes réunions, de grands moments de partage… Donc oui, nous faisons tout pour faire en sorte de faire venir les jeunes talents.

il ne faut pas se noyer dans les outils. Le métier est de confirmer, d’objectiver les insights.

IN. : quel est, selon, vous l’atout d’une agence indépendante telle que la votre ?

N.L. : notre indépendance nous donne plus d’audace. Au moment du Covid il y a eu un mouvement de panique dans le métier, tout le monde s’est dit : « fini de rire, fini la création ». Nous chez Steve on a beaucoup souffert aussi… Mais quand Guillaume m’a appelé à ce moment là, nous nous sommes dit, que si on était frileux dans nos propositions, c’en était fini de l’agence. Nous avons donc pris les clients un à un pour leur expliquer que c’était le moment ou jamais d’être « remarquables » dans tous les sens du terme, et que cela serait payant. Nous avions l’exemple d’une Buzzman qui a démontré que la créativité et l’audace faisait gagner.

IN. : vous étiez depuis dix ans chez Marcel, avez connu la CLM BBDO des années 2000, avant de rejoindre l’agence V, TBWA Paris puis Marcel en 2011, quelques mois après la fusion avec Publicis Net. Pourquoi quitter Marcel à ce moment crucial, en plein covid?

N.L. : j’aime les défis, les aventures. Lorsque je rejoins Marcel en 2011, il y a Anne de Maupeou, et Arthur Sadoun qui ont cette idée folle de nous mettre dans un bouillon digital, –Marcel-, avec Pascal Nessim, et bien d’autres. J’ai donné 10 ans à cette agence très digitale qui est devenue une grand marque transformative. Je me réveille au bout de dix ans, je suis amoureux de Marcel, mais il n’y a plus de marche à franchir…J’ai fait le tour. Guillaume m’appelle et me dit nous allons faire la plus belle agence indépendante, et voilà.

IN. : que signifie aujourd’hui « le planning stratégique », avec tous ces outils dont les agences disposent…

N.L. il ne faut pas se noyer dans les outils. Le métier est de confirmer, d’objectiver les insights. Dans la data tu as par la force des choses, plus d’informations, de personnes interrogées. Mais ce métier c’est de la conviction, de la vision. Un planer est à la fois très rationnel et très audacieux. Il faut se mouiller tout le temps.

 

La dernière campagne Flunch, avec la voix of de Fred Testot. Culottée et bienvenue.

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