Le distributeur allemand veut encourager les femmes à se lancer dans les affaires et à entreprendre en leur offrant 2000 euros à leur naissance. Une opération séduction qui vise le très long-terme.
C’est un placement sur le long-terme malin et militant. Le distributeur allemand Metro, qui possède notamment l’enseigne éponyme de vente en gros et la chaîne d’hypermarché Real, a décidé de célébrer la journée internationale de la femme, le 8 mars, en offrant 2 000 euros à toutes les petites filles nées ce jour-là à Düsseldorf, la ville qui abrite son siège social, afin de leur permettre de se lancer dans les affaires après leur majorité.
Pour bénéficier de cette action, les membres de la famille d’une nouveau-née (parents, grands-parents, oncles, tentes, cousins…) devaient seulement écrire un courriel à Metro à l’adresse obg@&metro.de. Une carte de visite d’une valeur de 2 000 euros leur était ensuite envoyée. Dans dix-huit ans, les startupeuses en herbe pourront récupérer cette somme à laquelle s’ajouteront 2% d’intérêts annuels versés par leur « bienfaiteur ». Cette initiative fait suite à une vaste enquête effectuée par le distributeur auprès de 10 000 personnes originaires de dix pays (France, Allemagne, Pays-Bas, Italie, Portugal, République tchèque, Roumanie, Turquie, Russie et Chine).
Trop de freins
Cette étude révèle que près d’une femme sur deux (45%) rêvent de lancer une entreprise mais qu’à peine 12% pensent avoir une chance de pouvoir réaliser leur ambition. Les principaux freins qui les empêchent d’avancer sont l’absence d’aides financières (49%), la conjoncture économique difficile (43%), les contraintes fiscales (29%) et la bureaucratie (28%). « Il existe encore trop de barrières qui empêchent les femmes de concrétiser leur projet d’entreprise », regrette Heiko Hutmacher, le directeur des ressources humaines de Metro. « Cela a un impact important sur le développement économique ».
De nombreuses enquêtes confirment les conclusions du distributeur allemand. En Europe et en Asie centrale, à peine 6% des femmes âgées de 18 à 64 ans sont des entrepreneurs, d’après l’étude annuelle publiée par Global Entrepreneurship Monitor (GEM). Ce chiffre est largement supérieur en Amérique du Nord (12%), en Amérique Latine (17%) et en Afrique sub-saharienne (26%). Le nombre de femmes qui se décident à se lancer dans les affaires ne cesse, toutefois, de croître d’année en année. En 2016, 163 millions de femmes ont démarré une start-up dans les 74 pays analysés par GEM. Il faut ajouter à ce chiffre les 111 millions de dirigeantes déjà en place depuis plus d’un an. Le taux d’activité entrepreneuriale (TEA) féminin varie toutefois énormément d’un pays à l’autre. Il s’échelonne en Europe de 1,6% en Belgique, à 2,6% en Italie, 2,9% en France, 4,4% en Allemagne et 10,8% en Grèce. Ces chiffres sont nettement plus élevés en Asie et tout particulièrement au Vietnam (22,6%) et en Thaïlande (27,5%) ainsi qu’en Amérique Latine et notamment en Colombie (24,7%), au Belize (27,3%) et en Equateur (30,2%). Les taux les plus élevés sont enregistrés en Afrique comme au Burkina Faso (30,2%) et au Sénégal (36,8%).
La France rattrape, un peu, son retard
Les Françaises sont, elles aussi, de plus en plus nombreuses à créer ou à racheter une entreprise. Selon une enquête réalisée par l’Institut National de la Statistique et des Études Économiques (INSEE) en 2016, près de 40% des entreprises individuelles lancées en France, ont été fondées par des femmes. Ce chiffre a augmenté de 10% depuis 1995. Ces PDGères ou auto-entrepreneuses travaillent principalement dans les secteurs des services à la personne (55%), de la santé (63%) et de l’enseignement (42%). Elles sont nettement moins présentes dans les métiers de la construction (6%), du commerce et de la réparation automobile (10%) ou dans les transports (17%). Ce constat s’explique.
Les femmes ont en effet plus de mal à obtenir des prêts bancaires ce qui explique leur faible investissement de départ qui atteint en moyenne 50 000 euros, soit deux fois moins que les hommes. Les secteurs privilégiés par les startuppeuses leur donnent aussi une assez grande flexibilité ce qui leur permet de concilier leur vie professionnelle avec leurs « obligations » familiales. « Les femmes, qui pendant longtemps ont été écartées soit directement, soit indirectement, sont aujourd’hui à 32 % des créateurs et des repreneuses d’entreprises, reconnaissait, le 7 février dernier, le Premier Ministre Edouard Philippe lors de son discours prononcé au Salon des Entrepreneurs. On part de très loin, c’est vrai, mais on avance vite et c’est bien ». Des initiatives comme celles de Metro permettront de rattraper le retard accumulé au fil des décennies un peu plus vite…