D’un côté, un journalisme en ligne qui change et s’adapte aux comportements digitaux. De l’autre, l’avènement des emojis comme narration imagée. Quand les deux univers se rejoignent, ça donne la nouvelle application d’information de Quartz.
Dans nos sociétés sur-consuméristes sans patience ni perspective chronologique, le temps est un ami masochiste : on lui court après mais en disposer rend anxieux et compliqué pour l’apprécier à sa juste valeur. Pas étonnant donc que dans le « Busyland » façonné par nos modes de vie et de consommation, l’information s’ingurgite façon fast food. La responsable ? La demande avide de contenu du consommateur exigeant et lassé. Répondre à ce paradoxe en informant mieux sans contraindre constitue un défi crucial pour les éditeurs comme pour les marques. En créant une plate-forme mobile complémentaire, le média online Quartz façonne un nouveau levier d’engagement.
Après Flags, le clavier où chaque drapeau d’un pays est un emoji, Quartz sort, un an plus tard, sa première application d’information en partenariat avec MINI. Disponible uniquement sur iPhone et Apple Watch, la plateforme reste dans le divertissement et dans l’iconographie puisqu’elle possède la particularité d’alerter ses abonnés par des textos, des GIFs, des emojis et des photos. Présentée par Quartz comme une « conversation permanente sur l’actualité », l’application constitue la réponse d’un média 100% digital au fait que 60% des citoyens connectés consomment aujourd’hui leurs news sur des supports mobiles. Autant donc leur délivrer l’info comme une discussion sur messagerie instantanée, non ? Si vous voulez interagir avec la notification, il suffit de cliquer sur le lien et un contenu plus complet mais lisible en quelques minutes apparaîtra pleine page. Ou comment garder son lecteur informé et diverti en imbriquant des leviers plus légers de storytelling dans une actualité quotidienne parfois indigeste.
La pub intégrée est forcément native
« Chaque cession de lecture sied parfaitement aux quelques minutes de temps libre que vous avez parfois », confirme d’ailleurs Quartz sur son site web. Où il est aussi précisé que si son application « vous alertera en vous amusant, que ce soit avec un haiku sur l’actu de la bourse, ou un emoji sur un événement économique important », tous les articles sont rédigés par une rédaction de journalistes professionnels dirigée par Adam Pasick, ancien de Reuters et de New York Mag. Sponsorisée donc par MINI, la plateforme intègre évidemment de la pub. Et forcément, elle est native puisque promesse est fait qu’elle ne contrariera pas la lecture car complètement parallèle avec le contenu d’info. Le lancement de l’application de Quartz doit se comprendre dans un double contexte : primo, la montée en puissance d’une nouvelle forme de journalisme plus adapté au digital, secundo, l’avènement des emojis comme levier d’engagement des marques et surtout un mode d’expression populaire devenu incontournable.
Byline, Coda, Reported.ly : le journalisme online change
Quasi en même temps que le lancement de l’application iOS de Quartz, le groupe de presse britannique Trinity Mirror annonçait aussi une nouvelle plateforme d’agrégation d’infos. Développée par son équipe de production digitale, Perspecs, et actuellement testée en beta sur Android et iOS, elle présente à l’utilisateur trois perspectives différentes d’une même information en puisant dans un catalogue de curation allant de la BBC à CNN et Russia Today.
Contrairement à Reported.ly, le média 100% Twitter lancé début 2015, ou Coda Story, qui concentre sa couverture sur un seul événement à la fois, la plateforme anglaise, Byline, fondée en avril 2015 par Seung-yoon Lee et Daniel Tudor, ancien journaliste chez The Economist, permet le financement participatif du journalisme indépendant au long cours. Byline se définit d’abord comme un média qui utilise le crowdfunding comme modèle et pas une plateforme du style Kickstarter sur laquelle les journalistes viendraient vendre un projet. Quid des marques ?
Ikea, parangon de la narration imagée
Comme la sagesse populaire dit qu’un bon dessin vaut bien un long discours, les marques de luxe ont bien compris que les emojis permettent de surfer sur la tendance des émotions. Si depuis avril 2015, il est possible d’inclure des emojis dans les hashtag sur Instagram, c’est parce que les marques et les consommateurs en raffolent au point de mériter une étude spécifique sur leur popularité, réalisée par Curalate.
Allons-nous bientôt cesser d’écrire ? L’alphabet va-t-il disparaitre au profit d’une narration imagée ? Certes l’expression écrite a encore de belles heures devant elle, mais il faut reconnaitre que l’utilisation des émoticônes fait désormais partie du quotidien pour nombre d’entre nous. Et ça, IKEA l’a bien compris en créant son application qui les revisite et offre ainsi une nouvelle variété d’images aux usagers.