14 janvier 2025

Temps de lecture : 4 min

Matthieu Jacquier (Meetic) : « Il existe un réel bashing contre les applications comme la nôtre. Mais, la moitié des couples aujourd’hui se sont noués après une rencontre en ligne »

Directeur général de Meetic depuis six ans, Matthieu Jacquier a cherché à connaître la vision de l’amour des Français en créant le Dating Lab. Ce projet entre dans sa stratégie de lutte contre le social bashing dont il s’estime être la victime comme la plupart des autres acteurs de la rencontre amoureuse.
ETUDES

INfluencia : Quelles raisons vous ont poussé à créer le Dating Lab que vous présentez comme le premier observatoire de la rencontre amoureuse ?

Matthieu Jacquier : Tout le monde nous connaît car nous sommes les experts de la rencontre amoureuse depuis 2001. Nous sommes à l’origine de plus de 10 millions de couples en Europe. Nous voulions comprendre ce qu’était l’amour aujourd’hui. Nous avions fait une étude sur ce sujet il y a dix ans mais nous souhaitions savoir comment la perception des gens avait évolué. Nous avons donc décidé d’utiliser notre savoir-faire notamment en termes de data et de croiser nos conclusions avec les regards d’autres experts de la rencontre dont un neurologue, un artiste plasticien, un philosophe et une spécialiste de la conversation.

IN : Quelles grandes évolutions sont apparues ces dix dernières années ?

M. J. : On peut en nommer trois principales. La première grande rupture est technologique. Avec le portable, les célibataires se sont habitués à avoir beaucoup plus de personnalisation et d’instantanéité dans leur recherche de rencontres. L’IA va aussi avoir des conséquences. La seconde rupture est sociétale et comportementale avec l’arrivée de #MeToo et du Covid. #MeToo a rééquilibré le rapport homme/femme. Un point, qui peut sembler anecdotique mais qui est, en réalité, très révélateur, est que les femmes sont de plus en plus nombreuses à partager l’addition à la fin de leur première rencontre alors qu’il y a dix ans, les hommes payaient tout. 75% des femmes nous disent également qu’elles n’ont plus peur de dire non aujourd’hui, ce qui n’était pas le cas dans le passé. Avec le Covid, beaucoup de nos utilisateurs se sont, par ailleurs, dits : « Plus jamais cela, plus jamais seuls ». Cela a modifié leurs attentes. Le succès des réseaux sociaux et notre hyper-connectivité ont enfin créé de nouvelles manières de nous rencontrer.

IN : Quels sont les principaux enseignements de votre étude ?

M. J. : Nos utilisateurs sont très sensibles aux causes environnementales et sociétales. 69% des utilisateurs que nous avons questionnés se disent être à la recherche de personnes engagées autour de ces thèmes. Le pourcentage de gens qui croient au grand amour continue, lui, d’augmenter ce qui est très rassurant dans la période actuelle. Les trois facteurs les plus importants pour les célibataires dans leurs recherches restent, quant à eux, l’humour, l’attrait physique et les valeurs familiales.

IN : La concurrence s‘est beaucoup accrue sur le marché de la rencontre amoureuse ces dernières années. Comment vous êtes-vous adapté à cette évolution ?

M. J. : Quand on fait un historique de l’univers de la rencontre, on peut distinguer différentes périodes. Entre 2001 et 2013, ce marché comportait presque exclusivement des sites de rencontre dont Meetic. L’arrivée de Tinder il y a dix ans a créé un nouveau cadre. Les sites ont fait face à l’arrivée d’applications. On peut se demander aujourd’hui si un troisième cycle n’est pas en train de s’enclencher.

IN : Que voulez dire par cela ?

M. J. : Il faut aujourd’hui s’adapter en permanence aux attentes des clients qui évoluent sans cesse. La création de notre Dating Lab rentre dans ce cadre car il nous permet de mieux comprendre les souhaits des consommateurs. Ces analyses nous ont notamment confirmé que les personnes étaient à la recherche de « vraies » rencontres dans la « vraie » vie. C’est pour cela que nous avons organisé ces dix dernières années 12.000 events en Europe auxquels ont participé plus de 700.000 participants. Ces événements sont variés comme des speed dating en ligne ou en face à face, des dégustations de vin ou de bons petits plats et des soirées karaoké. Le speed dating revient très fort actuellement car ce format est très simple et direct. Chaque dimanche, 20.000 utilisateurs se connectent pour participer à nos speed dating en ligne.

IN : Comment “matchez-vous” les célibataires ?

M. J. : En fonction de leur âge, de leur lieu de résidence qui doit être assez proche et de leurs préférences sexuelles comme nous le faisons tous dans la vraie vie.

IN : Les critiques contre les algorithmes sont de plus en plus nombreuses. Beaucoup accusent les sites comme le vôtre de « truquer » ces rencontres…

M. J. : Il existe en effet un réel bashing contre les sites et les applications comme la nôtre. C’est la rançon de notre succès. Aujourd’hui, la moitié des couples se sont noués après une rencontre en ligne. Ce succès extraordinaire est une révolution sociétale qui nous oblige à répondre aux exigences toujours plus nombreuses des consommateurs. Il est donc primordial, pour nous, de créer un environnement de confiance dans lesquels nos clients se sentent parfaitement à l’aise. C’est pour cette raison que nous leur proposons notamment un service client avec de véritables interlocuteurs qui sont joignables 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7.

IN : Quel est le business-model qui vous permet de vous développer ?

M. J. : C’est un modèle classique de fremium. La grande majorité de nos utilisateurs profitent de nos services gratuits qui leur permettent de créer leurs profils et de matcher avec des partenaires. Une petite minorité paie des abonnements pour être plus visible et organiser plus rapidement une rencontre.

IN : Vous venez de lancer une nouvelle campagne publicitaire avec l’agence DDB Paris. Pour quelles raisons ?

M. J. : Cette campagne cherche à célébrer les différentes facettes de la rencontre et à accompagner chaque célibataire, quel que soit son parcours ou son âge, dans sa quête de connexions toujours plus authentiques.

IN : Quels est le pourcentage d’utilisateurs qui s’abonnent ?

M. J. : C’est ma petite cuisine que je ne dévoile pas mais si vous m’avancez des chiffres comme 10% ou 20%, vous ne serez pas trop loin du compte…

IN : Le Dating Lab est-il appelé à se développer dans les prochains mois ?

M. J. : Oui, nous souhaitons publier sur notre site de nouveaux contenus chaque semaine. Nous comptons notamment profiter du Blue Monday, le 20 janvier, pour rassurer les célibataires qui pourraient souffrir lors de cette journée de la déprime. Un entretien avec un de nos experts devrait leur remonter le moral…

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