Après l’espace comme nouveau terrain d’engagement, Mars peut-il servir les intérêts marketing des marques ? Un fou furieux néerlandais le pense. Il est le fondateur de Mars One et veut convaincre de l’opportunité.
Visionnaire génial et incompris ou fanatique illuminé et complètement barré ? Bas Lansdorp divise autant qu’un livre de Michel Houellebecq. Si vous ne le connaissez pas, le fondateur de l’organisation à but non lucratif Mars One sera présent lundi 11 mai à Rome pour la conférence Festival of Media. Si vous avez déjà côtoyé le phénomène, vous savez donc qu’il entend implanter une présence humaine permanente sur Mars d’ici 2026.
Comment ? En envoyant quatre volontaires pour un vol spatial sans retour qui évidemment servira de matière pour une série de documentaires. Si vous êtes un marketeur soyez donc averti : Bas Lansdorp veut vous vendre son projet comme une formidable opportunité de ROI. Pour lui, la planète rouge constitue un meilleur levier d’exposition que… les Jeux Olympiques. Rien que cela.
« Les JO de Londres sur une durée de seulement trois semaines, ont engendré des revenus de droits TV et de sponsoring de plus 4,5 milliards d’euros. Entre maintenant et la première année qui suivra l’implantation humaine, les revenus de notre exposition médiatique sont estimés à l’équivalent de dix JO », annonce le chercheur néerlandais sur le site de Mars One. Alors que l’espace n’est plus un territoire de marque fantasmatique mais réel – une tendance forte qu’INfluencia analyse depuis deux ans maintenant, Mars ferait office d’aubaine marketing ? Bas Lansdorp le pense et multiplie les sorties publiques pour convaincre des investisseurs privés.
Accoler son nom à la quête de l’impossible
Interrogé par The Drum, l’utopique jusqu’au-boutiste livre son argumentaire pour justifier les raisons qui pousseraient une marque à sponsoriser une mission a priori suicidaire. Les quatre premiers habitants humains de Mars ne reviendront jamais sur Terre et d’ici onze ans, notre espèce ne sera pas encore capable d’y vivre : « L’espace est intrinsèquement un endroit dangereux mais il y a bien des marques qui sont partenaires de compétitions, courses et événements dans lesquels les participants peuvent mourir. C’est le cas de la Volvo Ocean Race par exemple. Il faut être clair d’emblée sur les risques et sur les raisons qui poussent à les prendre. Je n’ai aucun doute sur le fait qu’à un moment la mission se passera mal, c’est l’histoire de l’exploration spatiale. »
Red Bull comme modèle
En brandant l’exploit historique de Felix Baumgartner, Red Bull a réalisé une opération marketing qui fait désormais jurisprudence. Plus de huit millions de curieux ont suvi le live stream et la valeur de l’exposition pour la marque a dépassé les 100 millions d’euros. Mars One utilise cette réussite comme produit d’appel pour son projet. « Je ne sais pas si nous ou un autre y arriveront mais envoyer des humains sur Mars est le défi le plus excitant du 21e siècle. L’histoire s’en souviendra comme le moment où l’être humain a quitté sa planète et c’est ce qui pour une marque, doit lui donner envie d’y accoler son nom », développe le chercheur néerlandais. « Même si elle échoue, notre histoire restera inspirante et créative car nous aurons tenté d’accomplir l’impossible », ajoute-t-il.
Un remake de Loft Story pour débuter
Sans fournir de noms, Bas Lansdorp annonce qu’il est en discussions avancées avec un grand constructeur automobile et une multinationale de bière. Il est encore trop tôt pour elles pour s’engager mais leur intérêt est encourageant, confie-t-il dans The Drum. Il faut savoir que le fondateur de Mars One a fixé le prix opérationnel de son projet à 6 milliards d’euros. C’est ce que coûtera l’envoi de quatre êtres humains sur la planète que Curiosity arpente et apprend à nous faire connaître sur les réseaux sociaux.
Depuis le retrait de Darlow Smithson Productions, propriété d’Endemol, Mars One cherche aussi un diffuseur international. Sans lui, le ROI dont il vante les mérites est inexistant. Bas Lansdorp ambitionne de réaliser huit documentaires de 50 minutes sur la préparation de l’équipage jusqu’à son décollage. Sponsoring et placement de produits sont également dans le package vendu aux marques, encore faut-il une exposition télévisuelle et online. « Avant la mission nous voulons reproduire une copie sur terre de l’avant-poste réel dans lequel ils vivront sur Mars. L’équipe y sera enfermée sans savoir pour combien de temps, en ayant les mêmes restrictions que sur Mars. Nous voulons que le monde entier sache qui sont ces quatre aventuriers. Nous voulons qu’ils soient des amis de télévision », argumente Bas Lansdorp. Il ne sera pourtant pas dans les quatre premiers à coloniser la planète rouge. Et si cette réticence-là était le plus mauvais message à envoyer aux marques ?
Des volontaires ?