Magali Tézenas du Montcel (SPORSORA) : « le discours d’une graphologue a été le déclic qui m’a fait changer de vie »
La directrice générale de Sporsora, Magali Tézenas du Montcel, n’aime pas les gens qui se prennent au sérieux. Mais, comme elle fait les choses très sérieusement, elle répond cette semaine au « Questionnaire d’INfluencia », autour d’une madeleine et d’un thé, au sein de l’hôtel Swann* – Proust oblige.
INfluencia : votre coup de cœur ?
Magali Tézenas du Montcel : en dehors bien sûr des jeux olympiques et des jeux paralympiques, je vous répondrai que ce qui me fait plaisir en ce moment est de boire un Spritz avec des copains et de faire du vélo dans Paris. Avant, j’habitais en banlieue mais depuis que je vis à Paris, je me suis dit que je n’avais plus besoin de voiture. J’adore ce sentiment de liberté, cela permet de voir et de sentir Paris en prenant son temps et de se rendre compte des beautés de la ville. Tout à l’heure j’ai remonté les Champs-Elysées, ce que j’avais déjà fait 15 000 fois en voiture, mais j’ai eu le sentiment de découvrir des choses que je ne voyais pas avant. Certes, en ce moment, le soleil brille, mais je n’ai jamais connu de pluie vraiment torrentielle. De toute façon, j’ai toujours ma cape de pluie dans la sacoche. Et puis, cela fait faire de l’exercice physique (rires).
IN. : et votre coup de colère ?
M.T.D.M. : je ne me mets jamais en colère. J’aurais d’ailleurs peut-être dû le faire une ou deux fois dans ma vie… Bien sûr il y a des choses que je ne supporte absolument pas, comme l’intolérance, le racisme. Mais il y a certains comportements qui m’agacent et me déplaisent : les gens qui se prennent au sérieux – je fais des choses très sérieusement, mais sans me prendre au sérieux – ou qui manquent d’intelligence relationnelle. Il y a aussi le fait que les Français râlent tout le temps. En ce moment c’est la mode du « JO bashing ». Les gens ne se rendent pas compte qu’on a besoin d’évènements de ce type pour faire rayonner notre pays à l’international, parce que ce sont des sources de revenus économiques, et que cela crée du lien social, du « vivre ensemble » dont on a tant besoin à l’heure actuelle. On va vibrer pour ces athlètes pendant quinze jours. Et ce sont ces émotions et ces passions qui font le sel de la vie.
IN. : l’événement qui vous a le plus marquée dans votre vie ?
M.T.D.M : je vais à nouveau vous parler d’un évènement sportif parce que c’est ma passion et que le sport me fait vibrer. Il génère des émotions que je n’ai pas, par exemple, en regardant un tableau. C’est notre victoire en 1998 lors de la Coupe du monde de football. Dans notre maison, c’était tous les jours portes ouvertes, la fête permanente, tous nos copains étaient là. J’ai des souvenirs incroyables, je suis allée sur les Champs-Elysées avec tout le monde. Et puis on y croyait à ce slogan « Black Blanc Beur »…
IN. : votre rêve d’enfant ou si c’était à refaire
M.T.D.M :je n’avais pas de rêve particulier quand j’étais petite. Peut-être que j’étais trop raisonnable et que je ne rêvais pas assez (rires). Donc si c’était à refaire, je ne vois pas quel métier j’aurais eu envie de choisir. Je me dis juste parfois que j’aurais dû peut-être aller travailler directement dans le sport parce que c’était ma passion. J’ai toujours lu L’Équipe, mes copines à l’école me regardaient bizarrement. Mais quand j’ai fini mes études, à l’époque le sport n’était pas la voie royale, on faisait du marketing, de la com, ou on allait dans la grande conso, chez Colgate ou Procter ! J’ai donc travaillé dans l’industrie pharmaceutique. J’y suis tombée un peu par hasard au début, et tous les deux-trois ans, on m’a fait faire autre chose, on m’a donné des promotions, je suis partie travailler cinq ans à Barcelone, etc. Et la vie est passée tellement vite que je suis restée dans cette industrie vingt ans.
IN. : votre plus grande réussite ? (pas professionnelle)
M.T.D.M : elle est personnelle mais liée à ma carrière. À 40 ans j’ai fait ma petite crise de la quarantaine. A ce moment-là, j’ai raté un poste dans la grande entreprise dans laquelle je travaillais. Et on m’a offert un bilan de compétences. Et dans ce cadre, la consultante m’a proposé de faire une analyse graphologique en m’assurant que « la personne que vous allez rencontrer est extraordinaire ». J’ai juste donné à cette graphologue trois bouts de papier où j’avais écrit quelques phrases. Et là, quelque chose d’extraordinaire s’est produit, elle me dit : « je perçois dans votre écriture quelque chose que vous refoulez, car vous vous dites que ce n’est pas raisonnable ». Et moi, je savais très bien ce que c’était, cela faisait des années que je voulais travailler dans le sport. J’avais déjà lancé des bouteilles à la mer et notamment envoyé des candidatures spontanées à la fédération de tennis parce que je jouais beaucoup à ce sport et que j’étais très impliquée dans mon club. Mais je me faisais jeter à chaque fois. Alors le discours de cette graphologue a été le déclic qui m’a fait changer de vie. J’ai réalisé qu’il fallait que je me donne tous les moyens de faire ce que j’avais toujours eu envie de faire. Et tout en étant en part time chez Novartis et en m’occupant de mes trois enfants, j’ai fait un master en marketing sportif à l’Essec pendant dix-huit mois pour tout apprendre sur le sport et me créer un réseau. J’ai beaucoup beaucoup beaucoup travaillé. J’ai quitté un job très concret, des conditions très confortables pour me jeter un peu dans le vide – à l’époque en 2008 c’était un secteur très fermé – et aujourd’hui je dirige le plus grand réseau du sport en France. C’est une belle revanche et une grande victoire pour moi. Peut-être la plus grande. Et je peux être assez fière de moi. Certes, j’ai eu la chance d’avoir eu à mes côtés un mari qui a assuré. Mais c’est aussi un message à donner aux femmes : il faut prendre son destin en main.
IN. : votre plus grand échec ? (idem)
M.T.D.M. : ce ne sont pas des échecs mais plutôt des activités que j’aurais aimées faire. Et bien sûr dans mon cas, c’est toujours dans le sport…Par exemple, j’aurais tellement aimé faire du surf, ou plutôt avoir envie de faire du surf. Je suis originaire du sud-ouest, j’ai une maison à Capbreton, près d’Hossegor. Là-bas tout le monde surfe, j’ai essayé moi aussi, je m’y suis mise à 50 ans. Mais je n’y arrive pas. Il aurait fallu que je commence beaucoup plus tôt.
J’ai aussi un autre problème, j’ai pratiqué beaucoup de sports de compétition, mais je suis nulle pour la course. Comme vous le savez, le 10 août prochain tous les Français pourront courir un « Marathon pour tous », soit un vrai marathon de 49,195 km, soit une course de 10 km. Et le comité d’organisation m’a offert un dossard pour les 10 km. Or quand je cours 5 kilomètres, je suis au bout de ma vie (rires). Ça m’énerve, tout le monde autour de moi, mon mari, mes filles font des marathons ou des semi-marathons. Mais moi, non. Je n’ai pas le mental pour ça. C’est dommage.
IN. : votre plus gros moment d’embarras
M.T.D.M. : il a eu lieu en 2017 lors des Trophées Sporsora du marketing sportifque nous organisons chaque année et qui avaient lieu cette année-là aux Folies Bergères. Nous faisons toujours venir des sportifs et nous avions invité Stéphane Houdet, champion de tennis fauteuil. Les portes s’ouvrent et je le vois venir vers moi en marchant. Et là, grand moment de solitude. Je le regarde interloquée car je ne savais pas à l’époque – j’ai bien progressé depuis – que dans le tennis handisport, quel que soit votre handicap, vous êtes dans un fauteuil. Or Stéphane est amputé mais a une prothèse et peut tout à fait marcher. En plus il était arrivé avec Nicolas Mahut, champion de tennis valide que j’avais mis avec les autres athlètes devant la scène, alors que j’avais placé Stéphane Houdet dans les loges sur le côté pour qu’il ait un accès rampes pour venir facilement sur scène. On est venu me dire plus tard, qu’il ne comprenait pas pourquoi il n’était pas avec les autres. Je ne l’ai jamais recroisé, mais je me suis toujours dit que, si c’était le cas, je lui expliquerai ce qui s’était passé. S’il vous lit…
IN. : votre devise
M.T.D.M. : J’en ai deux : ne rien regretter et voir plutôt le verre à moitié plein et être aligné. Dans la vie privée comme professionnelle. J’ai découvert cela grâce au yoga qui m’a beaucoup apporté sur le plan physique et mental. Le peu de spiritualité que j’ai, je le tiens du yoga.
IN. : quel livre emmèneriez-vous sur une île déserte ?
M.T.D.M. : je lis énormément, autant en français qu’en espagnol. Je suis une fan d’Isabel Allende, j’ai dévoré tous ses livres, par exemple « La casade los espíritus ». Et sur une île déserte, je pourrais tous les relire. Elle raconte des histoires absolument fascinantes et j’adore sa façon d‘écrire en espagnol.
* l’Hôtel Littéraire Le Swann, situé au cœur du quartier historiquement proustien de la plaine Monceau et de Saint- Augustin, présente une collection d’œuvres originales sur l’écrivain ainsi que des pièces de haute couture, des photographies, des tableaux, des sculptures. Notre interviewé(e) pose à côté d’une sculpture de Pascale Loisel représentant bien sûr l’auteur d’ « À la recherche du temps perdu ».
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L’actualité de Magali Tézenas du Montcel
Magali Tézenas du Montcel a porté la flamme olympique samedi 20 juillet à Chelles en Seine-et-Marne.
Elle a reçu en août 2023, l’insigne de chevalier de l’Ordre national du Mérite des mains de la ministre des Sports, Amélie Oudéa-Castéra.
Sporsora, qui regroupe aujourd’hui plus de 280 acteurs et 2 000 personnes de l’écosystème du sport (marques partenaires, détenteurs de droits, agences, collectivités, médias, instituts d’études et de formation) fête ses 30 ans cette année et organise une garden party à cette occasion le 5 septembre prochain pendant les Jeux paralympiques.
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