Quand McDonald’s se prend pour Apple sur Facebook Live, ça donne la présentation d’une paille innovante en mode keynote pour le dernier iPhone. Un léger goût de second degré au programme
La Pomme de Cupertino abhorre la copie. Le secret industriel et la peur du plagiat sont deux des socles fondateurs d’Apple, ultra tatillonne sur la frontière entre calque et modèle. La multinationale paranoïaque a beau être moins innovante, sa culture du design, du packaging et de la présentation d’un nouveau produit continue de servir d’exemple, même pour le géant mondial du fast food. Le 15 février dernier, McDonald’s a présenté sa dernière innovation dans un Facebook Live inspiré des keynotes d’Apple : une paille esthétique en forme de J dont le placement stratégique de trous latéraux optimise le sirotage de milk-shakes.
Animée par un youtubeur influent de la Tech, Austin Evans, la cérémonie de lancement de STRAW -traduction anglaise de paille mais abréviation de Suction Tube for Reverse Axial Withdrawal- a duré 20 minutes. Le directeur de l’innovation, Darci Forrest a assuré le service avant vente. Il était accompagné de deux ingénieurs en robotique et aéronautique de JACE et NK Labs, qui ont collaboré à la conception du produit. En plus d’un packaging de Mac et d’un design d’iPhone, la nouvelle paille revendique donc une ingénierie unique. Carrément. « STRAW est conçue pour fournir une dynamique d’aspiration qui optimise le goût. Quand vous buvez le nouveau Chocolate Shamrock Shake, vous pourrez goûter 50% du chocolat et 50% de la menthe. C’est le ratio idéal », assure le pape du manger-vite industriel. « Notre tâche était ambitieuse. D’un aspect purement physique, c’est en fait difficile d’assurer un rendu gustatif aussi bien partagé pour chaque gorgée. Mais c’est ce que nous avons fait « , complète Seth Newburg, principal engineer & managing partner chez NK Labs.
Le productising de Buzzman pour « BK », un autre modèle
Produites en 2000 exemplaires seulement, la paille pour milk-shakers de compétition, sera disponible dans quelques restaurants de la marque et uniquement pour ceux qui commanderont le Chocolate Shamrock Shake. La boisson ne restera au menu que quelques mois, promettant un statut rapide de collector à la paille. Avec son allure d’attraction « mytho » d’exposition d’art contemporain faussement avant-gardiste, STRAW confirme que Ronald ne compte plus innover uniquement par ses menus et ses expériences servicielles.
Plutôt bienvenu. Car déjà ciblé aux États-Unis lors des grèves pour la hausse du salaire minimum, McDo a été accusé en mars 2014 par sept plaintifs de ne pas payer ses salariés sur l’ensemble de leur temps de travail et pour leurs heures supplémentaires; la marque a également accusé un chiffre d’affaires aux Etats-Unis en 2014 en chute de 3,3%, avec un bénéfice en recul de près de 30 % entre juin et septembre 2014 et des ventes en retrait de 4,6 %, à 6,99 milliards de dollars (5,4 milliards d’euros) sur cette période. Enfin, en janvier 2015, INfluencia s’attardait sur le violent bashing subi par la marque sur le Toile après la campagne TV « Signs » de Leo Burnett. Avec ce spot organique et épuré, l’agence pensait revenir aux racines du contrat de confiance quasi « rousseauiste » entre le leader mondial de la restauration rapide et le consommateur. Il a surtout déclenché une polémique sur Twitter et suscité autant d’énervement voire d’écœurement que d’applaudissements.
Avec STRAW, McDonald’s fait le choix du coup de com qui aurait pu s’assimiler à un vrai projet de developpement. A l’image de l’agence Productman spécialisée en productising et activé par Buzzman. Ou comment passer du coup de com à la production industrielle d’un objet innovant. Après avoir déjà fait ses preuves avec le café Insomny ou des spaghettis pour la promotion de nouvelles séries sur Canalplay, le Nosulus Rift pour Ubisoft, la stratégie de l’agence française pour « BK » avait accouché en décembre dernier d’un pull de Noël interactif et enflammé. C’était l’occasion de rebondir sur la campagne « Papier Cadeau » déjà décalée, menée fin 2015… et de créer un rendez-vous pub ludique et attendu par les consommateurs.