C’est un rendez-vous quadriennal que les diffuseurs télé attendent avec presque autant d’impatience que les sportifs du monde entier. Les Jeux olympiques ont toujours servi de vitrine technologique pour les chaînes qui achètent à prix d’or le droit de retransmettre les compétitions. « Les événements sportifs et les JO à a fortiori représentent d’excellentes opportunités pour les diffuseurs et les organisateurs de médiatiser leurs nouvelles technologies, souligne Laurent-Éric Le Lay, le directeur des sports de France Télévisions qui est le codiffuseur officiel des Jeux de Paris 2024. C’est une plateforme d’innovation sans pareille. » L’histoire confirme ce constat.
En 1936, à peine 2000 récepteurs de télévision étaient utilisés dans le monde, mais les nazis avaient compris que cette nouvelle technologie pouvait être un fantastique outil de propagande.
Les premières images des JO datent de 1908. Elles montraient l’arrivée du marathonien italien Dorando Pietri au White City Stadium de Londres. En 1936, à peine 2000 récepteurs de télévision étaient utilisés dans le monde, mais les nazis avaient compris que cette nouvelle technologie pouvait être un fantastique outil de propagande. La cérémonie d’ouverture des Jeux olympiques de Berlin a donc été le premier grand événement de l’histoire à être retransmis en direct à la télévision. En sus de la poignée de propriétaires d’un « poste », plus de 150000 personnes ont pu regarder les athlètes défiler devant Adolf Hitler grâce aux vingt-cinq grands écrans installés àdans Berlin et en région. Pour ces Jeux, trois caméras, dont une seule était capable de retransmettre en direct et sous réserve d’ensoleillement, filmaient les épreuves sur quatre sites olympiques, et 72 heures de retransmission ont été livrées aux États-Unis en Zeppelin. Au sein du Village, un espace dédié permettait même aux athlètes de suivre les compétitions.
Après la Seconde Guerre mondiale, les Jeux de Londres de 1948 se sont invités dans les salons des sujets de Sa Majesté grâce au tout nouveau petit téléviseur nommé « Olympic », commercialisé spécialement pour cette occasion. La British Broadcasting Company (BBC) a touché, durant ces JO, 60000 foyers et près de 500000 Britanniques, maintenus en haleine grâce à ses six caméras qui ont suividevant l’athlétisme, la boxe, la natation, le football et l’équitation notamment via six caméras. Soixante-quatre ans plus tard, la même BBC proposait pour les JO londoniens de 2012 un streaming de 24 canaux simultanés en haute définition et en direct. Autre temps…
La mondiovision est apparue en octobre 1964 lors de l’édition estivale de Tokyo, qui a été suivie par 800 millions de téléspectateurs.
Cette course au « toujours plus » a continué au fil des décennies. Trois ans après une première expérimentation pour le couronnement de la Reine d’Angleterre et deux ans après son lancement officiel, l’Eurovision a permis à tous les Européens de suivre en directs’émouvoir en live devant sur leur téléviseur petit écran et les épreuves des Jeux Olympiques d’hiver de Cortina d’Ampezzo en Italie en 1956. Quatre ans plus tard, les organisateurs des JO de Rome ont mis en place quarante caméras noir et blanc, onze unités mobiles et autant de magnétoscopes permettant des ralentis. Pour voir des images de leurs athlètes, les Américains devaient attendre que les bandes de film traversent l’Atlantique en avion et rejoignent le centre de New –York en train… La mondiovision est apparue en octobre 1964 lors de l’édition estivale de Tokyo, qui a été suivie par 800 millions de téléspectateurs. En 1972, les fans de sport ont enfin pu regarder toutes les compétitions en couleur. Cette longue liste de « premières mondiales » s’allonge tous les quatre ans.
À Pékin, l’an dernier, le diffuseur CMG a introduit la technologie 4K/8K UHD afin de proposer des images de meilleure qualité. Autour de l’anneau de vitesse, la caméra, baptisée Cheetah (« guépard »), pouvait suivre les patineurs courbés en deux en circulant à 25 mètres par… seconde. Le géant chinois du commerce en ligne, Alibaba, qui était partenaire de ces JO d’hiver, a, quant à lui, développé le premier « influenceur virtuel » afin d’encourager les fans à participer à cet événement. Les Japonais n’ont pas voulu être en reste pour leurs Jeux d’été qui se sont tenus cinq mois plus tard : d. Des hologrammes en 3D pour diffusersaient des matchs de badminton, sur un écran de 50 mètres en résolution 12K pour montrer au public grâce à la 5G les régates des voiliers, etc.. Les fans venus du monde entier auraient pu être gâtés si cette olympiade n’avait pas eu lieu quasiment à huist –clos, pandémie oblige…
Paris 2024 ne dérogera pas à cette règle du « qui dit mieux ». Le défi à relever est immense. Retransmettre en direct à la télévision les 329 épreuves qui vont se tenir du 26 juillet au 11 août 2024 pour les seuls JO (les Jeux paralympiques auront lieu du 28 août au 8 septembre) est un challenge important, surtout quand on sait que les compétitions se tiendrontseront dispatchées sur quinze sites à Paris, douze en Ile-de-France et dix dans sur le reste du territoire. De Lille à Marseille et de Nantes à Lyon en passant par… Tahiti, où les surfeurs pourront effectuer leur bottom turn, floater et autre snap back sur les célébrissimes vagues de Teahupo’o, car ces Jeux ne seront pas uniquement « parigots » mais réellement nationaux, ce qui va compliquer la tâche du diffuseur. La cérémonie d’ouverture représente, à elle seule, un défi unique en son genre. Le parcours du défilé suivra en effet le cours de la Seine entre la gare d’Austerlitz et le pont d’Iéna avant de se conclure par une grande fête au Trocadéro, au pied de la tour Eiffel. Une dizaine de ponts et passerelles seront transformés en plateforme de saut de BMX ou en plongeoir géant tout au long du tracé de six kilomètres qui passera par Notre-Dame, le musée d’Orsay, la Conciergerie et la pyramide du Louvre. Comme pour toutes les éditions des JO depuis ceux de Pékin en 2008, la diffusion télévisée de Paris 2024 sera réalisée en partenariat entregrâce à la collaboration entre les Olympic Broadcasting Services (OBS) et les chaînes partenaires.
La techno OBS habillée par les RHB
Fondé en 2001 et basé à Madrid, OBS est en charge de la production de tous les contenus diffusés en direct à la télévision, à la radio et sur Internet. Cet organisme qui dépend directement du CIO s’engage à « utiliser les technologies les plus avancées pour offrir aux téléspectateurs la plus mémorable des célébrations sportives ». Pour remplir cette mission, OBS ne ménage pas ses dépenses. « Cela représente un coût colossal qui se chiffre en centaines de millions d’euros », révèle Laurent-Éric Le Lay.
Lors de Tokyo 2022, 3,05 milliards de visiteurs uniques ont vu des images tournées par les équipes d’OBS, qui ont fourni près de 9500 heures de contenus. Plus de 150000 heures de programmes ont été diffusées sur les chaînes de télé linéaire, un chiffre en hausse de 33% par rapport à Rio 2016.
Lors des derniers Jeux de Tokyo (qui se sont tenus en 2022 avec deux ans de retard), 3,05 milliards de visiteurs uniques ont vu des images tournées par les équipes d’OBS, qui ont fourni près de 9500 heures de contenus. Plus de 150000 heures de programmes ont été diffusées sur les chaînes de télé linéaire, un chiffre en hausse de 33% par rapport à celui des Jeux de Rio en 2016. 196 millions de fans ont surfé sur le site ou l’application officielle des Jeux, soit trois fois plus que lors de la précédente olympiade. Et ce sont 28 millions de vidéos proposées par les partenaires d’OBS qui ont , quant à elles, été visionnées dans le monde.
Le modèle mis en place par le CIO est, en effet, hybride. OBS affirme ainsi « être au service des diffuseurs détendeurs détenteurs de droits » (RHB pour « rights holding broadcasters »), qui étaient au nombre de 28 pour Tokyo et qui génèrent 73% des revenus totaux du mouvement olympique. « Si OBS est responsable de la production de la couverture multilatérale des Jeux, les RHB personnalisent la programmation pour leurs publics respectifs, souligne l’organisme madrilène. Ils sont particulièrement bien placés pour commenter en détail les compétitions, interviewer les athlètes et couvrir l’actualité des Jeux dans leur langue maternelle. »
Dans deux ans, France Télévisions devra assumer cette mission pour « ses » JO. « OBS va nous fournir les images, mais nous aurons ensuite la charge de les éditorialiser en les sélectionnant, en les habillant et éventuellement en les complétant pour le public français, explique Laurent-Éric Le Lay. Notre objectif est de ne manquer aucune médaille française. Nous aurons également un plateau d’accueil pour accueillir recevoir des invités et nous comptons enrichir les contenus proposés par OBS en faisantavec des interviews et en ayant suivant sur certains sites des caméras qui suivront principalement les athlètes français. Notre ambition pour Paris 2024 est encore plus forte que pour les autres JO. »
Si, traditionnellement, France Télévisions avait l’habitude de basculer ses retransmissions de France 2 à France 3 lors des Jeux, l’an prochain, certaines épreuves devraient être diffusées sur les deux chaînes au même moment. Le groupe public possède toutefois uniquement l’exclusivité des droits de diffusion en clair, car les droits payants ont été attribués au géant américain Warner Bros. Discovery, qui contrôle notamment Eurosport.
Retransmettre en direct à la télévision les 329 épreuves qui vont se tenir du 26 juillet au 11 août 2024 pour les seuls JO (les Jeux paralympiques auront lieu du 28 août au 8 septembre) est un challenge important.
Pour ces Jeux parisiens, OBS a promis de fournir un volume « sans précédent » de contenus. Le cloud, déjà testé en 2022, va être encore plus utilisé pour permettre aux diffuseurs exclusifs d’accéder et de monter plus rapidement les images qui seront mises à leur disposition. D’autres innovations sont également dans les cartons. « Nous réfléchissons actuellement à la manière dont nous pourrions intégrer ces JO dans le monde virtuel, révèle Vincent Nalpas, le directeur en charge de l’innovation des produits et des services à France Télévisions. Nous avons déjà testé l’an dernier en plein cœur de Roland-Garros notre tout premier espace social immersif (ESI). Nous travaillons aujourd’hui pour proposer à tous les Français une expérience encore plus innovante pour Paris 2024. » La pression monte pour les athlètes mais aussi pour les diffuseurs. Le compte à rebours est lancé…
Pour Paris 2024, OBS a promis de fournir un volume « sans précédent » de contenus. Le cloud, déjà testé en 2022, va être encore plus utilisé pour permettre aux diffuseurs exclusifs d’accéder et de monter plus rapidement les images.