Capitale mondiale de l’auto-portrait, Manille ouvre le premier lieu culturel dédié à ce nouvel art. Un contre-pied audacieux, amusant et innovant à tous les autres instituts de la planète.
Quand une ville ou une demeure est qualifiée de musée, c’est que son esthétisme intimidant inspire la contemplation et le respect, pas l’interaction et le commentaire dissipé. Si tous les musées du monde font la guerre au selfie stick, c’est bien la preuve que le smartphone n’est pas franchement le bienvenu dans leurs galeries. Ne pas le comprendre et l’accepter serait d’une mauvaise foi puérile. Mais contester le zèle des gardiens en remarquant que la démocratisation des musées passe aussi par son adaptation aux comportements actuels est un argument recevable. C’est justement pour rendre hommage à un fait de société incontournable que Art in Island ouvre ses portes dans la capitale des Philippines.
Fièrement auto-proclamé premier musée selfie au monde, l’institut offre une réponse artistique innovante à la hauteur de la popularité de l’auto portrait dans sa ville d’accueil : selon une étude publiée en mars 2014 par Time Magazine, Manille est la capitale mondiale du selfie, avec 258 posts sur Instagram pour 100 000 habitants en une semaine. Guère étonnant donc que les premières photos diffusées par le musée sur sa page Facebook fassent s’étrangler les conservateurs du Louvre et du Metropolitan. « Quand vous visitez un musée d’art, vous êtes censés regarder autour de vous sans faire un bruit. Vous ne garderez même pas une preuve de votre passage. C’est pour cela que pour ceux qui pensent que ce genre de visite ne leur convient pas, nous avons construit un musée entièrement dédié aux selfies », commente Art in Island sur Facebook. Pour séduire le plus grand nombre et surtout les « djeunes » pendus à leur téléphone, le musée doit-il devenir plus ludique ? C’est une vraie question.
Au Art in Island, le visiteur peut toucher, s’asseoir et même grimper sur des copies 3D approximatives de peintures classiques, Leonard de Vinci et Van Gogh en tête. En deux heures seulement, le tour est fait. Comme le note le site Hyperallergic, « en retirant ou altérant certaines parties des tableaux, l’œuvre ne devient terminée que quand vous l’avez complétée ».