INfluencia : Quels ont été les enseignements de cette étude qui vous ont le plus étonné et pourquoi ?
Jean-Philippe Caste : Cette étude confirme ce que nous pressentions, mais qui mettait du temps à se concrétiser : la France, où la CTV a longtemps été moins développée qu’ailleurs, rattrape aujourd’hui son retard. 81% des Français la regardent régulièrement, et en termes horaires ils se classent désormais parmi les plus gros consommateurs de télévision connectée, avec 55 heures par semaine. Ce retournement s’explique avant tout par la présence croissante, au sein des foyers français, de téléviseurs connectés : 89% des répondants dans notre pays l’utilisent pour regarder la CTV.
IN. : Pourquoi tant de gens regardent la CTV ?
J.-P. C. : La télévision connectée offre un choix plus large, plus souple et plus abordable que les autres formes de télévision. Et elle propose une publicité s’avère beaucoup mieux ciblée, et donc mieux acceptée, que dans le cadre de la télévision linéaire. Preuve de cette bonne acceptabilité, 77% des sondés utilisent au moins une application de CTV proposant de la publicité. En somme, les téléspectateurs trouvent avec la CTV la possibilité de regarder, à la demande, des contenus variés, de qualité, gratuitement ou à très faible tarif : cela répond à l’ensemble de leurs attentes.
IN. : Pourquoi les jeunes en sont si friands ?
J.-P. C. : Les jeunes possèdent des centres d’intérêt précis, souvent plus « pointus » que ceux du grand public. La télévision linéaire classique, du fait de son modèle économique, traite peu de ces sujets trop spécifiques pour fédérer de larges audiences. La CTV, avec son offre extrêmement diversifiée, se montre capable d’intéresser les jeunes en leur parlant de sujets précisément adaptés à leurs goûts et centres d’intérêt. Le tout sans nécessiter de coûteux abonnements, souvent inaccessibles pour les budgets des jeunes.
IN. : Quelles sont les spécificités du marché français ?
J.-P. C. : Ce marché est venu plus tardivement que les autres pays à la CTV, comme je l’évoquais précédemment, mais les Français se montrent plus enthousiastes qu’ailleurs : 42% d’entre eux regardent exclusivement la CTV, et ont abandonné la télévision linéaire. Ce pourcentage est le plus élevé parmi les cinq pays dans lesquels nous avons réalisé ce sondage : en moyenne, seuls 33,5% des Européens ne regardent plus que la CTV.
IN. : Pourquoi tant de gens regardent la CTV à plusieurs ?
J.-P. C. : Parce que les contenus qu’elle propose correspondent à des choix précis, à des programmes que l’on se rassemble pour regarder. Qu’il s’agisse de sport, de musique ou de séries, la CTV propose des contenus affinitaires, incitant au partage entre individus, autour de centres d’intérêt communs. L’inverse donc de l‘émission sur laquelle on tombe par hasard, et qu’on ne regardera que brièvement si elle ne capte pas immédiatement l’intérêt.
IN. : Comment les marques doivent s’adapter à ce format ?
J.-P. C. : Elles doivent, plus que jamais, prêter attention au contexte dans lequel seront visionnés leurs messages, afin de proposer une expérience fluide, utile, et non intrusive au téléspectateur. Elles doivent utiliser la très riche data que propose la CTV pour mener des campagnes efficaces, auprès de cibles affinitaires et intéressées par leur discours. Cela passe par la définition d’axes créatifs forts, capables de toucher précisément une audience dans un contexte précis.
IN. : Quelles publicités fonctionnent le mieux et pourquoi ?
J.-P. C. : L’étude montre que les formats de 30 secondes obtiennent les meilleures mémorisations. Autre enseignement : les téléspectateurs apprécient particulièrement les formats publicitaires intégrant des formats animés et interactifs, et surtout un « call to action » clair et impactant, de préférence en format texte. Ces données viennent de la technologie « eye tracking » (suivi du mouvement des yeux) utilisée dans notre étude pour mesurer les réactions des sondés à différents formats publicitaires.
IN. : Quel est l’avenir de la CTV ?
J.-P. C. : Nous pensons que ce média va continuer à se développer fortement dans le futur, partout dans le monde. Selon l’IAB, le marché mondial de la CTV a dépassé pour la première fois les 20 milliards de dollars en 2023. Il devrait atteindre près de 23 milliards de dollars en 2024, soit une croissance 32% plus rapide que l’ensemble des médias. Cette croissance s’explique, à 31%, par l’augmentation des budgets publicitaires. Dans l’hexagone, cette progression devrait également s’accélérer, avec la pénétration croissante des TV connectées au sein des foyers français.