10 juillet 2022

Temps de lecture : 4 min

La série, un art à part entière

Ère du Web, des écrans, des réseaux, l’ère est au divertissement et plus créative que jamais. Le phénomène des séries en est une preuve, si massif qu’il faudrait plusieurs vies pour voir et entendre tout ce qui se produit. Constitutives de l’époque, elles jouent sur les publics : leurs émotions, leurs comportements, leur culture. Avouer suivre telle série agit comme un trait de personnalité : dis-moi ce que tu binges, je te dirai qui tu es…

« Attends, tu parles de l’épisode d’hier là ? Pas de spoiler s’teuplé ! » Depuis sa création, la série est le lubrifiant social par excellence, le moyen simple et relativement safe d’engager la conversation à la machine à café, à la cantine ou au déjeuner de famille. Ainsi, les bonnes séries sont transgénérationnelles, de Seinfeld à Friends à Big Bang Theory, de Sex and the City à Gossip Girl à Emily in Paris, de Hartley Cœur à Vif à Skins à Euphoria, chaque génération a sa série sur son thème de prédilection.

Les séries ou la pop culture mondialisée

Ce phénomène est d’autant plus vrai avec l’explosion des plateformes de streaming. Netflix, Prime Video, Disney+, Apple TV+, MyCanal, Salto, OCS… le nombre de shows ne cesse d’augmenter. Aux États-Unis, ce sont 559 séries diffusées en 2021. Dans l’Hexagone, le nombre de tournages dans la capitale reste stable, mais la production de séries rallonge considérablement leur durée (5465 jours en 2019 vs 2970 en 2015).
Les séries sont devenues le pinacle de notre pop culture mondialisée et le cœur d’une grande partie de nos interactions sociales. Si l’art est une œuvre humaine destinée à toucher les sens et les émotions, alors la série a conquis ses galons. Et comme tout art qui se respecte, elle a une influence considérable, concrète et grandissante sur nos vies au quotidien.

Les séries sont devenues le pinacle de notre pop culture mondialisée et le cœur d’une grande partie de nos interactions sociales.

Ce que nous apprenons

Les meilleures séries ne font pas que nous divertir, elles nous inspirent, nous donnent envie d’en savoir plus sur le thème abordé, nous poussent à apprendre de nouvelles choses et à explorer de nouveaux horizons. Après la diffusion du Jeu de la Dame sur Netflix, le nombre d’utilisateurs du site Chess.com est passé, dans le monde, de 30000 à plus de 110000 par jour. Suite au succès de la série Lupin, sur Netflix toujours, le livre s’est classé en tête des meilleures ventes Fnac et Amazon. Cet événement inattendu a même poussé les éditions à réimprimer près de 60000 exemplaires.

Les vêtements que nous portons

L’art et la mode ont toujours entretenu une relation étroite, dont les séries se sont indéniablement fait le porte-voix. Peaky Blinders a remis au goût du jour le costume trois pièces et les coupes de cheveux étranges. Les Chroniques des Bridgerton ont fait redevenir tendance le corset : à tel point que des marques de fast-fashion, comme Asos ou Shein, l’ont à nouveau commercialisé. Et Euphoria fait et défait les tendances : les recherches de pièces de la marque Collina Strada portées par les personnages de la série ont augmenté de 154% en 2021.

Les endroits que nous visitons

Attention, alerte au chiffre qui tue : un voyageur sur cinq dans le monde visite un endroit parce qu’il l’a vu dans sa série préférée (étude TripAdvisor). Ainsi, à la suite de la diffusion de Game of Thrones, le tourisme de l’Islande a explosé de 245% entre 2000 et 2015. Chernobyl a, quant à elle, créé l’avènement du tourisme nucléaire ! Késako ? Un terme utilisé par de nombreux médias pour qualifier les allumés qui, avant que la guerre n’enflamme l’Ukraine, ont décidé de faire de la zone d’exclusion de la centrale de Tchernobyl un lieu de villégiature crédible. Et ne parlons pas des touristes surexcités à la recherche d’une certaine Emily un peu partout dans la capitale.

à la suite de la diffusion de Game of Thrones, le tourisme de l’Islande a explosé de 245% entre 2000 et 2015.

Les prénoms de nos enfants

Les Dylan et Kelly des années 1990, ces prénoms tout droit sortis de Beverly Hills 90210 ou Melrose Place ont laissé la place à d’autres. Un bon exemple est celui du prénom « Arya », en Amérique du Nord. S’il existait déjà formellement, depuis le succès de la série Game of Thrones, ce baptême a augmenté de 450%.

Les gestes qui sauvent

Un médecin de Marburg a réussi à sauver un de ses patients empoisonnés au cobalt en se souvenant d’un épisode de Dr House qu’il avait vu récemment. Et un jeune homme américain a pu également secourir une femme inconsciente en reproduisant la chorégraphie de réanimation cardio-respiratoire sur le rythme de la chanson Stayin’ Alive des Bee Gees qu’il avait vue dans un épisode de The Office. La dame a finalement repris conscience et a été envoyée à l’hôpital. Anecdotique peut-être, mais des vies sauvées tout de même !

Cocorico !

Enfin, volet important du scénario, les séries françaises cartonnent à l’étranger. En 2020, la production tricolore signe même un record historique avec des ventes hors de France qui atteignent 355 millions d’euros. Un résultat qu’il convient de souligner puisqu’il confirme une tendance de près de dix ans. Sur le podium des champions de l’exportation : Le Bureau des légendes, Dix pour cent, ou encore Lupin, première série française à être dans le top 10 aux États-Unis.

Comme le souligne Dominique Boutonnat, président du Centre national du cinéma et de l’image animée (CNC), « le dynamisme de l’export français a été exceptionnel. On a une formidable opportunité de donner une vitrine très importante de notre culture à l’étranger ». L’âge d’or des séries est donc une opportunité unique pour d’autres pays que les États-Unis d’entrer dans la culture populaire mondiale. À l’instar des Narcos, Casa de Papel, Octobre ou The Crown, il est temps de saisir nos plus belles plumes pour continuer à faire rayonner l’exception culturelle française au-delà de nos frontières afin de transmettre des histoires, des thèmes et les valeurs qui nous sont chères. Parce qu’on le sait maintenant, les séries ont une vraie influence sur la vie de ceux qui les regardent.

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