Je t’aime, moi non plus… L’arrivée de ChatGPT a pris la planète de cours. La puissance et l’efficacité de l’intelligence artificielle générative ont surpris les technophiles les plus avertis. Les internautes « lambda », dont nous faisons pour la plupart d’entre nous partis, se sont amusés à poser des questions à cette plateforme gratuite pour tester ses capacités. Une traduction par-ci, un document tiré d’une courte interrogation par-là… Les résultats obtenus en quelques secondes nous ont impressionnés mais aussi inquiétés. Le tout dernier rapport dédié à la Tech du célèbre Trust Barometer 2024 d’Edelman nous confirme ce constat avec des chiffres pour le moins spectaculaires.
Une défiance énorme
« Notre étude montre une défiance très forte des consommateurs envers l’IA, résume Yoni Lawson, le directeur du pôle tech chez Edelman France. Si 67% des personnes que nous avons interrogé disent avoir confiance dans la technologie, elles ne sont que 33% à avoir le même sentiment vis-à-vis de l’intelligence artificielle. Cette différence de 34 points est très significative. La France est le pays dans lequel cette défiance est la plus forte. Plusieurs raisons expliquent ce phénomène. Beaucoup de gens craignent notamment que l’IA dévalue ce qui fait de nous des humains et cela crée un climat anxiogène. Ils pensent également que cette technologie va avoir un impact négatif sur leur quotidien et beaucoup jugent que les gouvernants ne sont pas assez outillés pour réguler ces nouveaux outils. »
Renseigner pour rassurer
Pour que l’IA soit bien acceptée et intégrée, il est en effet crucial que les gouvernements, la communauté scientifique, les médias et les ONG s’engagent. Ces institutions doivent faire preuve de pédagogie pour expliquer les bénéfices et les risques de l’IA et démontrer la transparence de leurs tests afin de prévenir d’éventuelles dérives. Les attentes des particuliers sont très fortes dans ce domaine.
Lorsqu’on demande aux plus sceptiques les facteurs qui pourraient les inciter à faire davantage confiance à l’IA, 35% souhaitent que leurs gouvernements régulent davantage ce secteur. Les politiques sont jugés plus à même de mener cette mission que les ONG (26%), les entreprises (25%) et les médias (20%). Cette mise sous tutelle officielle de l’IA a déjà commencé. Si tout le monde semble d’accord pour mettre en place des barrières, les avis divergent concernant leur nature. Des différences plus que notables existent également d’un « bloc » à l’autre.
Un combat en ordre dispersé
« Si l’UE a déjà dégainé une première loi, des différences existent parmi les Etats-membres. Certains, comme la France, veulent s’assurer que ces régulations ne limitent pas l’essor de l’innovation sur notre continent, juge Yoni Lawson. Les Etats-Unis continuent, eux, de privilégier leurs acteurs locaux en leur imposant une régulation très « light ». La Chine, elle, ne régule rien du tout afin d’encourager la création de champions locaux de taille mondiale et quand ces derniers commenceront à devenir trop puissants, c’est là que le régime leur imposera des règles strictes comme on l’a déjà vu sur internet. Cette situation risque d’engendrer deux blocs et d’encourager un découplage technologique entre le monde occidental et l’Asie. Il y a aura des technologies asiatiques pour cette région comme on le voit déjà pour le net et des technologies occidentales pour le reste du monde. TikTok est pour l’instant la seule plateforme qui parvient à jouer sur ces deux tableaux mais cela n’est pas certain que cela dure bien longtemps… » La prochaine guerre froide sera technologique et loin d’être virtuelle…