27 novembre 2024

Temps de lecture : 3 min

La « privatisation » de 60 Millions de Consommateurs : une décision critiquée

Dans un souci d'économie budgétaire, l'État a récemment annoncé la vente du magazine de défense des consommateurs. Cette décision suscite des réactions parmi les défenseurs des droits des consommateurs…
L'Etat veut vendre le magazine 60 millions de consommateurs

Beaucoup de Français l’ignoraient avant d’apprendre la nouvelle mais le magazine 60 Millions de Consommateurs est édité par un établissement public, l’Institut national de la consommation. L’imparfait devrait toutefois bientôt être utilisé car la secrétaire d’État chargée de la consommation, Laurence Garnier, a annoncé vouloir trouver un repreneur pour cette revue qui a publié son premier numéro en décembre 1970. Cette publication ne se porte, il est vrai, pas très bien, un mal hélas fréquent dans la presse écrite.

Chute des abonnés, déficit… plan de relance avorté

Son nombre d’abonnés est passé de 140.000 à 76.000 en cinq ans et son « déficit persistant depuis sept ans a épuisé sa trésorerie », explique la ministre qui souhaite « optimiser l’utilisation des deniers publics ». La sénatrice de Loire-Atlantique a, en conséquence, décidé d’engager des « démarches en vue de trouver un repreneur professionnel et expert du secteur, capable d’investir dans le numérique et d’impulser une nouvelle stratégie marketing et commerciale ». L’objectif avancé est de « faire bénéficier le magazine de moyens et d’une expertise nouvelle, qui lui permettront d’attirer de nouveaux lecteurs » pour assurer la « pérennité » du média.

Cette décision a pris de court la cinquantaine de salariés de la revue qui se préparaient à négocier un plan de relance et de transformation, conformément à l’accord obtenu en mai dernier avec Olivia Grégoire, leur précédente interlocutrice à Bercy, qui avait même promis une rallonge budgétaire de 3,2 millions d’euros. Ce programme avait été adopté à l’unanimité lors d’un conseil d’administration réunis au mois de septembre. Dans un communiqué, Olivia Grégoire s’est émue de cette décision gouvernementale : « Je déplore amèrement que l’arbitrage que j’avais pu obtenir n’ait pas été maintenu », regrette la députée parisienne qui a adressé ses « pensées aux salariés de l’INC, ainsi qu’aux consommateurs qu’ils se sont toujours attaché à informer de leur mieux ».

La « sidération » des collaborateurs du magazine est aussi liée au fait que l’actuelle ministre leur avait promis, après une première rencontre organisée le 30 octobre, qu’elle allait prendre son temps « pour bien considérer la situation ». Il ne lui aura fallu finalement que quinze jours pour annoncer « le projet de vente du journal, sans fournir de réponses aux élus sur les modalités de vente, le sort du personnel et les conséquences pour l’INC, pour les consommateurs et les associations de consommateurs », critiquent les salariés.

Une lettre ouverte contre la privatisation

L’avenir de ce titre est un serpent de mer depuis près d’une décennie. Un premier plan social bouclé en 2021 s’était conclu par onze départs. L’Institut national de la consommation, dont il dépend et qui été fondé en 1966 afin d’assurer « la bonne information des consommateurs », a, lui aussi, vu ses revenus fondre comme neige au soleil. Un rapport parlementaire publié en 2022 révélait une « baisse progressive du montant de subvention » versé à l’INC qui sont passés de 6,3 à 2,7 millions d’euros entre 2012 et 2020.

La vente annoncée de 60 Millions de Consommateurs, qui avait récemment tenté de trouver de nouvelles sources de revenus en lançant notamment un magazine destiné aux juniors, n’est pas critiquée uniquement par ses salariés mais aussi par plusieurs importantes associations de consommateurs. Une dizaine d’entre elles, dont l’Adeic (Association de défense, d’éducation et d’information du consommateur), l’Afoc (Association Force ouvrière consommateurs), Indecosa-CGT (Association pour l’information et la défense des consommateurs salariés-CGT) et CLCV (Consommation, logement et cadre de vie) s’insurgent contre cette « privatisation ». « Le gouvernement décide de privatiser la revue 60 Millions de Consommateurs, bel exemple du service public », condamne un communiqué commun. « Pour défendre les consommateurs et leurs organisations, pour informer de manière impartiale, pour développer ce bel établissement public de l’INC, nous refusons cette privatisation improvisée », précise ce document. Une importante association n’a pas signé cette lettre ouverte. Et pour cause…

Un repreneur ?

L’UFC-Que Choisir, qui a été créée en 1951, a en effet reconnu être intéressée par un rachat de son rival historique, à condition de ne pas le faire « tout seul ». Ce rapprochement lui donnerait, de facto, le monopole de la niche des magazines de tests et de défense des consommateurs. Ces derniers sont de plus en plus compliqués à comprendre, comme l’a récemment décrit une étude de l’institut Kantar. Leurs « besoins non formulés » sont aujourd’hui au cœur de toutes les attentions des marques. Beaucoup de particuliers attendent que ces dernières agissent davantage en faveur de la société.

Le futur repreneur de 60 millions de consommateurs est prévenu…

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