INfluencia : L’Equipe envoie 33 journalistes pour suivre les Jeux Olympiques de Tokyo, qui débutent ce vendredi 23 juillet. Avec quelles ambitions ?
Jean-Philippe Leclaire : les moyens que nous mettons pour couvrir les Jeux Olympiques de Tokyo sont presque identiques à ceux que nous avions à Rio, où nous étions seulement quatre de plus. C’est d’ailleurs la force de L’Equipe que d’arriver sur place avec beaucoup de spécialistes des différents sports. Et, pour la rédaction, quand on est un spécialiste d’athlétisme, de natation, encore plus de judo, d’escrime ou d’aviron, rien ne vaut les Jeux. Sur place, les JO de Tokyo ne seront pas des Jeux comme les autres mais, pour L’Equipe, ce ne sont clairement pas des Jeux aux rabais ! Ils seront aussi le vrai coup d’envoi de Paris 2024.
IN : et, en attendant, le coup d’envoi d’un vrai parcours sanitaire…
JP.L. : on a fait deux tests PCR en 72 heures avant de partir et on fera trois tests salivaires pendant trois jours à l’arrivée. Pendant 15 jours, notre seul circuit possible sera entre l’hôtel des jeux et le site olympique avec transport olympique. Pour la première fois de l’histoire des jeux, les journalistes devront déclarer la veille à 16h les événements qu’ils veulent couvrir le lendemain… La pire contrainte de toutes, c’est qu’on sait déjà que les stades seront vides. Le Japon nous impose un certain nombre de conditions sanitaires que l’on est prêts à accepter, mais on sera sans doute face à deux philosophies un peu différentes de la pandémie. Je vois ces jeux comme une sorte de compromis entre les Japonais et le reste du monde. On comprend leurs préoccupations mais ils ont eu du temps pour se préparer. On n’a pas l’intention d’arriver en s’excusant de faire notre boulot et les athlètes n’ont pas l’intention de s’excuser de faire leurs compétitions.
IN : y a-t-il de vraies nouveautés dans le dispositif éditorial de L’Equipe ?
JP.L. : les Jeux de Rio en 2016 avaient été très importants pour nous car cela avait été notre première expérience de JO en tant que rédaction unique, avec une approche print et digitale. Compte tenu du décalage horaire, le rédacteur en chef, c’était l’horloge ! Cinq ans plus tard, on est en rédaction unique toute l’année et tout le monde est rodé. Il y aura 30 pages par jour dans le quotidien, une Pause Sushi à midi avec toutes les informations de la mi-journée et, chaque soir à 20 heures une Night Olympic Session. Les JO sont aussi l’occasion de nous déployer sur d’autres terrains de jeu comme Snapchat, avec une édition spéciale Jeux Olympiques sur Snapchat Discover, les podcasts avec une mini-série On your marks consacrée au 100 mètres, les longs formats Explore avec Les vainqueurs du 100 m, autour de 14 athlètes qui ont marqué l’histoire.
IN : quelles sont les contraintes du décalage horaire de 7 heures entre Tokyo et Paris ?
JP. L. : sur des événements comme les JO avec des décalages horaires asiatiques ou océaniques, heureusement qu’on a le numérique ! A Atlanta en 1996 ou à Sydney en 2000, où il n’y avait que le journal papier, on avait toujours la frustration d’avoir des papiers qui paraissaient à J-1 de l’événement et à J+1 pour le compte-rendu, avec une espèce de temps mort entre les deux qui jouait contre nous. C’était souvent Le Monde qui emportait la mise car ils paraissent en début d’après-midi. Cette année, la cérémonie d’ouverture commence à 20 heures à Tokyo, donc à 13 heures à Paris. L’article aura tout le temps d’être dans le journal du lendemain, qui est bouclé vers minuit sur le print. Quand les décalages horaires sont importants, il y a toujours la tentation de repousser plus loin l’heure du rendu du papier et il faut faire attention à ne pas manquer de sommeil. Sur ces compétitions, on n’a pas du tout les mêmes contraintes que les athlètes, mais on a aussi des horaires très compétitifs pour pouvoir sortir les papiers dans des temps records.
IN : en termes d’enjeux sportifs, peut-on s’attendre à de vraies belles unes ?
JP. L. : j’espère bien ! D’un point de vue français, il y aura évidemment une belle histoire autour de Teddy Riner en compétition chez les Japonais. C’est aussi fort que de jouer au foot chez les Brésiliens ! En judo, la France a aussi la meilleure équipe féminine de tous les temps avec presque une chance de médaille d’or par jour. Plus largement, ces JO permettront de voir qui va succéder à Usain Bolt en athlétisme, si Caeleb Dressel va s’imposer et gagner pléthore de médailles d’or en natation. En gymnastique, on suivra Simone Biles, qui est sans doute la plus grande star depuis Nadia Comaneci. En tennis, Novak Djokovic qui veut compléter son possible « Golden Slam » avec une médaille Olympique et la Japonaise Naomi Osaka. En vélo, Tadej Pogacar arrive directement du Tour de France et retrouvera Mathieu van der Poel, le petit fils de Poulidor… Il y aura de belles histoires un peu partout !