“L’intelligence est l’ensemble des processus trouvés dans des systèmes, plus ou moins complexes, vivants ou non, qui permettent d’apprendre, de comprendre ou de s’adapter à des situations nouvelles”, nous résume Wikipedia.
L’émergence concrète et tangible de l’intelligence artificielle générative a indubitablement créé une situation nouvelle. Surprise, émerveillement et choc. Open AI a révélé le champ des possibles actuels et personne ne s’y attendait. La balle est maintenant dans le camp des intelligences humaines pour apprendre, comprendre et s’adapter à cette situation inédite. Une nouvelle coopétition d’intelligences est apparue et il est au mieux naïf de croire qu’on peut brider, arrêter ou ignorer l’artificielle.
Espérer que les IA ne sauront pas bien exécuter certaines tâches, articuler certains raisonnements ou proposer des idées aussi bien que des humains est un vœu pieux. Le scénario certain est que pour l’ensemble des tâches d’exécution intellectuelle, l’IA soit meilleure que l’humain.
Plus rapide, plus précise, plus experte, sans compter infatigable, disponible et serviable. Autrement dit, toutes les personnes, tous les talents humains qui fondaient leur compétence exclusivement sur l’intelligence verticale, cette superposition d’hémisphère gauche, de besogne et d’expertise technique ont un problème à résoudre. Ils vont pouvoir accomplir leurs missions nettement plus rapidement. Mais que vont-ils faire de tout ce temps libre ? Tous les experts, « sachants » et consultants vont devoir s’adapter à cette nouvelle situation et passer à l’intelligence hybride.
La fin de la verticalité ?
Depuis fort longtemps, le monde du travail célèbre et encourage la verticalité, l’expertise. Vous avez des experts pour tout. Pour vendre sur Amazon, créer des sites web, concevoir des applications mobiles, élaborer et analyser des reportings, coder en Java ou en Python, écrire un protocole d’accord ou un contrat de mariage, rédiger des communiqués et des articles, réaliser et diffuser des publicités sur Google ou un autre média ayant ses propres codes…
Leur atout principal et rassurant était le plus souvent l’expertise, le savoir-faire vertical acquis et profond, avec bien sûr une part nécessaire d’empathie et de conception, mais surtout une part majoritaire d’exécution. Cette part d’exécution va sans aucun doute disparaître.
L’expert vertical a perdu son expertise, sa différence, sa raison d’être.
L’intelligence hybride n’est pas seulement une intelligence augmentée, c’est une intelligence plus horizontale, plus déployée. En faisant faire à une IA l’exécution, on gagne énormément de temps. Chez l’expert vertical, on peut l’estimer à plus de 60 %. Mais que va-t-il faire de tout ce temps ? Il va s’adapter à la situation nouvelle et se déployer. S’horizontaliser.
Passer du I au T. Couvrir de nouvelles expertises et savoir-faire, relier les points entre plusieurs verticalités, intégrer un territoire plus large que son silo d’origine. Ce sera facile, puisque l’exécution par silo sera faite par une IA. L’intelligence horizontale, c’est l’intelligence de la culture. De ce qui reste quand on met de côté la technique et l’exécution.
C’est aussi l’intelligence de la simplicité et de l’intuition, de la valeur ajoutée, celle qui nous arrive non pas parce qu’on sait déjà, que c’est logique ou que cela a déjà été fait mais parce que cela a plus de sens et vaut la peine d’être envisagé. Cette horizontalité qui élargit le champ des possibles est en réalité rendue possible pour les humains par l’IA.
Le comment change le quoi
Dans le modèle émergent de l’intelligence hybride, nous lâchons prise. Nous cessons de focaliser sur ce que nous pensions être nos points forts pour embrasser plus de sujets, de sens et d’opportunités et faire la différence grâce à l’IA, gagnant ainsi en pertinence, en justesse, en inspiration, en différence et en valeur. Une fois de plus, le comment change le quoi.
L’intelligence augmentée, c’est ce qui permet à un cabinet de conseil de s’élargir à la communication, mais aussi à une agence de communication de s’élargir au conseil. De passer d’une expertise verticale à un conseil faisant la différence. Le marché des RH va pivoter pour cesser de valoriser (parfois follement) des “super” experts à peine sortis de l’école, compétents sur un silo, pour mieux valoriser la culture, l’expérience, la capacité à penser de façon horizontale, élargie mais intégrée. L’IA sera l’experte responsable de l’exécution et la Data, celle qui vérifie et mesure. Mais une IA sans instruction pertinente et intelligente est comme un cuisinier sans amour, elle risque de générer uniquement de la médiocrité.
Des légions entières de cols blancs vont devoir revoir leur conception de leur intelligence et donc de leur rôle, renonçant au confort du silo de l’expertise verticale et du savoir-faire pour l’aventure de la culture horizontale et du savoir-penser. Ceux qui refusent cette nouvelle réalité choisiront ainsi de lâcher l’affaire pour toucher un revenu universel, comme l’anticipe Elon Musk, leur permettant de consommer dans un monde nouveau qu’ils ne comprendront pas et dans lequel ils seront inadaptés. L’hybridation est en marche…