5 juin 2013

Temps de lecture : 3 min

L’imprimante 3D et l’imaginaire du futur

D’où viennent les technologies du futur ? L’influence de la fiction, de l’imaginaire et de la mythologie est prégnante, comme dans toute évolution technologique.

L’imprimante 3D est sûrement un des sujets les plus à la mode du moment. Un de ces buzzwords qui fait lire, liker et tweeter les influenceurs. Mais ce concept n’a rien de nouveau et tire son essence de très loin. En effet, « imprimer » et « reproduire » des objets à partir d’une matière brute est un fantasme absolu, qui se rapproche de la création divine. Il est fascinant de se rappeler que dans la Bible, Dieu crée par exemple l’homme en le « reproduisant », se « copiant » à partir d’une matière brute : de l’argile (« Dieu créa l’homme à son image, il le créa à l’image de Dieu, il créa l’homme et la femme » – Génèse 1,26-27).

Ce fantasme de « reproduction » parfaite d’objets voire d’êtres vivants est resté un fantasme récurrent présent dans bon nombre de mythologies. Plus près de nous, l’inventeur et auteur de science fiction Arthur C. Clarke parlait d’une « machine à répliquer » dès les années 60 et en terme prophétique d’une machine capable de « répliquer les objets comme on imprimerait des livres ». En 1972, une œuvre de fiction consacre même à ce fantasme un long-métrage entier : « Tintin et le Lac aux requins », dans lequel le professeur Tournesol inventait une sorte de photocopieur en trois dimensions capable de reproduire n’importe quel objet. Rastapopoulos tentait de s’emparer de l’appareil afin de reproduire des œuvres d’art et des objets dangereux.

Dès les années 80, cette évolution technologique semble à portée de main*. Certains voient dans l’avènement de l’impression 3D une troisième révolution industrielle. Selon bon nombre d’experts le développement de cette technologie pourrait même faire revenir la production dans les pays industrialisés et riches, la main d’œuvre serait étant quasiment devenue obsolète.

Mais au-delà de cette réalité, il est intéressant de se souvenir que l’imprimante 3D rappelle certains des fantasmes technologiques les plus fous. Comme les voyages dans le temps ou les voitures volantes, dont tous les prévisionnistes de tous poils nous assuraient que les villes en seraient remplies dès « l’an 2000 ».

Ces fantasmes technologiques sont tous nés de la fiction, de la religion et de la mythologie (les voitures volantes des œuvres de science fiction, les voyages dans le temps de bon nombre de textes sacrés et de livres). Tout comme l’aviation est née du mythe d’Icare. Le futur et le progrès ont toujours été marqués par la culture. Il existe un vrai déterminisme culturel et mythologique sur les évolutions technologiques. Dans un livre brillant paru en 1978** Bertrand Méheust avance d’ailleurs une piste intéressante : il peut arriver que la dimension linguistique et imaginaire « mange » le réel. En prenant l’exemple des apparitions d’OVNIs, il explique en quoi les témoins d’une observation d’OVNI à une époque donnée seraient influencés par la référence culturelle et visuelle de la culture de l’époque. Ce seul référent explique en quoi la même observation évoque un bateau dans le ciel au XVIème siècle ou un appareil volant reprenant trait pour trait les œuvres de Jules Verne à la fin du XIXème siècle. Il semble que nous soyons de notre côté très profondément influencés par l’imaginaire très fort de la Science-Fiction… Ce livre pose la question de l’antériorité de la SF sur le phénomène des soucoupes volantes. Comment expliquer que Verne ou les auteurs des pulps au tout début du XXe siècle aient pu présenter avec tant de détails un phénomène qui n’apparaîtra que plusieurs années plus tard ?

C’est la preuve que le futur et le progrès jusque dans ses évolutions technologiques viennent de la culture. Car la culture « crée ». Son étymologie en est d’ailleurs la preuve : culture vient du latin cultura qui signifie « l’action de cultiver la terre, de produire ». L’imaginaire est réel.

Thomas Jamet – Moxie – Président
thomasjamet.com / @tomnever
Auteur de « Ren@issance Mythologique, l’imaginaire et les mythes à l’ère digitale » (François Bourin Editeur ) et  « Les Nouveaux défis du Brand Content – Au-delà du Contenude Marque » (Pearson Village Mondial)

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