Apple a fait sa révolution avec sa tablette numérique iPad et Samsung s’apprête à lancer la sienne avec beaucoup d’ambition, sans compter les projets d’Archos ou encore Microsoft. Analyse d’un nouveau secteur qui nous pousse à toucher le monde et à le voir différemment.
Les tablettes numériques ont radicalement changé notre mode de consommation des écrans. Cette technologie propose une expérience assez incroyable pour tous ceux qui l’ont testée, évidemment très différente d’un « surf » classique. Au-delà des considérations techniques et des avantages de tel ou tel appareil, le tactile induit un contrat de lecture très différent. Surfer sur le web, travailler, regarder une vidéo, des photos ou encore twitter, consulter son profil Facebook en touchant du doigt le contenu peut paraître gadget. Il n’en est rien. Il s’agit d’une redéfinition fondamentale de la consommation des écrans, de manière plus fluide, plus simple, plus liquide… tactile, tout simplement. Ce n’est finalement pas un hasard si le mot « digital » est étymologiquement proche du mot « doigt » et donc du toucher.
Il y a là quelque chose de très naturel et de très charnel qui induit à se rapprocher encore plus du contenu, à le faire sien encore plus que s’il était médié par une souris ou un clavier. Car toucher du doigt le contenu c’est quelque part se l’approprier, le ressentir, le voir différemment et le rendre plus personnel.
Cette nouvelle réalité résonne étrangement avec la formule de Manet : « Je peins ce que je vois » qui résume la volonté des peintres impressionnistes à rendre compte d’une vision personnelle, subjective du monde. Il est passionnant de se rendre compte que l’impressionnisme est né en Europe à la fin du XIXème siècle, dans une époque où les progrès s’accéléraient et les modes de vie évoluaient au moins aussi rapidement qu’ils ne sont en train d’évoluer aujourd’hui. La différence qu’imposa l’impressionnisme par rapport à la peinture académique fut de savoir capturer les impressions plutôt que le côté « figé » des choses.
D’une certaine manière, les tablettes tactiles, en ce qu’elles incarnent une réalité encore plus personnelle, charnelle, appropriable (et car elles ont la capacité à interagir de manière plus souple avec la réalité) incarnent d’une certaine manière l’impressionnisme des temps post-modernes. La suppression d’interfaces comme la souris ou le clavier, devenus inutiles, aident à capturer de manière fugace et à rendre encore plus vibrantes les émotions et les impressions.
De « Je peins ce que je vois » à « je vis ce que je touche ». Vers un nouveau réalisme contemporain ?
Thomas Jamet – NEWCAST – Head of Entertainment & brand(ed) content, Vivaki (Publicis Groupe)
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