20 juillet 2020

Temps de lecture : 2 min

Harcèlement : PimEyes le site polonais de reconnaissance faciale qui fait peur

À partir d’une simple photo, PimEyes est capable de retrouver l’ensemble de vos clichés disséminés sur le web. Une technologie de reconnaissance faciale à la portée des particuliers qui risque de banaliser le harcèlement en ligne.

Si vous vous êtes déjà demandé combien de photos de vous circulent dans les arcanes d’Internet, sachez que votre curiosité peut enfin s’assouvir. Plus besoin de taper votre nom de famille dans Google Images, il suffit de se rendre sur le site polonais PimEyes, d’accepter ses conditions d’utilisation et de fournir une photo de vous. L’algorithme se charge d’analyser les données biométriques de votre visage puis un moteur de recherche parcourt le web pour identifier les photos correspondantes. Résultat, des dizaines de photos que vous aviez peut-être oubliées sortent des armoires du numérique. De quoi rire en famille et de s’assurer des traces que nous laissons en ligne. « Commencez à protéger votre vie privée » est-il d’ailleurs écrit en page d’accueil.

Trois milliards de photos exploitables

Derrière la dimension divertissante du site se trouve pourtant un système de reconnaissance faciale qui pourrait menacer durablement le droit à la vie privée. Le danger ne vient pas de la technologie en tant que telle, mais de sa libre utilisation et de la taille des banques d’image. En effet, n’importe qui peut détourner l’esprit de l’application pour en faire un outil de surveillance : chercher des photos d’une personne qui nous obsède, trouver des photos similaires de personnes nues… En outre, le site brasse plus de trois milliards de contenus via des médias sociaux comme Facebook et Youtube. Un fonctionnement qui était à l’origine l’apanage des services de sécurité intérieure comme la DGSI.

Des photos de femme fréquemment associées à celle d’actrices porno

Silkie Carlo, le directeur de Big Brother Watch, une ONG de défense des libertés numériques, s’est insurgé contre ce site internet et les dangers qu’il représente pour la vie privée des plus vulnérables. « Cette puissante technologie de surveillance commercialisée auprès des particuliers est effrayante. Elle fait courir des risques sans précédent aux femmes et aux enfants » détaille-t-il. Les femmes et les jeunes seraient en effet les plus visés par cette technologie car c’est là que les imprécisions de l’algorithme sont les plus élevées. Les photos de femme sont ainsi fréquemment associées à celle d’actrices porno au visage semblable.

Du harcèlement à la surveillance étatique et commerciale

Le directeur de Big Brother Watch s’inquiète également de l’étendue des dérives possibles. « Cette technologie permettra une surveillance étatique, un contrôle commercial et même un harcèlement à une échelle inimaginable » précise-t-il. Une triple peine qui pourrait mener à une dystopie catastrophique : l’Etat, les entreprises et les individus pourraient collectivement profiter d’une démocratisation de la reconnaissance faciale afin de satisfaire leurs intérêts. PimEyes a d’ailleurs déjà travaillé avec la police via Paliscope afin de récolter des données à l’étranger.

Une version prenium avec un système d’alerte

Le site internet est en outre utilisable gratuitement, mais une version payante permet d’obtenir des alertes en cas de nouvelles photos correspondantes. Il est ainsi possible de créer jusqu’à 25 alertes sur 25 personnes distinctes afin de savoir instantanément si de nouvelles photos sont apparues. Une monétisation de la reconnaissance faciale qui n’est pas nouvelle. En 2016 déjà, une entreprise russe avait lancé FindFace, une app similaire dans laquelle il était possible de payer pour des options. Elle avait été fermée peu de temps après pour des questions de monopole de la surveillance russe.

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