28 avril 2016

Temps de lecture : 5 min

Un Français sur quatre conscient d’être remplacé par un robot

La dernière étude Randstad, issue de leur plateforme de recherche Re.source, livre le ressentiment mondial des travailleurs face à une forme de " grand remplacement ". INfluencia vous livre l'intégralité de la synthèse proposé par un des leaders mondiaux de l'interim et des services en ressources humaines.

La dernière étude Randstad, issue de leur plateforme de recherche Re.source, livre le ressentiment mondial des travailleurs face à une forme de  » grand remplacement « . INfluencia vous livre l’intégralité de la synthèse proposé par un des leaders mondiaux de l’interim et des services en ressources humaines

La question de l’avenir du travail est aujourd’hui débattue avec une rare intensité. En cause, la digitalisation, qui donne à voir une nouvelle économie. Celle-ci ne se limite pas au phénomène de plateformisation qu’incarnent les start-up les plus renommées de la Silicon Valley. Dans les usines et les bureaux, l’automatisation gagne aussi du terrain. Les salariés disposent d’outils qui rendent leur bureau « mobile » et accessible depuis leur smartphone tandis que les robots, bénéficiant des progrès de l’intelligence artificielle, sont toujours plus sophistiqués. La robotisation, dans ce contexte, est parfois perçue comme une menace pour l’emploi. Risque réel ou supposé, RE.SOURCES rend compte des forces en présence.

A l’heure où la robotisation nourrit les craintes les plus diverses sur l’emploi, plus d’un salarié français sur quatre (27 %) pense que son métier sera automatisé dans les cinq à dix prochaines années. Selon la dernière étude Randstad Workmonitor, menée en France, en novembre 2015 auprès d’un panel de 1 000 employés âgés de 18 à 65 ans, 6 % des salariés interrogés jugent inévitable cette évolution tandis que 21 % l’estiment probable. Ce résultat place l’Hexagone légèrement en retrait de la moyenne globale, à 31 %. Conduite dans 34 pays, l’étude Randstad Workmonitor révèle que c’est en Asie que les salariés sont les plus nombreux à considérer l’automatisation comme inéluctable. L’Inde, la Malaisie et la Chine -le trio de tête- sont ainsi les seuls pays où une majorité de salariés (plus de 50 %) estiment que leur métier sera effectué par un robot à moyen-terme. En Inde, cette proportion atteint même 69 %. A l’inverse, c’est en Europe que les salariés jugent le risque de substitution du robot à l’humain le plus faible.

Et pourtant. La récente victoire d’AlphaGo contre le champion du monde du jeu de go pourrait avoir marqué un tournant dans la rivalité entre l’Homme et la machine. Non pas que ce succès fut le premier : il y a près de vingt ans, Deep Blue, le superordinateur d’IBM, avait vaincu Garry Kasparov, alors champion du monde d’échecs. AlphaGo, développé par Google, se distingue cependant de son illustre prédécesseur. Là où les algorithmes de Deep Blue se basaient sur le bruteforcing, à savoir le calcul « bête et méchant » de l’ensemble des combinaisons possibles, AlphaGo s’appuie sur le deep learning. Une approche différente qui permet à la machine de réfléchir et de s’adapter au profil de son adversaire. La réussite d’AlphaGo doit bien sûr beaucoup aux progrès de l’intelligence artificielle. Elle illustre aussi les perspectives ouvertes par le développement du machine learning, une notion qui désigne la capacité qu’a l’intelligence artificielle à apprendre par elle-même dans un cadre donné.

Sur le front de l’emploi, de tels développements posent question. Alors que les métiers peu qualifiés, aux tâches répétitives, sont déjà en voie d’automatisation, les cols blancs ne risquent-ils pas, eux aussi, d’être remplacés par des robots ? La vraie question, en fait, est plus existentielle : les humains trouveront-ils encore à s’employer à l’avenir? De nombreuses études ont, ces dernières années, tenté d’estimer l’impact de la robotisation sur l’emploi. A Davos, en janvier 2016, une étude du Forum économique mondial a estimé à cinq millions le solde des emplois perdus en réaction à la robotisation croissante dans les 15 premières économies mondiales d’ici cinq ans (7,1 millions de destructions d’emploi pour 2,1 millions de créations).

Robots : les métiers qualifiés en ligne de mire

Dans une autre étude, parue en 2013 et largement commentée depuis, deux professeurs de l’Université d’Oxford estimaient que près d’un emploi sur deux (47 %) aux Etats-Unis était susceptible d’être automatisé, c’est-à-dire effectué par un robot. Une telle proportion donne le tournis. Elle rappelle surtout que peu de métiers, finalement, devraient échapper à cette tendance. D’autant que l’automatisation des métiers qualifiés a déjà débuté. Ainsi, à la bourse de Wall Street, 70 % des ordres d’achats et de ventes d’actions sont initiés par des algorithmes. Résultat, alors que l’industrie financière employait 150 000 personnes à New York en 2000, ils n’étaient plus que 100 000 en 2013. Autre exemple, l’entretien des serveurs de Facebook. Cette mission est assurée par un logiciel appelé Cyborg. Par conséquent, le réseau social n’a besoin d’embaucher qu’un seul technicien par tranche de 20 000 ordinateurs en vue de leur maintenance.

Côté créations d’emplois, les chiffres sont plus modestes. En attestent les effectifs de certaines start-ups emblématiques de la nouvelle économie. Ainsi, lorsque Facebook a racheté Instagram en 2012 pour un milliards de dollars, le service de partage de photos comptait 13 salariés. WhatsApp, racheté par Mark Zuckerberg en 2014 pour 19 milliards de dollars, en avait 55. On le voit, les emplois créés par Facebook et consorts sont loin de compenser les pertes…

Dans un livre remarqué paru en 2015, Martin Ford, entrepreneur de la Silicon Valley, met en garde contre la possibilité d’un futur sans emploi. Selon lui, la digitalisation de l’économie permet notamment aux entreprises de baisser leurs coûts de production et d’accroître leur productivité. Un constat rien de plus classique. Simplement, parce qu’ils détruisent des emplois, les robots ne profiteraient qu’à une minorité – les salariés ultra-qualifiés – et, surtout, ils priveraient la croissance de son principal moteur : la demande des classes moyennes, dont une part croissante des emplois a été automatisée. A titre d’exemple, l’auteur rappelle que le PIB de l’économie américaine a augmenté d’un tiers par rapport à 1998 sans que la population active, elle, n’évolue – et ce alors même que la population américaine a cru.

Toute la question est de savoir si l’automatisation permettra de créer de nouveaux secteurs économiques prêts à embaucher ceux dont l’emploi est menacé par les robots. Le débat est cruellement d’actualité, l’interrogation est ancienne. Elle fut posée au XIXème siècle, au moment de la révolution industrielle, lorsque la diffusion de la machine à vapeur puis de l’électricité permirent aux paysans de trouver à s’employer dans les usines plutôt que dans les champs. Une chose est certaine : l’éducation, la formation, seront plus indispensables que jamais. La question est de savoir si cela sera suffisant pour garder son emploi.

Les STEM font recette

Face à l’automatisation croissante d’un nombre de tâches, certaines matières devraient tirer leur épingle du jeu. C’est le cas des STEM. Quatre lettres qui désignent un acronyme américain encore peu connu en France. Pourtant, ce sigle désigne ce qui pourrait bien être, demain plus encore qu’aujourd’hui, le sésame pour l’emploi. STEM signifie Science, Technology, Engineering and Mathematics (science, technologie, ingénierie et mathématiques). Soit les quatre matières, toutes scientifiques, réputées garantir à celles et ceux qui les maîtrisent un avenir professionnel serein dans une économie toujours plus digitalisée. Dit autrement, l’ingénieur et le développeur, dont les compétences figurent déjà parmi les plus recherchées sur le marché du travail, n’auraient pas – trop – de soucis à se faire. Les robots ne seraient pas prêts de prendre leur place. Si, comme on l’a vu, ce raisonnement n’est pas tout à fait exact, il n’en demeure pas moins qu’une formation scientifique est un atout précieux.

Ainsi, à la question de savoir si les salariés en France choisiraient d’étudier une discipline relevant des STEM s’ils avaient 18 ans, une majorité (55 %) répond par l’affirmative. Une proportion deux fois plus élevée que celles et ceux qui estiment leur métier menacé par la robotisation (27 %).

Au global, 63 % des salariés des 34 pays interrogés jetteraient leur dévolu sur les STEM si l’occasion leur en était donnée. En Chine, souvent qualifiée d’usine du monde, la proportion atteint même 85 %. Sans doute faut-il voir dans ce score très élevé la prise de conscience que les emplois manufacturiers sont les plus susceptibles d’être automatisés.

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