Une longue enquête de la Fondation Nestlé France montre que le repas reste une élément phare de la culture française. Le bien manger, les nouveaux régimes alimentaires, nos aspirations citoyennes et la crise sanitaire nous forcent tout de même à évoluer…
Passer un bon moment à table en mangeant des aliments sains et pas trop coûteux. Notre modèle culinaire peut se résumer en cette simple phrase. Après plus de deux ans de recherche, La Fondation Nestlé France , qui a été créée en 2008 pour étudier nos comportements alimentaires, vient de publier la toute première édition de son Observatoire Alimentation & Familles. Cette enquête est intéressante car elle repose sur une méthodologie d’analyse inédite. Des études quantitatives sur deux groupes de 1000 personnes ont été couplées à une analyse des grands thèmes de discussion sur les réseaux sociaux via des algorithmes d’intelligence artificielle lors d’une période comprise entre août 2018 et juillet 2019. Les résultats de ces travaux ont ensuite été comparés à une observation qualitative des pratiques alimentaires de 95 familles. « C’est la première fois en France que nous menons un dispositif d’analyse aussi large et aussi long pour observer les comportements alimentaires, observe Youmna Ovazza, la Vice-Présidente d’Ipsos Strategy3. Cette étude va donc au-delà des perceptions et des déclarations pour se confronter aux comportements de la vie de tous les jours des familles en France prenant également en compte l’impact du premier confinement. »
Ne jamais sauter les repas
Cette enquête confirme certains détails que nous pouvons observer chaque jour. Notre amour pour la bonne chair se confirme année après année. « Notre modèle alimentaire est réinventé à la marge par les familles afin qu’il puisse s’adapter aux nouvelles contraintes quotidiennes mais son ancrage est toujours très fort dans notre société », résume Laurence David, la déléguée générale de La Fondation Nestlé. En France, manger signifie encore être assis, à heure fixe et avec des convives. Sauter des repas reste une exception. Seulement 7% des particuliers ne prennent jamais de petit-déjeuner, 5% sautent le déjeuner et 1% ne dinent pas. Le goûter a, lui, tendance à redevenir à la mode. Un tiers des Français croquent régulièrement un biscuit ou un morceau de chocolat en milieu d’après-midi. « Le goûter permet aux familles même sans enfants de se retrouver pour profiter d’un moment de plaisir et de partage », souligne Laurence David.
Le plaisir préoccupation des Français
Le plaisir justement reste la préoccupation majeure des repas pour 58% des Français et le sujet dont ils parlent le plus sur les réseaux sociaux. Cette notion est d’abord associée au goût (62%), à la convivialité (48%) et au « manger ensemble » (41%). Cuisiner constitue un moment privilégié d’interactions. 83% de nos compatriotes cuisinent encore à plusieurs. Les écrans sont perçus comme la première menace pour la convivialité des repas. Mais même si 88% des sondés avouent déjà avoir mangé récemment devant la télé, ils sont de plus en plus nombreux à éviter de croquer un morceau en face de leur émission préférée.
Base commune
Les familles cherchent également à s’adapter à la fragmentation des régimes alimentaires afin de continuer de manger ensemble. Aujourd’hui, plus de la moitié des foyers ne mangent pas la même chose. Entre l’adolescente vegan, le fils allergique, le père amoureux de viande rouge et la maman au régime, il n’est pas simple d’imaginer un menu qui convienne à tout le monde. Pour satisfaire chaque affamé, 68% des Français affirment cuisiner des plats différents ou une base commune afin que chacun puisse les agrémenter selon ses envies. Les pâtes (39%), les légumes (27%), les pommes de terre (14%), le riz (11%) et la salade (7%) sont les ingrédients les plus utilisés pour trouver des stratégies de compromis et faire rimer convivialité et individualité.
Privilégier le made in France
Les nouvelles aspirations citoyennes des familles sont, elles aussi, en plein essor depuis l’explosion de la crise sanitaire. 51% des personnes interrogées par l’Observatoire affirment ainsi privilégier des produits made in France ou locaux et près de la moitié (45%) mangent davantage bio. De plus en plus de consommateurs vérifient également ce que les marques leur proposent. 54% utilisent une application d’information nutritionnelle comme Yuka, 46% disent manger équilibré plus souvent, 41% évitent le sucre et 39% consultent plus fréquemment les valeurs nutritionnelles des aliments. La lutte contre le gaspillage alimentaire (48%) et les emballages (41%) sont au centre des préoccupations de plus en plus d’acheteurs.
Le manger mieux a explosé pendant la crise de la Covid, mais à quel prix ?
Mais même si manger sain et équilibré est une préoccupation majeure pour 70% des Français, depuis 2016, le prix reste le principal frein qui les empêche de transformer leurs désirs en réalité. Plus d’un sondé sur deux considère que manger équilibré est encore un luxe (47%). Cette question est un sujet de préoccupation majeure amplifié par la crise sanitaire car 45% des sondés s’inquiètent de la situation financière de leur foyer. « Il existe un véritable phénomène balancier aujourd’hui, conclut Laurence David. Les consommateurs veulent mieux manger mais depuis l’arrivée du Covid, ils ont moins d’argent et ont plus de mal pour acheter les produits qu’ils souhaitent. » Cruel dilemme…